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Lutte contre les MGF: la GIZ sur le front à Mamou

D’après un rapport du Fonds des Nations Unies pour la population qui date de 2012, la Guinée est le second pays au monde le plus affecté par les mutilations génitales féminines (MGF) après la Somalie. Ceci, en dépit des dispositions pénales et les activités menées par les partenaires techniques et financiers, les organisations non gouvernementales nationales et internationales pour promouvoir l’abandon  des MGF. Une pratique  qui  se perpétue en mettant en danger la vie de plusieurs filles et femmes en âge de procréer.

C’est pourquoi dans le cadre de l’appui aux structures de dialogue entre la communauté et le système de santé pour améliorer la santé sexuelle et reproductive des jeunes filles et des femmes, la GIZ, à travers le programme de santé reproductive et familiale (PSRF) et ses partenaires, a organisé le samedi 21 avril à Mamou un forum de dialogue entre les leaders religieux et les professionnels de la santé des régions de Mamou et Labé autour des mutilations génitales féminines. Les magistrats et les agents de la sécurité étaient conviés aussi à cette rencontre.

Dans son allocution de bienvenue, Docteur Adama Camara, Conseiller technique pour le  volet 3 sur les quatre régions d’intervention de la GIZ, a dégagé l’objectif de la tenue de ce forum : «l’objectif principal du forum est de créer et maintenir un espace périodique de discussions et d’échanges d’idées entre les experts professionnels de la santé, les magistrats, les représentants de la société civile et les leaders religieux dans le but de connaître leurs points de vue. Informer les populations sur les points de vue des leaders religieux et professionnels de la santé afin de les amener à réfléchir sur le pourquoi il faut améliorer la santé reproductive des jeunes adolescents d’une manière générale et à moyen ou long terme abandonner les MGF

Le Gouverneur de région, Amadou Oury Diallo qui a présidé l’ouverture officielle du forum, a lancé un message aux participants : « j’invite tous les participants à ce forum de faire tout ce qu’on peut au sortir de cette rencontre pour que la problématique des MGF soit au centre des débats aussi bien dans les familles que dans nos communautés et à faire preuve de votre capacité de résolution de ce problème de débattre du fond du cœur sur les causes et les solutions possibles même en dehors de ce cadre d’échange. C’est seulement à cette condition que nous croitrons nos capacités d’intervention et nous soulagerons la misère et la vulnérabilité de nos enfants».

Les résultats de l’étude CAP sur la santé reproductive, en particulier chez les jeunes de 15 à 24 ans dans la zone d’intervention du PSRF/GIZ, ont été présentés. Cette présentation s’est accentuée sur la partie MGF et a été suivie des questions et réponses.

A la suite du débat, des travaux de groupe sur le thème abordé ont été organisés pour recueillir les avis des uns et des autres. Quatre groupes ont été constitués en fonction des profils socioprofessionnels, chaque groupe a travaillé sur une thématique spécifique aux MGF : les Raisons culturelles, traditionnelles et sanitaires des MGF ; les raisons religieuses, sociales et familiales des MGF ; Les risques liés aux MGF (sanitaires et psychologiques) et les risques liés aux MGF (juridiques, sociales et économiques).

Des discussions suivirent les travaux de Groupe. Appuyés par un animateur, les leaders religieux, les experts de la santé, les magistrats et les représentants de la société ont échangé librement sur les MGF. Les différents acteurs ont ouvert un débat contradictoire, mais aussi productif sur la thématique des MGF.

Sur la pratique des MGF, les musulmans s’appuient sur le «Coran qui ne parle pas d’excision. C’est dans la Sunna on parle de l’excision. Les actes obligatoires sont différentes des actes surérogatoires. Le prophète Muhammad paix et salut de Dieu sur lui a dit : « la circoncision est une tradition louable pour les hommes et un honneur pour les femmes ».

A Médine se trouvait une exciseuse, le Prophète paix et salut de Dieu sur lui a indiqué ceci : « effleure et n’abuse pas, car cela rend le visage plus rayonnant et plus agréable pour le mari ».

«Quand les deux parties circoncises entrent en contact, le bain rituel s’impose » a rappelé Elhadj Thierno Boubacar Baldé, le Secrétaire général de la ligue islamique de Labé, citant un hadith.

Par contre les chrétiens sont opposés à la pratique. «Dieu est pour la vie. En Genèse chapitre 1 verset 26, Dieu dit faisons l’Homme à notre image selon notre ressemblance. Dans le verset suivant, Dieu créa l’Homme à son image, Il créa l’homme et la femme, Dieu les bénit. Dieu apprécie sa création », a fait savoir le père Kokoli Appolinaire Kolié, le Curé de la paroisse Notre Dame du Mont Carnel de Labé. S’appuyant sur le nouveau testament, le Curé rappelle : « vous êtes le temple de Dieu et l’esprit de Dieu habite en vous, Celui qui détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira. L’église est contre la déformation de la création de Dieu.»

Les magistrats, quant eux, ils sont catégoriques : «la justice guinéenne est formelle la dessus. Toutes les formes de mutilations génitales féminines sont interdites sur toute l’étendue du territoire national. L’article 258 du code pénal dispose ceci : «les mutilations génitales féminines s’entendent par toute ablation partielle ou totale des organes génitaux des jeunes filles ou des femmes ou toutes autres opérations concernant ces organes. Toutes les formes de mutilations génitales féminines pratiquées par toute personne quelle que soit sa qualité, sont interdites en République de Guinée, notamment:

  1. L’ablation partielle ou totale de la glande du clitoris;
  2. L’ablation des petites ou des grandes lèvres;
  3. L’infibulation qui consiste à coudre les petites ou les grandes lèvres pour ne laisser que le méat ».

L’article 259 dispose : «Quiconque, par des méthodes traditionnelles ou modernes, pratique ou favorise les mutilations génitales féminines ou y participe, se rend coupable de violences volontaires sur la personne de l’excisée. Tout acte de cette nature est puni d’un emprisonnement de 16 jours à 2 ans et d’une amende de 500.000 à 2.000.000 de francs guinéens ou de l’une de ces deux peines seulement. S’il y a eu préméditation ou guet-apens, l’emprisonnement est de 2 à 5 ans et l’amende de 1.000.000 à 3.000.000 de francs guinéens. Les ascendants ou toutes autres personnes ayant autorité sur l’enfant ou en ayant la garde, qui ont autorisé ou favorisé la mutilation génitale féminine, sont punies des mêmes peines que les auteurs. La peine maximale est appliquée, lorsque les mutilations génitales féminines sont pratiquées dans une structure sanitaire publique ou privée et favorisée par une personne relevant du corps paramédical ou médical, notamment les médecins, les infirmiers, sages-femmes, les agents techniques de santé ».

L’article 260 va plus loin : «lorsque la mutilation génitale féminine a entraîné une infirmité, les auteurs sont punis de la réclusion criminelle de 5 à 10 ans et d’une amende de 1.000.000 à 3.000.000 de francs guinéens ».

L’article 261 est plus sévère et stipule :  «lorsque la mort de la victime s’en est suivie, les auteurs sont punis de la réclusion criminelle de 5 à 20 ans ». Nous condamnons fermement cette pratique », a mis en garde Ibrahima Sory Camara, magistrat au tribunal de première instance de Mamou.

De leur part, les agents de santé ont dégagé les risques liés aux MGF. A les en croire, les problèmes de santé auxquels font face les filles ayant subi cette pratique sont, entre autres, les douleurs sévères, les infections pelviennes, les hémorragies, la fracture, la rétention urinaire aigue, les problèmes pendant l’accouchement, les difficultés menstruelles, la stérilité, les infections IST/VIH SIDA, voir le décès.

Faut-il par ailleurs rappeler qu’il a été question, à travers ces débats, d’informer les populations afin de les conduire à réfléchir pourquoi il faut améliorer la santé sexuelle reproductive des jeunes adolescents d’une manière globale et empêcher la pratique des mutilations génitales féminines.

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