En prenant le pouvoir après avoir renversé l’ancien président Alpha Condé, le chef de la junte militaire le colonel Mamadi Doumbouya, commandant des forces spéciales a promis entre autres de faire de la justice la boussole dans le pays, lutter contre la gabegie financière, de rompre avec le recyclage et la chasse aux sorcières, qui avaient cours dans le pays. Cela fait un an jour pour jour que le chef de la junte dirige le pays. Qu’en est-il de toutes ses promesses aux yeux des populations de Kankan ? Le moins qu’on puisse dire pour répondre à cette question, c’est que les avis sont assez partagés dans la capitale du Nabaya.
Du côté des représentants de partis politiques, interrogés ce mercredi 30 août 2022, plusieurs acteurs ont tiré un bilan positif. A l’image de Lancinè Condé, secrétaire Fédéral du Bloc Liberal : « ce bilan de l’an 1 passé aux commandes du pays, on peut dire qu’il a été positif. On a assisté à d’excellentes réformes, telle que la mise en place de la CRIEF qui est en train de forcément contribuer à la maîtrise, à la stabilisation et à l’accroissement de notre économie. Il y a aussi l’uniformisation de l’armée guinéenne, le rajeunissement de l’administration, la continuité de l’Etat à travers la poursuite des projets et programmes de gouvernement », a-t-il énuméré. Même son de cloche pour Hadja Mamadi Kaba coordinateur du PADES à Kankan et Mamadi Hawagbe Kaba responsable de la jeunesse du PEDN et Mohamed Mansaré, coordinateur régional du MPDG en Haute Guinée.
Par contre, il y a aussi ceux qui fustigent ce premier bilan annuel du CNRD et du colonel Mamady Doumbouya à la tête du pays. Manby Camara coordinateur du RPG arc -en -ciel : « Il n’y a eu aucun changement. Ce bilan est purement négatif. Ils ont freiné le processus normal de développement du pays qui était en cours. Aujourd’hui la situation du pays ne cesse de se dégrader. Depuis leur arrivée, le pays ne fait que se noyer dans un puits », a-t-elle regretté.
Un point de vue amplement partagé par Antoine Dôbô Guilavogui, secrétaire fédéral de l’UFDG : « Un ans après, la Gabegie financière est là, la justice est instrumentalisée, la corruption, la médiocrité et la famillecratie, qu’on met en avant sous prétexte de rajeunissement de l’administration, le tout sous fond de recyclage. Ils sont venus promettre à la population de Kankan que dans 2 mois, qu’il y aura du courant. Et maintenant, voilà rien. Mais ce qui est pire encore dans tout ça, ce sont les restrictions et les atteintes aux libertés fondamentales, tel que le droit de manifester, le tout couronné par la mort de 8 personnes en marge des manifestations, tout ça en seulement 1 an. Même Alpha Condé n’a pas été autant nocif», a-t-il déploré.
Qu’en est-il des acteurs de la société civile ?
Sur ce bilan annuel du CNRD à Kankan, plusieurs acteurs de la société civile ne sont pas restés en marge des critiques. Même s’ils apprécient globalement la junte dans sa gestion du pays, ils déplorent un manque de dialogue. : « Aucun bilan ne peut être parfait. Et on ne peut pas non plus avoir raison dans tout et sur tout. La logique voudrait que même si on est en désaccord avec son adversaire, il faut l’approcher pour l’écouter. On tient compte de ce qu’il dit et on respecte aussi ses dits. Je crois que c’est ce manque de dialogue qui a été le point noir de ce premier anniversaire de la transition avec le CNRD », nous a affirmé Bangaly Sylla, un jeune acteur de la société civile.
Et pour renchérir, Louceny Chérif, président régional du Conseil national des organisations de la société civile, a affirmé que : « Le gros problème de cette transition, n’est autre chose que le désaccord avec les partis politiques. Donc c’est cela, qu’il faut absolument revoir pour la suite», a-t-il préconisé.
Toujours en marge de ce panel, certains citoyens à la base rencontrés un peu partout à travers le Nabaya, ont réagi : « Pour moi le bilan du CNRD est quasi négatif. Déjà d’entrée de jeu, ils ont violé la charte de la transition qu’eux-mêmes ont élaboré. Ils sont en train d’arrêter les anciens ministres du professeur Alpha Condé sans jugement c’est comme ci c’est un règlement de compte. Pourtant, on avait dit qu’il n’y aurait pas de chasse aux sorcières. Aucune action n’a été entreprise allant dans le sens de l’organisation des élections. Ce bilan pour moi est négatif, il n’y a rien de concret », nous a confié Ayouba Condé fonctionnaire retraité.
« Comme toute œuvre humaine, on peut dire que le bilan du CNRD est mitigé. On ne peut pas dire que c’est positif à cent pour cent ni négatif à cent pour cent. Ils ont beaucoup fait pour la moralisation de l’administration publique, mais entretemps la vie est devenue très chère. Le carburant a augmenté et les conséquences sur les prix des denrées n’ont pas tardé. La vie est très chère surtout à Kankan ici », a déploré pour sa part Traoré Djatian, taximaître de profession.