Les riverains du corridor qui relie les chimpanzés des Bossou à ceux des monts Nimba et de Gban, accusent depuis quelques temps les autorités de l’institut de recherche environnementale de Bossou (IREB) de déguerpir la population de Nyon et Sanangbara sur leurs terres agricoles.
Pour avoir plus d’informations sur ce conflit qui oppose les habitants de Sanagbara et Nyon, la rédaction de Guinéenews a interrogé le président du district de Sanagbara et le Vice-maire de la commune rurale de Bossou.
S’exprimant sur ce conflit, Bagata Siomy, le président du district de Sanagbara confie : «nous sommes les propriétaires de la forêt. A un moment donné, un Japonais est venu nous dire de lui céder une partie de la forêt pour en faire le corridor. Après la proposition et comme c’est un expatrié et vu que son initiative de créer un corridor a été partagée par tous, nous avons accepté de lui céder la portion qu’il réclamait. Il a demandé une largeur de 300m sur 4km. On lui a octroyé cette portion sans compensation et nous n’avons pas réagi. Il a fait la cartographie de la partie sur 4 kilomètres de longueurs et 300 mètres de larges. Nous avons continué à faire nos champs non loin du corridor. Après la cartographie, il n’a pas mis de borne pour délimiter la zone. C’est par la suite qu’il y a eu une convention entre ce japonais et le gouvernement guinéen. Ce qui a fait que la zone dédiée au corridor est devenue un patrimoine de l’Etat. Et c’est quand le gouvernement s’est mêlé qu’il y a eu des débordements. Pare que la limite tracée par le japonais a été dépassée et ils sont en train d’occuper nos sites agricoles pour élargir le corridor. Nous les riverains immédiats avions décidé de porter l’affaire devant la justice. Et à chaque fois, ils nous emprisonnent pour avoir fait nos champs sur les abords dudit corridor. Nous n’y pouvons rien. Je suis venu voir le sous-préfet de Bossou pour lui dire que nous sommes d’accord pour l’idée de corridor mais pas pour le débordement qu’ils ont en train de faire. Nous souhaitons que l’Etat respecte les limites initiales de 4 kilomètres de longueurs sur 300 mètres de larges… Nous ne pouvons pas prétendre élargir le corridor sans nous associer à cette démarche. Nous sommes des riverains directs. Ce qui nous agace dans cette affaire, c’est que depuis 1944, la forêt des monts Nimba est classée par l’administration coloniale. Nous n’y pénétrons jamais. C’est tout récemment le corridor est né. Et après on veut l’élargir au détriment de nous les pauvres paysans… Vraiment cela est difficile à admettre. Ce que nous demandons, c’est de venir délimiter et matérialiser sur la base des mesures initiales pour que le reste nous soit restitué pour nous permettre de faire nos activités agricoles. »
Quant à Ghoto Nasser Bonimy, le premier vice-maire de la commune rurale de Bossou, il soutient que l’actuelle équipe communale a hérité de cette affaire de corridor. Toutefois, il rassure que des discussions viennent d’être engagées entre l’IREB et la population de Sanagbara afin de trouver une solution acceptable pour tous.
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« C’est depuis au temps de Gouamo Kemon, le premier guide des Japonais que cette initiative de délimitation du corridor est née avec le professeur Nakisawa. Ces limites, les habitants l’ont toujours respectées et il n’y a jamais eu de problème entre l’IREB et la population riveraine. Tout dernièrement, on a vu des dossiers qui ont été établis entre le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique et les ressortissants de Sanagbara à Conakry. Dans les papiers qui ont été établis le 16 novembre 2016, les deux parties ont convenu que l’institut de recherche environnementale de Bossou respecte la limite initiale qui est de 4 kilomètres sur 300 mètres de larges. Un accord que l’IREB a signé. L’institut devrait respecter cette limite après la réunion. Lorsque son directeur est venu à Bossou, il devrait venir avec les ressortissants de Sanangbara résidents à Conakry pour faire la délimitation. Malheureusement, il a laissé ces gens et il s’est directement attaqué au maire sortant et à certains notables du village. Maintenant au lieu de 4 kilomètres de longueurs et 300 mètres de largeurs, ils ont pris l’emprise des deux marigots. Ce qui dépasse les 2 kilomètres de largeurs. Pire, les habitants de Sanangbara et Nyon n’ont pas été impliqués. Beaucoup parmi eux ne savent pas si Gbi et Yisso, c’est-à-dire les deux marigots sont devenus la nouvelle limite du corridor. Sans explication, les gens sont venus un beau jour mettre aux arrêts les riverains du corridor… Certains parmi ces paysans étaient en prison à Lola. La population ne refuse pas de quitter mais, elle doit être impliquée pour que chacun soit au même niveau d’information et éviter des conflits. Les gens ont fait une réunion avec les ressortissants à Conakry et c’est à la suite de celle-ci qu’ils ont rencontré le ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique. Ensuite, le directeur de l’institut de recherche environnementale de Bossou a été invité par son ministre à Conakry pour aller parler du corridor. C’est à l’issue de cette rencontre qu’ils ont signé leur accord. Après la rencontre avec son ministre, ils devraient venir avec les ressortissants pour faire la délimitation du corridor ensemble. Mais, le directeur a laissé ces ressortissants à Conakry. Et quand il est venu à Sanagbara, il a pris des gens qui n’ont aucun lien avec ce problème de corridor et les faire signer l’extension du corridor. La largeur d’aujourd’hui dépasse les 2 kilomètres. Pourtant, dans cette zone les paysans ont des plantations, des champs et bas-fonds… Nous sommes en train de sensibiliser la population pour maintenir la paix et éviter des cas de violences. C’est pourquoi des rencontres sont prévues avec le directeur de l’ireb et Nakisawa. Le but du projet est d’unifier les chimpanzés de bossou et des monts Nimba afin de permettre à ces espèces protégées de se multiplier. Ces chimpanzés existent à Bossou il y a de cela plusieurs milliers d’années et ils cohabitaient avec la population sans problèmes. Les gens cultivaient dans les abords de ses collines qui surplombent Bossou sans anicroche. Avant, les chimpanzés se déplaçaient pour aller chercher des manger auprès des habitants de Bosssou. Tu ne pouvais pas rester à Bossou et faire une heure de temps sans apercevoir ces chimpanzés. Mais aujourd’hui, tu peux faire un mois sans attendre le cri d’un seul chimpanzé. Parce qu’il n’y a plus de manger. C’est pourquoi ils ont obligé d’aller loin pour aller chercher le manger… », a expliqué à Guinéenews le premier vice-maire de la commune rurale de Bossou.
Pour sa part, le directeur de l’institut de recherche environnementale de Bossou, Dr Aly Gaspard Soumah, dément catégoriquement ces accusations et s’estime victime d’une cabale.
« Nous avons eu depuis 2009, il ya de cela 10 ans, plusieurs discussions. Les ressortissants se sont levés pour aller rencontrer le ministre de l’Enseignement Supérieur sous prétexte que leurs parents ont été chassés sur les monts Nimba, à Bossou et long du corridor où ils avaient leurs champs et plantations. J’ai apporté de la lumière là-dessus. Si les ressortissants disent qu’ils ont été chassés des monts Nimba, c’est de la diversion. Les monts nimba ont été classés par l’administration coloniale depuis 1944. Le gouvernement a procédé à la réactualisation des limites à la faveur de ce décret que les collines de Bossou et la forêt de Déré ont été classées comme une partie des biosphères des monts Nimba. Jai essayé de faire des réunions de sensibilisation au niveau de la population. Ils ne nous écoutent pas. Ils ont plutôt une tendance à écouter leurs enfants qui se disent ressortissants à Conakry et ils ne tiennent pas compte de certaines réalités. Jai dit aux populations que je n’ai pas de terre à Bossou ni de forêt. Mais le corridor, c’est pour les chimpanzés. Parce que le chimpanzé sont les ancêtres des gens de Bossou et je leur ai dit de libérer la partie de façon volontaire pour qu’on puisse l’aménager pour ces chimpanzés. A l’issue de cela, les consultations qui ont été organisées à Bossou, Nyon, Sanagbara et Tiyo avec des documents officiels à l’appui. Les quatre villages se sont consultés et ils se sont entendus. Ils ont ainsi établi une attestation de donation. Pour la remise de cette donation, le ministre de l’Enseignement Supérieur a été invité à cet effet.
La cérémonie a été organisé à Sanagbara, le ministre est venu avec son cabinet, le gouverneur de N’Zérékoré, le préfet de Lola et toutes les autorités politiques et administrative de Bossou y étaient présentent. C’est la notabilité de Sanagbara qui a remis cette attestation de donation. C’est cette attestation de donation qui a été consignée et aujourd’hui, il y a des gens que je connais bien qui sont natifs de la localité qui disent que cette attestation de donation n’est pas valable au motif que ce n’est pas signé par un juge. Moi, je suis d’accord pour le dialogue. Si c’est pour remettre en cause l’attestions de donation, cela ne relève de ma compétence. Vous pouvez attaquer le document en justice ou vous referez au gouvernement. Ils me disent d’aller mesurer 300 mètres et de libérer le reste de la zone. Personne n’a été déguerpi. C’est une savane et ils ont écrit un papier pour donner au gouvernement… Je promets qu’à mon retour à Bossou je donnerai assez d’informations et des preuves sur cette situation », il a-t-il répliqués aux porte-paroles des communautés riveraines.