Persécutée par le régime d’apartheid de Pretoria qu’elle combattait farouchement, Miriam Makeba, affectueusement appelée « Maman Africa », la célèbre auteure des cultissimes tubes ‘’Pata Pata’’ et ‘’Malaïka’’, était obligée dans les années ‘’60’’ de s’exiler en Guinée où elle obtint la naturalisation.
Les grillages qui servaient de clôture sont complètement démantelés mettant, du coup à la portée de tout le monde ce prestigieux site qu’il a été. La cour, elle, est envahie par des broussailles et des arbres sauvages. Avec l’âge, le manque d’entretien et le coup des intempéries de la nature, les murs de la grande case sont lézardés. Il y a même des parties qui commencent à céder. La dalle de toiture suinte de partout quand il pleut.
Les effets conjugués de tous ces facteurs dégradants font que ce patrimoine est aujourd’hui exposé à un grand risque d’effondrement, si l’on n’y prend garde. Jusque dans un passé récent, c’est le gardien de la villa et le responsable en charge du patrimoine bâti de Dalaba (à l’époque de la construction de la villa), qui entretenaient tant bien que mal ce site. Malheureusement, ce dernier est décédé depuis longtemps et le gardien, faute de salaire, a dû abandonner les lieux.
Pour la petite histoire, c’est vers les années 70 que Miriam Makeba, de son vrai nom, Zenzile Makeba Qgwashu Nguvama, en compagnie du président Sékou Touré, lors d’une tournée officielle, a découvert cette ville et est tombé amoureuse d’elle. Depuis, elle a sollicité à s’y établir.
«A la faveur de cette visite que le président Ahmed Sékou Touré a ordonné au responsable en charge du patrimoine bâti de Dalaba de l’époque, de diligenter la réalisation d’une villa pour Miriam Makeba. Ce dernier a fait venir les meilleurs ingénieurs pour bâtir cette case à l’architecture peule. Sur les murs sont décorés avec des images pittoresques, le plafond a été fait avec des éventails locaux, communément appelés ‘’Lefas’’. Le toit à l’époque était non seulement couvert de tôles, mais on y mettait également de la paille teintée. Une paille très rare et donc très chère. Quand la construction a été achevée, Miriam Makeba a, elle-même, meublé sa case et elle venait y séjourner regulièrement», a expliqué au micro de Guinéenews, Elhadj Ibrahima Bah, professeur d’histoire et natif de Dalaba.
Selon l’historien, c’est dans cette case que Miriam Makeba a eu les inspirations pour composer ses chansons les plus célèbres qu’elle a chantées en faveur de la République de Guinée, en général et de Dalaba, en particulier. D’ailleurs, nous confie-t-il, la grande terrasse servait de répétition pour son orchestre.
Malgré la broussaille qui a envahi aujourd’hui la cour de cette villa, on distingue quelques rares plantes et fleurs luxuriants. Elhadj Ibrahima Bah se souvient de ce jardin : «avec un domaine de près de deux hectares, elle a fait un jardin merveilleux avec des plantes et des fleurs qu’elle a fait venir de l’extérieur. Il y avait du jasmin, du canarda, du ravenala, du Diacaranda et plusieurs autres plantes exotiques qui embellissaient la cour de Makeba. C’était magnifique et les anciennes photos de cette case peuvent illustrer tout ce que je viens de dire », a expliqué ce fonctionnaire aujourd’hui à la retraite.
A l’en croire, Miriam Makeba était une grande admiration exceptionnelle pour Dalaba et ses fils. «Chaque année, elle envoyait des conteneurs d’habits qu’elle distribuait gratuitement à la population au point que tous les enfants nés à cette période, à la maternité recevaient des habits, des couvertures, du savon et beaucoup d’autres cadeaux», confie-t-il.
A l’intérieur de la case, se trouve encore quelques meubles et objets de la chanteuse qui sont transformés aujourd’hui en refuges pour des souris et rats.
Pour M. Bah, la dégradation de cette case est une véritable désolation pour les habitants de Dalaba. «Tout le monde regrette de voir ce chef-d’œuvre tomber en ruines. Le gardien qui prenait soin de la case a dû abandonner parce qu’il n’était plus payé. Il est là, il la regarde mourir sans pouvoir rien faire parce qu’il n’a pas les moyens de l’entretenir. Une maison ça s’entretient et l’entretien coûte cher. Nous lançons donc un appel à toutes les personnes de bonne volonté, à tous ceux qui ont les moyens de réhabiliter cette case », a-t-il lancé.
Il y a quelques années, le système des Nations Unies a voulu réhabiliter cette case pour en faire un musée ne serait-ce que pour les visiteurs. Malheureusement, ce projet n’a pas encore vu le jour. Il existait également à Dalaba un restaurant et un dancing qu’on appelait Miriam Makeba, mais qui ont été bâillés depuis belle lurette à un opérateur économique.