Après la pluie, le beaux temps. Dommage que ce vieux dicton ne soit pas une réalité pour la ville de Kankan, quand bien même qu’on la qualifie pourtant de deuxième capitale de la Guinée. Ainsi après la grosse averse qui s’est abattue la nuit dernière sur la ville, c’est l’insalubrité qui refait surface.
Même si le maire et toute son équipe municipale ne semblent pas les voir, les ordures drainées par les eaux de ruissèlement sont sorties de leurs cachettes, et sont désormais bien visibles sur toutes les grandes artères de la cité.
Bien que situé à proximité du centre-ville, le quartier Korialen, est l’un des plus sales de la commune urbaine. Moussa Konaté, le chef dudit quartier croit savoir pourquoi.
« Chez nous les caniveaux ont été très mal construits. D’un ils ne sont pas profonds, de deux ils n’ont pas de pente. Et puis il faut dire aussi que la position géographique de notre quartier ne nous aide pas vraiment. Nous qui sommes dans les quartiers trop rapprochés du fleuve(Milo) comme Korialen ou Banakoroda, c’est nous qui recevons tous les déchets des autres quartiers de la ville qui sont situés vers le haut. Quand il pleut la nuit, il y a toujours des gens qui déversent toutes sortes d’ordures dans ces caniveaux, après l’écoulement, c’est chez nous que les immondices viennent stagner. Les jeunes de mon quartier souffrent, ils curent ces caniveaux à chaque fois, mais dès qu’il pleut, tout redevient sale, comme s’ils n’avaient rien fait du tout. Voilà notre situation », se plaint-il.
Ce sont les mêmes réalités ou presque au quartier de la Gare. Aboubacar Condé dit Alex, est le chef de cet autre quartier réputé très sale de Kankan.
« Nous, nous avons la malchance d’être à côté d’un marché (marché Sogbè) dont les usagers ne s’en foutent pas mal de la propreté. Ils déposent leurs ordures partout où bon leur semble. Et c’est ça qui nous fatiguent beaucoup. Donc une chose est claire, toutes ces ordures que vous voyez ici, ne proviennent pas forcément de ce quartier », indique-t-il.
Pourtant dit-il, « si gouverner c’est anticiper, alors sur cette question d’insalubrité, les autorités notamment celles de la mairie de Kankan, qui ont pour mission régalienne d’assurer la propreté de la ville, ont complètement failli à leur devoir. Parce qu’au moment où le maire et tous les autres administrateurs faisaient des campagnes pour la nouvelle constitution, en ce moment il ne pleuvait pas. Nous étions en saison sèche. C’était le bon moment de prendre de vraies initiatives, élaborer des politiques concrètes pour lutter contre les ordures. Car on était bien conscient que tôt ou tard les pluies commenceront à tomber et que l’image de la ville ne serait pas reluisantes », c’est du moins l’avis de Ibrahim Condé, un jeune entrepreneur de la place.
Jamais les citoyens n’ont autant dénoncé ce phénomène d’insalubrité qui bat son plein partout dans la cité. Mory Keita, couturier rencontré dans ce même quartier de la Gare, à côté d’un fossé rempli de détritus, pointe du doigt « l’incompétence » et voire « une magouille » des autorités communales.
« Les travailleurs de la mairie sont venus nous récupérer de l’argent ici, en nous faisant croire qu’ils vont procéder à l’assainissement des lieux. Ils ne sont jamais revenus. En colère, quand je me suis rendu à la mairie, ils m’ont dit que ce n’étaient pas eux. Et pourtant les papiers qui sont venus comportaient bel et bien leur signature. En tout cas, c’est fini, nous ne pouvons plus avoir confiance en eux. Ils doivent revoir leurs méthodes de travail pour l’assainissement qui est tout sauf convainquant. Il n’y a qu’à voir le résultat sur le terrain. C’est catastrophique. Le maire et son équipe ne sont bon à rien», a-t-il pesté.
Devant donc cette problématique d’insalubrité, le maire de Kankan, Mory Kolofon Diakité, en dépit des nombreuses tentatives, refuse de communiquer. Alors que depuis son installation au mois de février 2019, aucune politique fiable pour combattre l’insalubrité, n’a été instituée par la mairie.
Enfin de compte, on en vient seulement à se demander, en cette période de crise sanitaire, comment les autorités de Kankan peuvent croiser les bras, pour que cette agglomération devienne aussi insalubre.