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Mali : Le chef du poste de santé de Ghahira à bâtons rompus (interview) 

Située à la lisière entre les préfectures de Koubia et Mali précisément dans la sous-préfecture de Salambandé, Ghahira est un village très enclavé mais réputé dans l’enseignement coranique. Ainsi, des centaines de talibés (disciples) vivent dans ses différents centres d’apprentissages. Face à ce nombre important d’apprenants, le gouvernement guinéen a jugé utile de doter Ghahira d’un poste de santé approprié.  C’est ainsi que cette structure sanitaire a été mise en place en 2021 et depuis ce n’est pas moins de 450 patients qui y sont traités chaque mois. Ce, malgré un manque criard de personnel et de moyens de déplacement. En service depuis deux ans maintenant, docteur chérif Diallo, l’unique travailleur de la structure a accepté de répondre à nos questions. Lisez !

Guinéenews : docteur Chérif Diallo, depuis quand  êtes-vous à Ghahira ?

Dr chérif : je suis là depuis 2 ans au mois de mars, cette année, j’ai fait deux ans de service ici.

Guinéenews : quel est le nombre de fréquentations au niveau de cette structure sanitaire ?

Dr chérif : A ce niveau, c’est une chose dont on ne peut pas trop se lamenter. On ne se plaint pas parce que la fréquentation est là aussi. Dieu merci. Le poste aussi ,c’est un poste qui a été bien construit. Donc, ça va. Je suis très fier de la fréquentation.

Guinéenews : on peut avoir une idée, une estimation de la fréquentation par semaine ou par mois

Dr chérif : à ce niveau, vous savez, c’est un lieu où il y a beaucoup d’enfants, surtout au niveau de Ghahira c’est un coin où il y a beaucoup de Talibés. Dans la semaine, parfois il y a une cinquantaine qui vient parfois même ça dépasse parce que si c’est pendant la saison pluvieuse, il y a une fréquentation vraiment abondante qui est là. Parfois, je peux dans le mois avoir jusqu’à 450 patients et parfois même ça dépasse.

Guinéenews : quelles sont les pathologies les plus fréquentes ?

Dr chérif : Les pathologies les plus fréquentes surtout en saison pluvieuse, c’est le paludisme. Le paludisme est là beaucoup surtout qu’il y a beaucoup de talibés ici et vous savez comment le paludisme se répand. Donc, c’est le palu qui est la maladie la plus fréquente ici.

Guinéenews : quand même, vous arrivez à gérer à votre niveau ?

Dr chérif : Oui, on arrive à tout gérer sur place sauf les cas graves dont on n’est pas habilité à traiter au niveau des postes de santé à savoir les pathologies très graves. Donc, à ce niveau, on réfère au centre de santé de Salambandé.

Guineenews : c’est quoi votre capacité d’accueil en termes d’hospitalisation parce que même avec le palu ça nécessite parfois une hospitalisation ?

Dr chérif : Si c’est un cas grave, sauf les soins d’urgences qu’on fait sur place , après on réfère directement parce que le paludisme simple, ce n’est pas difficile à gérer. ça, on n’hospitalise pas.

Guinéenews : vous gérez certainement des femmes en grossesses. Dites-nous comment ça se passe, des accouchements se font-ils ici ?

Dr chérif : Oui, bien sûr ! on gère ici les accouchements et je vais vous dire que dans le mois, on peut avoir 5 à 6 accouchements. Pour le cas des CPN (consultations prénatales), on peut avoir 12 et parfois même jusqu’à 15 CPN. Donc, c’est une fierté pour le poste.

Guinéenews : côté personnel, c’est comme si vous êtes seul ici ?

Dr chérif : pour le moment, je suis seul ici. Mais, je me dis qu’être seul dans un poste de santé, ce n’est pas un problème sauf si ça trouve que la personne n’a pas de temps.

Guinéenews : Donc, vous vivez ici avec votre famille ?

Dr chérif : Oui, je vis ici avec ma famille.

Guinéenews : Ça veut dire qu’il y a une bonne ambiance entre vous et le village et que vous êtes stable ?

Dr chérif : Bien sûr ! C’est une fierté même parce que je suis venu à Ghahira. On m’a donné une femme qui est la fille du saint qui est là. Donc, vraiment, je peux dire que c’est une fierté pour moi de venir à Ghahira. En plus, j’ai beaucoup appris dans ce village. J’ai appris comment vivre avec la société. J’ai vu beaucoup de personnalité. Donc, je suis de Ghahira maintenant car je ne regrette pas d’être ici.

Guinéenews : Vous ne trouvez pas nécessaire d’avoir un assistant parce que je me dis que ça peut être compliqué parfois ?

Dr chérif : Quand même, c’est une nécessité d’avoir un assistant. Si j’en trouve même si c’est l’autorité qui m’envoie quelqu’un ça serait une fierté surtout si c’est quelqu’un qui fait bien son travail. Parce que c’est un poste de santé qui a été offert par l’Etat guinéen parce qu’il y a beaucoup de Talibés ici qui étudient le coran. Donc, c’est surtout pour ces talibés que ce poste a été donné.

Guinéenews : à part Ghahira, quelles sont les localités qui fréquentent ce poste de santé ?

Dr chérif : Il y a des gens qui quittent même jusqu’à Balaki, Koubia et beaucoup d’autres villages environnant pour venir se faire traiter ici. C’est un poste qui est vraiment très fréquenté. Quand je suis venu ici, il y a eu une amélioration côté finances c’est-à-dire recettes et côté patients aussi. C’est ce qui fait que j’ai été nommé meilleur chef de poste dans la préfecture de Mali. Donc, c’est une fierté.

Guineenews : Félicitations alors ; docteur chérif comment faites vous pour vous approvisionner en médicaments parce qu’il faut reconnaître que Ghahira est un village très enclavé ?

Dr chérif : A ce niveau depuis que le président Mamady Doumbouya est venu. Il a restructuré beaucoup de choses surtout la vente des médicaments qui n’est plus permis à n’importe qui au niveau des marchés. C’est vrai qu’on a connu des soucis à un certain moment mais, on s’est vraiment rattrapé car, de nos jours, il y a des médicaments disponibles au niveau des postes de santé parce que moi, tout ce que j’ai besoin, dès que je fais ma commande au niveau du poste de santé, on m’envoie. C’est vraiment une grande réussite pour l’État. De nos jours, on nous sert les médicaments comme on veut, si non avant, ce n’était pas comme ça. Quand tu faisais une commande on te disait souvent qu’il y a manque au niveau du stock. Il faut saluer car il y a eu beaucoup de changement.

Guinéenews : Donc, malgré l’enclavement de Ghahiran vous n’enregistrez plus de rupture ?

Dr chérif : Non en tout cas, chez moi parce que ça fait au moins 5 mois que je suis servi selon ma commande.

Guinéenews : Certainement que vous rencontrez des difficultés, qu’est-ce que vous pouvez partager avec nous ?

Dr chérif : Vous savez quand on vous confie un service ou disons une communauté, ce n’est pas facile parce qu’il y a des gens qui sont parfois difficiles. Parfois même, il y a des gens qui viennent au niveau des hôpitaux alors qu’ils n’ont pas de moyens. C’est le cas des talibés qui viennent ici malades. Tu ne peux pas les rejeter, tu es obligé de les traiter parce que tu es là pour ça. Parfois aussi, des gens viennent nous dire qu’ils n’ont pas les moyens, il faut nous aider après, on va envoyer l’argent. Une fois la personne guérie, on ne la retrouve plus.

Des propos recueillis par Alaidhy Sow Labé, pour Guinéenews.org

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