La Cour de justice de la Cédéao (Communauté des Etats de l’Afrique de l’ouest) a condamné récemment la Guinée au paiement d’une amende de 4,56 milliards de francs guinéens en guise d’indemnisation des familles des six (6) victimes, suite à l’attaque perpétrée dans la nuit du 04 août 2012, par des hommes en uniforme contre des populations de la localité de Zogota. Un massacre consécutif à un vent de révolte contre des villageois contre le recrutement des travailleurs par la société Valle, à qui l’État guinéen avait attribué l’exploitation des gisements d’une partie du mont Simandou. Huit ans après cette tragédie, les victimes de ce massacre semblent soulagées par le verdict de la Cour de justice de la Cédéao, comme ils l’ont confié à notre reporter.
« Cet événement s’est passé le 04 août 2012. Il était 01h du matin quand des militaires sont venus tuer 5 personnes et blessé une autre qui a succombé à sa blessure à l’hôpital de N’Zérékoré. Depuis que nous avons déposé notre plainte à la justice guinéenne en 2012, on a rien compris, et elle n’a rien dit. C’est pourquoi nos avocats ont déposé la plainte à la Cour de justice de la CEDEAO qui nous a finalement donné raison en novembre 2020. Nous en sommes satisfaits mais pas tellement. Parce qu’il faut qu’on donne cette somme aux victimes ou à leurs proches pour les subventionner, car certains ont perdu leurs maisons, leurs enfants sont là et il est très difficile pour nous de les prendre en charge. Ces personnes sont parfois prises en charge par certains habitants du village. La femme enceinte d’une des victimes était tombée malade et a rendu l’âme par manque de moyen », a expliqué Kpaklé Niandawolo Kolié, fils du défunt chef de district qui a succédé à son défunt père, tué lors de ce drame.
Poursuivant son récit, notre interlocuteur ajoute : « le gouvernement n’est jamais venu en aide des victimes depuis cet événement. C’est une ONG américaine qui est venue donner 180.000gnf depuis 2016 », a-t-il ajouté.
Il estime que les autorités administratives à l’époque étaient les commanditaires de ce massacre.
« C’est l’ex préfet de N’zérékoré Alexandre Sanoussy, colonel Soumah, commandant de zone de N’Zérékoré et le gouverneur de la région administrative de N’Zérékoré qui ont commandité l’attaque de notre village », a-t-il accusé.
Gouma Hégué Kpèlèyaye, mère de Nazo Kolié, tué dans le massacre est revenue elle sur les circonstances de la mort de son enfant, au micro de notre reporter. « Ce sont des titres qui nous ont fait fuir. Nous étions tous paniqués, on s’était enfermé dans la maison. Les gens sont venus nous dire de quitter, que les militaires arrivent. Moi j’ai dit que je ne quitte pas sans mon enfant, parce que je ne l’avais pas vu et je ne savais pas où il était. Je suis là jusqu’à son retour. Malheureusement il a été tué dans le massacre. Depuis lors je ne suis pas dans de bonnes conditions. Mon mari est décédé, c’est lui qui faisait tout pour moi. Il a sa femme et ses (7) enfants ici. Je n’ai rien pour les soutenir avec mon âge là. Nous demandons à ce que les coupables soient condamnés et que nous soyons indemnisés», a plaidé cette éplorée.
Le chef du village, Labilé Kolié s’est dit pour sa part très satisfait par cet arrêt de la Cour de justice de la Cédéao, tout en fustigeant le silence du gouvernement guinéen face à ce massacre.
«Je ne regarde pas l’argent qu’ils ont envoyé aux victimes et à leurs familles au moment où l’acte s’est passé. Quant à savoir si les représentants de l’Etat sont venus nous rendre visite pour au moins soulager les familles des victimes ? Je dirai qu’ils ne sont jamais venus », a-t-il déploré.
« Si on me pose la question à savoir qui seraient les coupables de ce massacre, je répondrais que ce sont les propriétaires de cette plaque et munitions que je tiens. Donc ce que nous attendons de l’Etat est d’arrêter ces coupables qu’il connaît et les condamner », a dit Labilé Kolié.
A la rentrée du village, on aperçoit les tombes des 6 victimes, tuées lors de cette expédition punitive, dont le président du district.
« Nous avons préféré les enterrer ici parce que c’est des martyrs pour nous. C’est un monument. Les 5 personnes ont été enterrées dans une fosse commune et le chef de district seul à côté », a révélé Kolié Pépé Nikoda, un témoin oculaire du massacre de Zogota.