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Kankan : l’usine de jus de fruits à l’agonie en dépit de sa reprise par un nouvel acquéreur (reportage)

L’usine de jus de fruits de Kankan, située à Kankan-Koura, en périphérie de la ville, n’arrive toujours pas à sortir la tête de l’eau en dépit des nombreux efforts déjà engagés pour la remettre à flot.

Inaugurée en 1967 par le feu président Ahmed Sékou Touré en compagnie de son homologue du Mali, feu président Modibo Kéita, cette unité industrielle est en proie à de nombreuses difficultés.

Au cours de notre visite ce mardi 23 février, nous avons trouvé l’enceinte de l’usine presque déserte. Le bloc administratif fermé, en dehors du gardien qui faisait sa petite sieste et que nous n’avons pas voulu déranger, il n’y avait qu’un seul travailleur dans cette grande enceinte. Il s’agit du laborantin Emmanuel Millimouno qui y travaille depuis 47 ans.

A l’en croire, les travaux sont en berne dans cette unité industrielle depuis la mort du premier président Ahmed Sékou Touré.

« Après l’ère Sékoutouréenne, l’usine fut privatisée et depuis les productions sont en chute libre. En ce moment avec une capacité globale de production estimée à 13 400 tonnes par ans, soit 13 400.000 litres, nous-en sommes aujourd’hui à seulement 4000 litres. Aussi au temps de la première République, nous étions des centaines à travailler ici à plein temps sans compter ceux de l’administration. Mais aujourd’hui, on est que 5. Les choses ont grandement changé. Après la mort du premier président, il y a eu un arrêt. Ensuite la privatisation est intervenue en 1986. Des opérateurs économiques nationaux ont hérité des unités industrielles et c’était Elhaj Moriba Kourouma à l’époque. Mais ces derniers n’ont pas su gérer, on s’est retrouvé ainsi au chômage et ce fut le début d’un interminable cycle d’arrêts prolongés », nous a-t-il confiés.

A l’arrivée du président Alpha Condé au pouvoir, l’usine a été confiée à un nouvel opérateur économique du nom de Sorel Doumbouya. Et même avec lui, les choses peinent toujours à s’améliorer.

« On a repris les travaux avec un autre opérateur qui est M. Sory Doumbouya, il y a de cela plusieurs années, mais hélas ! On n’arrive toujours pas à travailler à plein temps », a-t-il regretté.

Plus loin, il sollicite auprès de l’Etat une subvention pour permettre à son nouvel acquéreur et à l’usine de fonctionner à plein régime.

« Il faut un financement de l’Etat pour soutenir les efforts. Parce que monsieur Sory Doumbouya est animé d’une bonne volonté, il est engagé et il est un patriote. Maintenant, si l’Etat pouvait lui donner un coup de pouce financier, je suis certain que cette usine pourra décoller », a-t-il plaidé.

Par ailleurs, au terme de notre visite, nous avons trouvé assis sous l’un des manguiers dans la cour, un travailleur très frustré qui nous a interpellé sur la mauvaise gestion de cette usine par les hommes de Sory Doumbouya.

« Moi, je vais vous dire la vérité ! Cette usine a toujours été mal gérée. Les gens choisis par l’actuel patron Sorel, lui-même, ne sont pas à la hauteur. Depuis son arrivée, c’est le neuvième directeur qu’il a nommé. Voilà, ils sont tous absents de leurs bureaux. Le bloc administratif est vide en ce jour ouvré. Quand le ministre de l’Industrie est venu visiter l’installation en 2018, ils ont allumé les machines et faire semblant de travailler juste pour convaincre ce dernier. Lors de la dernière visite du chef de l’Etat à Kankan, on disait aussi qu’il allait venir visiter l’usine. Ce jour, on nous a même fait laver les bureaux. Mais, le président n’est pas venu.  Nous, nous sommes des travailleurs. Tout ce qu’on veut, c’est de travailler. Mais regarder vous-mêmes l’ambiance qui règne dans cette usine. On l’impression qu’on est dans un No mans ’land. Le gardien dort, moi voilà, je vais devoir rentrer chez moi sans rien faire comme travail. Psychologiquement déjà, c’est insupportable. C’est parce que je ne trouve pas un autre travail sinon vous ne m’auriez pas trouvé sur place ici. Rien ne va et rien ne marche. Si la politique de privatisation ne porte pas de fruit, est-ce qu’on est obligé de la poursuivre ? Après toutes ces années dans ce processus, on n’avance pas, rien ne bouge. Il faut qu’on quitte dans cette situation. Alors tout ce que moi je peux demander en tant que travailleur, c’est de tout simplement dire à l’Etat de reprendre cette usine », a-t-il interpellé.

Aux dernières informations, Sory Doumbouya a décidé de confier la gestion de l’usine à son fils qui est revenu de l’étranger. Ce dernier invoquant un problème d’agenda, affirme ne pas pouvoir nous recevoir pour parler de la situation de cette usine cette semaine sauf celle suivant.

Quant à Sorel Doumbouya, il n’a pas daigné décrocher nos appels jusqu’au moment où nous mettons en ligne cette dépêche.

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