Au mois de mai 2018, l’usine Rusal Friguia a été officiellement relancée par le président de la République Alpha Condé après ans d’arrêt pour cause de grève.
Ce redémarrage qui avait suscité de l’espoir chez tous les travailleurs, s’est transformé en cauchemar pour d’autres notamment ceux du service médical de la compagnie.
Pour la petite histoire, lorsque la grève a été déclenchée en 2012, le tribunal du travail avait prononcé une ordonnance demandant l’arrêt de la grève arguant qu’elle est illégale. Dans la même ordonnance, il était indiqué que le personnel soumis au service minimal devait continuer à travailler. Ce qui veut dire que sur le plan de la loi, ces travailleurs avaient l’obligation de travailler malgré la grève et c’est ce qui fut fait. Depuis le mois d’avril 2012, le personnel médical et les travailleurs de l’usine qui font partie du service minimal n’ont jamais arrêté de travailler. Pour eux, c’est comme s’il n’y a jamais eu de grève.
Aujourd’hui, sur la base de cette ordonnance du tribunal du travail, le personnel hospitalier de Péchiney de Fria qui n’a jamais cessé le travail, réclame à ce qu’il soit réhabilité dans ses droits. Ce, conformément aux accords signés. C’est du moins, une exigence formulée par ce chirurgien-dentiste dudit établissement sanitaire.
«Comme tous les travailleurs de l’usine, nous avions été soumis aux différents accords que le gouvernement a eu avec la société Rusal notamment par rapport au paiement des 1.050.000 Fg par mois qui devaient refléter l’indemnité de chômage technique même si sur le plan légal ce qui a été dit dans les accords n’a pas été respecté. Parce qu’il était dit qu’on devait payer 50% du salaire de base du personnel pendant cette période d’arrêt de l’usine», a confié Dr Bah Boubacar.
Avec la reprise, les travailleurs de l’hôpital Pechiney s’attendaient à bénéficier de leurs droits d’avant grève. Ils croyaient que les salaires allaient être payés comme ils les percevaient avant. Tel n’a pas été le cas et la situation devient de plus en plus inquiétante d’autant que le personnel médical ne peut être soumis à un service de sous-traitance comme c’est le cas à l’usine avec l’entreprise SEINTA Prestation.
«La situation actuelle nous préoccupe et ce n’est pas SEINTA Prestation qui nous intéresse. Parce qu’elle est une entreprise de sous-traitance. Alors que le statut du personnel médical ne peut pas rentrer dans la sous-traitance. On ne nous sous-traite pas, nous. Par contre, nous devons bénéficier de nos droits tels que définis dans le contrat qui nous lie à Rusal-Friguia. Normalement à partir de la reprise officielle de l’usine, nous devrions recommencer à percevoir notre salaire et nous sommes dans cette attente. Nous avons même entrepris des démarches pour au moins poser des questions aux autorités compétentes. Mais malheureusement pour le moment, nous n’avons pas d’interlocuteur», a expliqué Dr Bah.
D’ailleurs, SEINTA Prestation ne s’est jamais intéressée au personnel médical. Celui-ci, en revanche, dénonce l’incapacité de l’inspection générale du travail à gérer les problèmes des travailleurs.
«L’Inspection générale du travail ne fait pas son boulot. Parce qu’il était dit dans les accords entre Rusal et le gouvernement que tout ce qui est affaire sociale, devrait rentrer dans l’ordre à partir d’avril 2018. Nous sommes au mois de septembre, on ne parle toujours pas de salaire des gens. Pire, c’est qu’il n’y a aucune information se rapportant à cette question. On se demande quand est-ce qu’on va commencer à nous payer parce que nous continuons à travailler», s’inquiète le chirurgien-dentiste.
Lors du dernier séjour du chef de l’Etat à Fria, il avait indiqué que les problèmes doivent être remontés aux autorités locales avant d’atteindre les partenaires Russes. Ces travailleurs se sont inscrits dans cette logique pour avoir des réponses à leurs inquiétudes. Pour l’heure, seul l’Imam central a été rencontré. Ce dernier leur promet un rendez-vous avec madame le Préfet les jours à venir. Si ces démarches n’aboutissent pas, les travailleurs menacent de recourir à toutes les voies légales pour être réhabilités dans leurs droits.
«Dans ce pays, nous avons des lois que nous connaissons très bien et qui prévoient toutes ces situations auxquelles nous sommes aujourd’hui confrontés. Si les démarches informelles n’aboutissent pas, nous allons passer par la voie légale pour rentrer dans nos droits. Nous avons le droit d’interpeller l’inspection du travail que nous n’avons pour le moment pas interpellé en attendant de rencontrer le préfet. Nous avons toujours prôné la discipline et la patience pour éviter ce qu’on a vécu ici en passant par la voie pacifique. Ce que nous exigeons, c’est d’avoir des réponses. Parce qu’aujourd’hui, il y a un flou total… Ce n’est pas légal de faire travailler quelqu’un pendant 30 jours et ne pas le payer à la fin du mois. Notre patron doit au moins nous donner des informations sur le programme de paiement de nos salaires. Nous souhaitons aussi la manifestation de l’autorité de l’Etat. Parce que nous sentons son absence totale dans cette affaire», a-t-il fustigé le médecin.
Cette situation de deux poids deux mesures à laquelle font face plus de soixante agents, est déplorée et dénoncée par une frange importante de la population à Fria. Pour bon nombre parmi elle, il est incompréhensible que, pendant que les travailleurs de l’usine perçoivent à la fois leurs assistance et salaire, le personnel médical lui, ne perçoive que l’assistance qui s’élève à seulement à 1.050.000 par agent.
Dans un souci de regroupement, Guinéenews a tenté de joindre, sans succès, le Responsable de SEINTA Prestation, Sylla Kégny pour avoir ses réactions.