Dernières Nouvelles de la Guinée par les Guinéens
Pub Elysian
CIAO

Médicaments pharmaceutiques : pourquoi les prix varient d’une pharmacie à une autre ?

Il n’est pas rare aujourd’hui de voir des consommateurs faire le tour des pharmacies pour se procurer des médicaments. Tout ceci à cause de la variation des prix d’une pharmacie à une autre. Pis, le coût d’un remède peut même varier dans des officines situées dans la même commune, voire le même quartier. Cette variation de prix pour les mêmes médicaments a attiré notre attention et nous a amenés à nous interroger. Qu’est-ce qui explique ce fait décrié par les usagers ? Nous avons mené l’enquête afin de faire la part des choses concernant cette problématique.

Dans l’une des grandes pharmacies à Kaloum, pour ne pas citer le nom, le prix du médicament HYTACAND 8MG /12 coûte 430000, TAHOR 20MG CPB/28 coûte 324000, il faut débourser la somme de 754000 GNF pour s’en procurer.

Dans une autre pharmacie de renommée du quartier Kipé, le même médicament, HYCAND 8MG/12 coûte 113000 et l’autre produit TAHOR 20MG coûte 179000 GNF. Ici, il faut 293000 GNF au total pour avoir les deux. Et ce n’est pas tout ! BIPRETERAX 10mg/2,5mg, dans une pharmacie à MANQUEPAS, coûte 356.000 GNF alors qu’à SANS-FIL dans une autre pharmacie, ce même produit coûte 339.000GNF.

Comment ces deux pharmacies de la même commune de KALOUM peuvent-elles avoir des prix différents pour le même produit ? L’antibiotique NORFLOZOLE qui coûte 70.000GNF à COLEAH, s’achète à DIXINN-STADE à 82.000GNF. Les exemples ne manquent pas. Il en est ainsi dans tout le pays.

A en croire docteur H. D, pharmacien dans une officine de la place, cela est souvent lié aux problèmes de rupture. Des médicaments livrés aux officines par des grossistes bien connus et agréés peuvent, dit-il, être en rupture au plan local.

«Si la demande d’un remède qui est dans cette situation est forte dans une officine, le pharmacien de l’établissement peut décider d’aller acheter ce médicament à l’extérieur, en France par exemple ou même en Suisse. C’est tout à fait normal que le prix du remède augmente parce que d’autres frais, comme des frais de livraison, pour l’achat du médicament se sont ajoutés», soutient-il.

Pour sa part, docteur A K, pharmacienne évoluant à Kaloum, estime que la variation des prix des médicaments est due aux grossistes qui ne pratiquent pas tous, parfois, le même prix pour un même remède. «Chaque grossiste fixe son prix en fonction des dépenses qu’il a engagées pour obtenir le médicament», déclare-t-elle.

Argument que ne semble pas partager docteur S Mohamed, pharmacien dans l’une des structures chargées de la distribution de médicaments dans les officines. A en croire ce pharmacien, c’est l’Etat qui fixe le prix des médicaments.

«L’Etat peut par exemple fixer un taux de 15 % aux grossistes et 30% aux officines comme taux d’intérêt pour un médicament donné. Par conséquent, il (l’Etat, Ndlr) fixe le prix du remède automatiquement», dit-il.

 Avant de faire savoir que « cette variation se passe généralement au sein des pharmacies et non avec les grossistes.

Quant à Dr L B, la variation des prix d’un remède est surtout due au fait que chaque grossiste pratique un prix en fonction des charges qu’il a engagées avant la livraison du médicament.

Concernant la problématique de la variation des prix du même médicament selon les pharmacies ou officines, il a une position très claire : «Un médicament donné a le même prix partout sur l’ensemble du territoire guinéen que ce soit à Kaloum, Enta ou Koundara. Le prix du médicament est fixé par l’Etat et non par les pharmaciens et s’impose à toutes les officines de vente. En tout point de notre territoire, le médicament doit avoir le même prix ».

Cependant, avertit-il, « le prix en parapharmacie est fixé à l’entendement de chaque pharmacie. Lorsqu’on parle de parapharmacie, il faut voir des produits comme la nourriture infantile, les produits cosmétiques, certains stimulants comme les aphrodisiaques, etc. La parapharmacie qui ne concerne pas le terme de médicament, supporte en effet, selon notre interlocuteur, la taxe, et à ce niveau, il n’a qu’un prix indicatif qui lui, n’est pas homologué ou obligatoire. Les prix de ces produits varient fortement selon les pharmacies, surtout que les fournisseurs sont différents et n’ont pas le même circuit d’approvisionnement. Toutefois, notre professionnel souligne que concernant les médicaments à proprement dit, il peut y avoir différence de prix pour les mêmes en certaines circonstances », précise-t-il avant de continuer.

« Il y a souvent des médicaments qu’on ne trouve pas sur le territoire. C’est le cas à un moment donné de Diurex contre l’hypertension ou du Kénakor, un anti-inflammatoire qui ont complètement disparu des officines guinéennes. Pour satisfaire la clientèle, des pharmaciens commandent ce produit en France. Il s’agit de fournisseurs qui ne sont pas habituels. Puisqu’on ne peut pas vendre à perte, alors à ce niveau, les prix peuvent fortement varier, à la différence de ce qu’on a l’habitude de voir», soutient Dr L B.

Et d’ajouter qu’à part cet exemple, « les prix sont les mêmes chez nous, de Conakry à N’Zérékoré. Il faut dire qu’il y a environ, si je ne m’abuse, une dizaine de fournisseurs essentiels en Guinée. Ceux-ci ont en effet, le monopole de la fourniture de médicaments aux pharmacies. Toutefois, il peut arriver que ces fournisseurs qui ont des contrats assez intéressants avec l’Etat, en matière d’abattements fiscaux n’arrivent pas à s’approvisionner en des produits bien précis. Dans ce cas, selon l’intérêt d’un pharmacien, il peut négocier avec un fournisseur étranger pour s’approvisionner. Dans ce cas précis, le prix dudit produit va varier à la hausse selon le fournisseur », conclut-il.

Comment expliquer ces variations qu’on constate, alors même que les fournisseurs sont internes ? Voici la réponse du Dr L B : « Il s’agit de petites manipulations de caisses ou de changement de prix qui n’ont pas été pris en compte, sinon le prix d’un médicament est homologué. Vous verrez que la différence des prix d’un médicament en question varie de (500, 1000 ou 1500 GNF, ce qui n’est rien à la différence de la parapharmacie où, on va dans l’ordre de 5000, 10000 GNF voire plus».

Comment fixe-t-on le prix d’un médicament ?

« Ici, il n’y a pas de libre concurrence. L’Etat, par sa structure chargée de réceptionner les dossiers concernant l’offre de vente d’un produit donné sur le territoire. L’autorisation de mise en vente est liée dans le dossier, au prix fournisseur hors taxe. Dire le prix auquel le fournisseur achète son article. L’Etat apprécie ensuite le prix que le fournisseur veut fixer. S’il trouve que le prix est trop élevé, l’Etat discute avec le laboratoire afin de le faire baisser. Après quoi, l’Etat fixe le prix homologué qui s’impose aux pharmacies et aux grossistes. Car dans les documents fournis de mise sur le marché, l’Etat indique bien le prix fournisseur et le prix public qui est le prix auquel les pharmaciens doivent vendre tel ou tel produit. Contrairement à ce que croit le grand public, chaque pharmacie ne fixe pas son prix dans son bureau ou sa maison», soutient M. K, un responsable d’une pharmacie.

«D’ailleurs quand nous passons des commandes, le prix du médicament est déjà sur la facture et les étiquettes des prix sont quelquefois déjà confectionnées. Nous n’avons qu’à les coller sur les boîtes et il n’y a pas de manipulation autre que cela », renchérit Dr L B. Pour lui, le débat est clos, l’Etat a pris ses responsabilités et les prix en pharmacie sont sous contrôle.

Entre-temps certains citoyens se tournent vers le marché noir

Pendant de nombreuses années en République de Guinée, la vente du médicament était l’apanage des pharmacies et des pharmacies-par-terre. Depuis 1985, le phénomène de l’offre informelle pharmaceutique et médicale s’est développé de façon exponentielle.

Tout comme les États voisins, on assiste à la coexistence des activités licites et illicites de vente de médicaments. Cette situation est marquée par l’installation des points de vente de médicaments en dehors des officines agréées. Le consommateur, en quête de médicaments, aura ainsi le choix entre deux possibilités : les pharmacies et le circuit parallèle constitué de points de vente illicites où les risques d’obtenir un produit périmé, contrefait et de surcroît périmé sont élevés.

La proportion importante de personnes qui se ravitaillent au marché noir met en évidence le fait qu’en dépit de la précarité dans laquelle vit la majorité des consommateurs et le coût élevé des médicaments en pharmacie conventionnelle, les compagnies de distribution ne peuvent pas couvrir tous les besoins des populations.

Nous y reviendrons avec les réactions des responsables du ministère de la Santé et celles de l’Ordre national des Pharmaciens de Guinée.

vous pourriez aussi aimer
commentaires
Loading...