Domingna est l’un des 21 districts de la commune urbaine de Boffa et fait partie des localités guinéennes ayant été le théâtre d’échanges d’esclaves dans les années 1800. Il avait été le point de départ des esclaves sans retour vers l’Amérique, précisément vers la Caroline du Sud. Dans ce district, on trouve deux ports à savoir : le port Paterson Zochonis (PZ) où les esclaves étaient embarqués dans les bateaux et le port Niger, qui a également servi de lieu d’échanges entre les produits locaux africains et les pacotilles des négriers.
Actuellement, des traces des esclaves subsistent dans ces deux ports, notamment le puits des esclaves, les blocs administratifs des négriers, les prisons et le quai qui servait d’accostage des bateaux. Ainsi que le tunnel où les esclaves étaient enfermés. Faute de réhabilitation et d’aménagement de ce patrimoine historique, ce site se trouve dans un état avancé de délabrement.
« Domingna a été fondé par deux frères venus du Fouta Djallon à la suite de l’invasion des Peuls pour l’islamisation. Ce qui avait provoqué une forte opposition des chefs Djallonkés, Baga, Mikhiforet, Landouma et Nalou. Cette situation s’est soldée par une guerre sainte connue sous le nom de la guerre de Talassan. C’est ainsi que ces frères se sont installés à Domingna, au bord du fleuve Fatala, à la fin du 16ème siècle. Plus tard, le petit frère est parti s’installer à Congnaingna. Domin Conté et son frère étaient des chasseurs d’éléphants. Après l’installation du vieux Domin Conté, le village a pris son nom. Nous avons ici un patrimoine riche mais négligé, un village rempli d’histoires de la traite négrière, étayées par des preuves tangibles, mais il n’est pas exploité. J’adresse un appel à l’État pour qu’il mette en valeur ce site touristique », a révélé Momo Crameur Conté, président du district.
L’historien Georges Camara Domingna a mis l’accent sur le métissage des populations enregistré à la suite de la traite négrière : « Domingna est l’un des villages ayant connu à Boffa, un brassage très poussé des populations locales avec les négriers. Avant le décès de Niarrabely, son mari Louis Lightburn avait fait du port Domingna un relais pour l’embarquement des esclaves à destination de l’Amérique, plus précisément en Caroline du Sud. Ils ont créé le comptoir au port PZ (Paterson Zochonis), qui était une compagnie multinationale. À Domingna, on peut retrouver des noms de famille tels que Barrizakiss, les Tornes, Souarès, Fabert, Wilkinson, Curtis et Fernandez », a-t-il relaté.
Poursuivant, notre interlocuteur a parlé de l’abandon de ce patrimoine historique, qui pourrait pourtant être une source de revenus et un pourvoyeur d’emplois : « ce site n’a jamais connu de réhabilitation, il est presque abandonné. Toutefois, s’il était réhabilité, il attirerait certainement des touristes. Ce qui pourrait générer des revenus pour la Guinée, et en particulier pour Boffa. Domingna a un potentiel touristique bien plus grand que l’île de Gorée s’il était aménagé. Aujourd’hui, les traces sont en train de disparaître sous l’effet des intempéries de la nature. Nous demandons à l’État, en particulier au ministère de la Culture, de nous aider à aménager ce site pour attirer les touristes », a suggéré Georges Camara, historien de profession.
Il convient de noter que ce district ne dispose d’aucune infrastructure sociale de base permettant de stimuler son développement. Les enfants parcourent plusieurs kilomètres pour rejoindre les écoles du centre-ville de Boffa. La seule école primaire de 5 classes, est dans un état de délabrement très avancé.