Dix ans (10) ans après le massacre de Zogota survenu dans la nuit du 03 au 04 août 2012 aux environs d’une du matin, c’est l’omerta total de la part de l’Etat. On se rappelle, dans cette nuit, des forces de défense et de sécurité ont fait une intrusion dans ce village en tuant six personnes dont le chef du village et en faisant des dégâts matériels importants.
A l’occasion de ce triste anniversaire, le collectif des victimes et amis de Zogota ont animé une conférence de presse ce 03 août 2022 pour dénoncer le silence de l’Etat guinéen dans le jugement de ce dossier.
Cette déclaration intervient en prélude de la date anniversaire de ce triste évènement, célébrée chaque année dans cette localité du sud de la Guinée, située à 60 km de la préfecture de N’Zérékoré.
Pour rappel, ce massacre est survenu lors d’une répression de protestation contre la politique de recrutement de la société d’exploitation minière Vale-BSGR alors titulaire d’une concession d’exploitation dans cette zone du gisement de fer de Simandou.
Suite à ces exactions, « les victimes, avec l’aide de l’ONG Même Droits pour Tous (MDT), ont déposé une plainte avec constitution de partie civile le 23 août 2012 devant le doyen des juges d’instruction du tribunal de première instance de N’Zérékoré. Cette plainte est encore sans suite judiciaire à la date d’aujourd’hui.”
En effet, par ordonnance de transmission des pièces au procureur générale près la cour d’appel de Kankan datée du 10 décembre 2014, le doyen des juges d’instruction du tribunal de première instance de N’Zérékoré estimait qu’il résultait des charges suffisantes contre six (6) hauts responsables des FDS et un administrateur territorial. Car, ils se sont rendus à Zogota dans la nuit du 03 au 04 août 2012 et donné volontairement la mort avec préméditation et guet-apens à cinq citoyens du village de Zogota, donné des coups et fait des blessures, volontairement mis le feu aux habitations.
Cependant, aucune suite n’a été donnée à l’ordonnance du juge et aucun procès n’a été organisé.
Jusqu’à date, l’Etat guinéen n’a fourni aucun effort pour faire la lumière sur ce massacre.
C’est ainsi, par requête en date du 13 octobre 2018, enregistrée le 19 octobre 2018 au greffe de la cour sous le N° EWC/CCJ/APP/50/18, les victimes ont saisi la cour de justice d’une action en responsabilité contre la République de Guinée pour violation des droits de l’Homme, en l’espèce : le droit à la vie ; le droit de ne pas être soumis à la torture ou autres traitement inhumains cruels ; le droit de ne pas subir une arrestation et de détention arbitraire ; le droit à un recours effectif… », a déclaré M Pépé Antoine Lama, porte-parole du collectif.
La Guinée a finalement été reconnue coupable de violation des droits de l’Homme suscités et au titre de réparation du préjudice subi, la cour a alloué aux victimes trois milliards six cents millions de GNF à titre de dommage et intérêt.
Prenant la parole, Me Pépé Michel Kolié du collectif des avocats a porté des accusations contre les cadres d’alors, ressortissants de N’Zérékoré qui auraient expliqué au président Alpha Condé qu’il n’y a eu aucun massacre.
« Dès ce massacre, certains membres du gouvernement d’alors, ressortissants de cette ville (N’Zérékoré ndlr), ont eu à dire au président de la république après leur visite de terrain qu’il n’y a pas eu de massacre à Zogota. Même une mouche n’a pas été tuée », s’est-il désolé.
Il a ensuite accusé les nouvelles autorités du pays qui, selon lui, font du deux-poids-deux-mesures. « Cette histoire de Zogota est une histoire de la Guinée. Aujourd’hui, on entend très bien parler du jugement du massacre du 28 septembre. Mais c’est parce que c’est 28 septembre qu’on parle tant de ça ? Ou bien parce que c’est Zogota qui est un village qu’on s’en fiche pas mal ? Les autorités actuelles n’étaient pas là. Mais l’administration est une continuité. Ce n’est pas Mamadi Doumbouya qui était président au moment du 28 septembre mais c’est lui qui organise le procès. Nous voudrions que ce même Mamadi Douboya fasse quelque-chose afin qu’il y ait un jugement pour les victimes de Zogota », a-t-il dit.
Pour sa part, Me Pépé Antoine Lama a interpelé l’attention des nouvelles autorités en ces terme : « Nous sommes dans l’époque de la refondation. Nous voudrions que cette situation préoccupe les nouvelles autorités. Je vais vous dire, aujourd’hui on se pose la question pourquoi il n’y a pas justice dans ce dossier. Le dossier est entre deux autorités. Où c’est au niveau du procureur général près la cour d’appel de Kankan parce que c’est lui qui l’avait officiellement reçu où c’est avec le procureur de la république près le tribunal de première instance de N’Zérékoré qui était censé recevoir le dossier après la réforme du code de procédure pénale en octobre 2016.
Il revenait au tribunal criminel de juger les six (6) personnes dont nous allons d’ailleurs révéler les identités. Il y a le colonel Mandjou Baldé qui était le commandant de la quatrième région militaire qui est décédé, le colonel Mamadouba Soumah qui était le commandant de la gendarmerie qui est actuellement à la retraite. Il est à Conakry, son domicile est connu, il a une adresse connue, il y avait le colonel Lancinet Condé qui été le commandant du camp d’infanterie de Macenta. Vous avez Hassane Sanoussi qui était le préfet de N’Zérékoré à l’époque des faits. Il vit encore, on sait où le retrouver pour faire face à la justice et vous avez Moise Tohon Lamou qui était le directeur de la sureté de N’Zérékoré qui vit encore. S’ils sont innocents où coupables, la justice va trancher », a révélé Me Pépé Antoine Lama.