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Guinée : après la justice, la police, la gendarmerie, les impôts gangrénés par la corruption (rapport)

En juillet 2017, la République de Guinée a adopté une loi de lutte contre la corruption, un phénomène qui affecte négativement son développement socio-économique. Cet instrument juridique traduit la volonté des autorités guinéennes à se conformer aux textes juridiques internationaux comme la convention des Nations Unies contre la corruption, la convention de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption et le protocole de la Cedeao sur la lutte contre la corruption.

A ceux-ci, il faut ajouter l’arsenal juridique national constitué de la Constitution, de la loi portant sur le partenariat public-privé, du code général des impôts, du code des investissements, de la loi anti-blanchiment des capitaux et du code pénal.  Tous ces outils visent à offrir un environnement juridique sain et favorable à l’amélioration du climat des affaires en Guinée.

Malheureusement, tout cet arsenal juridique est confronté à la dure réalité guinéenne. La corruption a pris de l’ampleur ces dernières années (voir rapport Afrobaromètre) contrariant ainsi la volonté des autorités à mettre un terme au phénomène. D’ailleurs, conscient de l’ampleur de la corruption, le Premier ministre, Kassory Fofana, dans sa déclaration de politique générale devant l’assemblée nationale avait déclaré que la lutte contre la corruption figurait parmi ses priorités. Deux ans après, les Guinéens sont restés sur leur faim.

Au regard de la réalité, la lutte contre ce phénomène ne semble plus être la priorité des autorités guinéennes désormais préoccupées à autre chose. C’est le constat fait par l’ong panafricaine Afrobaromètre dans une étude publiée le 19 juin dernier. Sur un échantillon bien précis, l’on constate que la corruption a augmenté en Guinée passant ainsi de 38% en 2015 à 63% en 2019. Cette enquête pointe du doigt les juges et les magistrats, les impôts et la police.

Qu’est-ce qui a ralenti la volonté du Premier ministre dans son combat contre la corruption ?

Difficile de répondre avec exactitude à cette question d’autant plus que toutes nos tentatives d’avoir une réaction à la primature, au ministère du Budget ou à la direction nationale des impôts sont restés vaines.  L’action de la justice dans les cas des anciens directeurs de l’Office guinéen de la publicité, de l’Office guinéen des chargeurs et de la Loterie Nationale de Guinée est-elle la cause principale ? Paul Moussa Diawara, Sékou Camara, et Haidara Chérif accusés de détournements des dizaines de milliards de francs guinéens ont été poursuivis, certains condamnés mais restent aujourd’hui libres.

Ceux qui devaient servir d’exemple de lutte contre la corruption n’ont, en vérité, servi que des fusibles. Des actions concrètes n’ont pas pu être menées pour mettre un terme à cette pratique nuisible à l’économie et au développement. Le président Alpha Condé, mal conseillé par certains barons est mis à l’index dans l’arrêt de l’audit des établissements publics à caractère industriel et commercial (ÉPIC) et les établissements à caractère administratif (EPA), devenus un nid de détournements des deniers publics à des fins personnelles et de propagandes politiques.

Dans une enquête de l’ong mentionnée ci-haut pour jauger l’opinion des Guinéens sur leur perception de la corruption, il s’est révélé un résultat alarmant.  La plupart des personnes interrogées estiment que la corruption progresse dans le pays. Ils mettent en cause les juges, les magistrats, les services des impôts et la police.

Interrogé par Guineenews, le vérificateur général, Aliou Diallo se dit « être incapable de se prononcer » sur ce « fameux rapport ». « J’ai lu le fameux rapport. Les chiffres et le pourcentage qu’on voit dedans, nous n’avons pas tous les éléments d’informations pour nous prononcer là-dessus », dira-t-il avant de nous rediriger vers l’Agence nationale de lutte contre la corruption – ANLC.

Pourtant, dans une lettre adressée au vérificateur général de Guinée, en début d’année 2019, le premier ministre chef du gouvernement Kassory Fofana, avait salué les affronts des inspecteurs d’Etat. « (…) Ce sont les premières actions…qui ont abouti aux résultats pertinents ».

Il est important de préciser que cette Lettre adressée au vérificateur général fait suite aux enquêtes déjà menées au niveau de l’Officie Guinéen de Publicité (OGP), de l’Office Guinéen des Chargeurs et à la Loterie Nationale de Guinée (LONAGUI) respectivement dirigées (à l’époque des faits) par Paul Moussa Diawara, Sékou Camara et Haidara Chérif. Rien que ces trois établissements publics et parapublics, les montants injustifiés avoisinent les 100 milliards de francs guinéens.

A l’Agence nationale de lutte contre la corruption – ANLC, malgré une volonté affichée au début pour répondre à nos questions, nous avons été confrontés à des faux rendez-vous. Or, cette Agence qui est rattachée à la présidence de la république devrait être prompte à réagir sur des rapports qui concernent la lutte contre la corruption, estiment les observateurs. Mais la lourdeur hiérarchique nous a empêchés de prendre langue avec le secrétaire général adjoint de ladite Agence même si au début il s’est montré réceptif.

En Guinée, la corruption est fortement ancrée dans le système économique. Les pertes dues à la corruption sont estimées à environ 600 milliards de francs guinéens chaque année, selon les organismes spécialisés. En décembre dernier, à l’occasion de la journée internationale de la lutte contre la corruption,  Eloi Kouadio IV, Représentant Résident adjoint du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) disait que « la question de la corruption est essentiellement un problème de gouvernance. Un constat nous amène à dire que l’échec des institutions, c’est le manque des capacités à gérer la société aux moyens de système équilibré ou de contrepoids sociaux juridiques et économiques qui font que la corruption s’installe. »

Pour appuyer cette affirmation du diplomate onusien, le ministre des Investissements et des partenariats publics-privés, Gabriel Curtis, a rappelé que les rapports de 2011 et 2017 de l’Agence nationale de lutte contre la corruption (ANLC) sont accablants. Il dira aussi que : « En Guinée, la corruption est malheureusement encore persistante…»

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