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La double question après une manifestation : qui gagne ? qui perd ?

Nous sortons d’une manifestation, elle-même qui a succédé à d’autres que nous avons vécues. Au même moment, on entend dire que la dernière, si jamais il s’en trouve, reste à venir. Comme pour dire qu’on est loin d’en avoir fini avec ces zones de turbulences pour lesquelles, un vocabulaire varié nous est servi. Pour les désigner on parle de manifestation, de marche pacifique, de marche citoyenne, de marche de protestation. Tant et si bien que le langage courant s’en est emparé pour l’appeler tout simplement, grève. Peut-être parce qu’à l’origine, on sait que ce sont les travailleurs qui vont en grève pour revendiquer un droit quelconque en rapport avec le travail. Et ils organisent alors des défilés dans les rues, pour se faire entendre. Tout cela, s’exprimant certes, avec cris de colère, des revendications scandées et des banderoles déroulées. Mais pas au-delà ! Le seuil n’atteignant jamais celui auquel nous assistons à présent, en termes de violences et de destructions et plus grave encore…de mort de l’un des protagonistes ou de toute autre personne collatérale ! Et ajoutons que ces marches corporatives se déroulent sous bonne escorte des services de sécurité qui protègent l’itinéraire emprunté, d’un bout à l’autre de sa progression, contre tout risque de débordement. Aussitôt arrivés au point final fixé, les gens se dispersent tranquillement.

Ils ont protesté à tue-tête et vidé leur trop-plein de réserves et de frustrations. Ils sont tranquilles et s’en vont, sûrs d’avoir été entendus. Et généralement, la réponse ne tarde pas à suivre. On les appelle pour négocier. Et tout finit bien, sans aucun dommage pour qui que ce soit. C’est à cela que nous devons arriver pour toutes revendications, qu’elles soient d’ordre politique, corporatif ou sociétal.

Ce que nous vivons chez nous est tout le contraire de ce qui est décrit ici. Peut-être, est-ce une résultante des effluves exhalés par les mots nouveaux que l’occident nous a servis ou imposés à travers son concept de la mondialisation : démocratie, politique, libéralisme, etc. C’est peut-être là que se situe l’origine de nos problèmes.

En tout cas, ce qu’on voit aujourd’hui semble bien le confirmer. Tout ce que nous avons de concepts et de valeurs est galvaudé et mis dans tous les sens.

Chez nous, manifester est devenu synonyme de violences sans limites, de vandalisme, destructions, pyromanie et bien d’autres mots et maux encore ! Sur le terrain, des camps que tout réunit, s’affrontent, s’invectivent et se déchirent, au nom de concepts à peine définis ou d’égos disproportionnés. La haine dégainée de part et d’autre, par les groupes antagoniques qui s’affrontent, creuse peu à peu, des sillons profonds qui sapent la cohésion sociale et même nationale ! Si l’on n’y prend garde. C’est le cas de le dire !

Du côté des forces de l’ordre, chargées de ramener le calme, les méthodes ont évolué, reconnaît on, de plus en plus. Mais, de ce point de vue, il reste encore beaucoup à faire. Des manifestants se plaignent encore de ce qu’ils ont appelé « la répression disproportionnée et les bavures » dont ils sont l’objet. Ils évoquent également des cas d’infiltration de contre-manifestants civils qui, selon eux, apportent un appui effectif aux agents, dans le maintien d’ordre.

L’un dans l’autre, confirmé ou pas, tout cela concourt à créer un amalgame de situations qui sont graves en elles-mêmes et compliquées à gérer. Leurs effets ne tardent pas à se faire sentir : la ville est paralysée ; les activités tournent au ralenti, ou s’arrêtent à certains niveaux ; des gens ne peuvent pas se rendre au travail ; des réunions importantes ne peuvent pas se tenir ; des rendez-vous sont différés ; des voyages ont été reportés ; des malades n’ont pas été examinés ou soignés ; des boulangers n’ont pas fabriqué du pain ; des boutiques ont été défoncées ; des marchés n’ont pas ouvert, etc…

Les cas dans le genre, tout aussi graves les uns que les autres, n’en finissent pas de s’égrener, montrant les énormes préjudices que ces manifestations peuvent causer aux uns et aux autres, sans aucune distinction, de quelque nature que ce soit.

Ajoutons à ce décompte non exhaustif, ce que coûte à l’État de ramener le calme et garantir la sécurité publique. Un rôle régalien qu’il lui revient d’assumer. Pour le faire, il doit mobiliser de gros effectifs d’agents des forces de l’ordre. Des personnels à détacher d’un poste donné, pour accomplir cette mission spéciale de maintien d’ordre. Il faut les équiper, les transporter et les nourrir. Tout cela a un coût non négligeable et en plus, présente des risques.

Dans le même ordre d’idées, parmi les protagonistes sur le terrain,   vous entendrez des propos divers tenus à la fin des manifestations. D’aucuns vont affirmer avoir remporté la victoire sur l’autre camp, pour une raison quelconque, qu’ils utilisent comme indicateur.  Pour un tel, c’est pour avoir barré la route et empêché tout passage. Un autre pour avoir dispersé des manifestants regroupés en grand nombre en un endroit où personne ne réussissait à les déloger. Bravo à lui ! Mais il ne dit pas comment il l’a fait. Un troisième se réjouit de la paralysie des activités dans la ville. Tel autre affirme qu’il y a quand même eu de la circulation, si infime soit-elle et que, tant les marchés que les bureaux, sont restés ouverts.

Mais, dans tout cela, qui de tous ceux-ci a réellement gagné ? Personne, répondrons nous, sans ambages. Pour les raisons énumérées plus haut et bien d’autres encore, dont personne ne peut se réjouir. En vérité, c’est plutôt tout le monde qui a perdu. Et hélas, notre pays avec ! Tout cela pourquoi ? Posons nous bien la question, dans l’espoir d’obtenir la réponse.

Pour le réussir, il faut du calme, du recul et de la retenue. Dans ce cas précis, c’est de notre pays, notre patrie, notre devenir commun, celui de nos enfants, qu’il s’agit.

Inspirons nous de certaines de nos valeurs ancestrales pour mieux savoir ce à quoi nous devons nous attendre, si nous continuons sur ce mauvais chemin qui conduit à la ruine et au désespoir.

Avec une traduction très approximative, il est dit chez nous que la finalité d’une bagarre ne s’apprécie réellement que le lendemain. Cela est confirmé par les bilans qui sont présentés de part et d’autre. Chacun s’étonne et s’exclame pour dire pourquoi tout ça ? Pourquoi n’en avoir pas fait l’économie ?

On dit aussi que si ton enfant est en faute au point qu’il mérite d’être corrigé, avant de le faire, prends une poignée de grains et jette les par terre. Ramasse les ensuite l’un après l’autre et après, si tu dois toujours le corriger, corrige le alors.

La religion n’est pas en reste dans ce cadre précis du rejet de la violence. Il est dit que dans toute colère du musulman, il y a toujours Cheytane à l’œuvre.  Son rôle est de conduire l’homme, toujours au pire. Satan, comme on le désigne en français est un incitateur au péché, donc le pire des conseillers qu’on peut rencontrer en ce bas monde. Il peut habiter le cœur d’un proche en qui nous avons confiance et qui a une certaine influence sur nous. Que Dieu nous préserve alors d’écouter et de suivre les conseils qu’il va nous donner, en quelque circonstance que ce soit. Nous risquons de le regretter.  » Il faut taper, interpeller, condamner, enfermer et même tuer, s’il le faut »

C’est ce genre de mots qu’on susurre à l’oreille du chef : « Lui, il est contre toi, pourquoi tu acceptes cela ? Ces gens-là, ils sont comme ça. C’est de la foutaise. Moi, je ne l’aurais pas toléré. Il faut en finir avec ces comportements, une fois pour toutes. Que ça serve d’exemple pour tous les autres.» Voilà comment Cheytane parle.

Gare à vous de lui obéir. Vous ferez du mal sans limite tout autour de vous. Le regret et l’opprobre vont vous torpiller, tout le temps qu’il vous sera donné de vivre et même au-delà. Sachez que Cheytane ne reviendra plus, si ce n’est pour poursuivre la même œuvre destructrice. Sa mission accomplie, il s’en va habiter le cœur d’un autre homme. Ses ‘’proies’’ sont essentiellement constituées de gens dont la foi manque d’assurance et restent donc, fragiles et influençables.

En général, à la violence répond toujours une violence, de même qu’une action entraîne toujours une réaction. Dieu n’a rien donné de meilleur aux hommes que la parole. C’est par elle que tout se règle et s’aplanit, en ce bas monde.

C’est quand on est à court d’arguments qu’on utilise la violence. Et celle-ci a beau être verbale ou physique, cela participe de la même dynamique conflictuelle.

On dit chez nous, que tous les hommes ont un point commun qui les unit. Mais un buisson est placé entre eux qui les empêche de s’en apercevoir. Pour peu qu’ils veuillent retrouver ces attaches communes, il leur suffit de faire recours à la parole. Elle taille aussitôt ledit buisson et l’horizon s’ouvre devant eux et ils voient le point commun, inconnu d’eux, mais pourtant, bien réel.

On peut dire que ces repères ont bien manqué à notre pays. Depuis bien des décennies, pour ne pas dire depuis l’indépendance, notre évolution a connu des soubresauts épisodiques, caractérisés par des remous sociaux qui ont dégénéré, dans la plupart des cas. Ces troubles et antagonismes récurrents, sources de frictions et de profonds ressentiments, perturbent l’équilibre interne du pays et lui causent d’énormes préjudices.

Point besoin d’être un expert en sciences humaines ou politiques, pour savoir qu’une telle situation, si elle n’est pas entièrement expurgée, va toujours entraver la paix sociale et le développement, tant attendus.

Au regard de ce qui se passe, nous pouvons dire que ce noble objectif attend encore d’être atteint. Les efforts de ceux qui s’attellent à son aboutissement ne sont pas encore visibles sur le terrain. Leurs tentatives pour le réussir sont toujours annihilées par des forces obscures qui empêchent que la situation s’améliore.

Cette réalité est connue de tous ou presque. Elle nous vient surtout de notre sérail politique, jamais stabilisé. C’est à croire que si nous aspirons tous à la paix et au développement, par contre, nous ne sommes pas bien nombreux à nous consacrer à les faire triompher. Tout le monde le reconnaît et s’en plaint. Mais jusque-là, dans ce cadre précis, nous n’avons pas encore obtenu, un résultat qui soit effectif et durable.

Face à cet écueil déstabilisateur et bloquant, on se demande pourquoi ça ne va toujours pas. Pourquoi nous n’obtenons pas de solution dans la résolution définitive de cette équation dont certaines des inconnues continuent encore de troubler notre pays.

Vaste question, surtout vaste programme qui nous interpelle tous. Il est urgent que nous y consacrions toute l’attention nécessaire, pour l’intérêt bien compris de notre nation, dont nous devons consolider les bases, à tout prix. Retenons bien, qu’il y va de notre salut à tous !

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