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Extraction du sable à Lélouma : ce métier à haut risque pratiqué par des femmes

« Il n’y a pas de sots métiers », dit-on souvent. Ces femmes qui gagnent leur vie dans l’extraction et la vente du sable dans cette carrière située dans la commune rurale de Balaya à environ quatre kilomètres du centre-ville de la sous-préfecture ont fait siens de cet adage. L’équipe est composée de près d’une dizaine de mères de famille et seulement de deux hommes. Ces femmes, bravent tous les risques liés à ce travail surtout lorsqu’on sait que cette activité est généralement pratiquée par les hommes pour pouvoir faire vivre leurs familles.

Pour savoir un peu plus sur les conditions de travail de ces amazones et les motivations qui les animent, la rédaction locale de Guinéenews© a fait un tour dans cette carrière de sable.

A travers une route parsemée de blocs de pierres qui serpente les collines, c’est une énorme carrière avec de grosses pierres blanches et de gigantesques trous par lesquels le sable destiné à la construction des bâtiments est acheminé vers l’extérieur où un nombre important de femmes à la tâche avec des pioches, pèles et des brouettes qui nous accueille sous une chaleur étouffante.

Madame Mariam Ciré est l’une des doyennes dans cette carrière de sable de Legècy où elle travaille depuis plus de dix ans. Elle revient ici sur ses motivations. « J’évolue dans cette carrière depuis plus de dix ans. Ce n’est pas du tout un travail facile surtout lorsqu’on est une femme. Mais nous n’avons pas de choix. Pour subvenir à nos besoins et soutenir nos familles, il faut des moyens. C’est pourquoi, j’ai choisi de venir faire cette activité pour nourrir ma famille et utiliser le peu d’argent que je gagne pour d’autres affaires. Les femmes sont nombreuses ici. Il n’y a que deux hommes qui travaillent avec nous ici. Beaucoup d’autres femmes aussi sont parties. D’autres aussi viennent, font un peu de temps et repartent. Depuis qu’on a commencé à nous réclamer de l’argent ici pour ce travail, certaines de nos collègues aussi sont parties. Mais nous comme on gagne un peu bien qu’on paye la commune et le propriétaire du domaine, on s’accroche », a-t-elle relaté.

Avec des moyens très rudimentaires, ces femmes ne désarment pas même en cette période de jeûne. Avec des pioches, ces femmes à l’assaut de ces dures roches sableuses travaillent sous des tunnels où à ciel ouvert au péril même de leur vie. « Pour un premier temps, nous sommes obligées de creuser en faisant des tunnels. Après, on remonte à la surface et on s’arrange avec beaucoup de précaution pour faire affaisser  les chapeaux et ainsi éviter les longs tunnels qui sont risqués. Mais c’est très difficile, ce travail et les roches sont durs. Nous n’avons que des pioches et quelques autres outils rudimentaires pour le faire. Pour avoir un chargement de sable, il nous faut plusieurs jours de travail. Parfois jusqu’à une semaine selon son courage », explique une autre femme.

Le prix du chargement d’un camion benne tourne autour de deux cent mille francs ici à Legècy. Il faut négocier avec le propriétaire du domaine aussi en plus de la taxe d’exploitation qui serait d’un million de nos francs pour l’année. Malgré cela, ces femmes continuent à faire fonctionner la carrière. « Nous payons environ un million par an à la commune pour qu’on puisse effectuer notre travail. Il faut aussi trouver quelque chose pour le propriétaire du terrain. Mais comme avec lui, c’est la famille, il n’impose pas de prix. Nous trouvons quand même quelque chose pour lui. Il me faut personnellement cinq à sept jours pour avoir un chargement de sable qui coûte deux cent mille francs », rajoute Madame Mariama Ciré.

Dans la carrière, les camions ne sont pas trop rares. Nombreux sont les chauffeurs qui s’y approvisionnent en sable. « Pratiquement, c’est la seule carrière où la qualité du sable est vraiment très appréciable. En plus, ce sont des femmes qui travaillent ici. Je suis impressionné par leurs dévouement. Sinon d’habitude, ce sont les hommes qui font ce travail. Mais ici, c’est tout le contraire. Parfois, même pour charger mon camion, ce sont elles qui s’en occupent. Ces femmes vivent vraiment de leur propre sueur. Et il n’est pas donné à toute une femme de réussir là où ces braves mamans gagnent leur vie », s’étonne un maître chauffeur rencontré sur les lieux.

Sans aucune mesure de sécurité, elles sont exposées à d’énormes risques. Victime d’un accident, Alarba Diallo explique les circonstances de cette tragédie qui a failli lui coûter la vie. « C’est une grosse pierre qui était tombé sur moi ce jour là. J’ai travaillé toute la matinée. C’est aux environs de quatorze heures que la pierre est tombée sur moi. J’avais cru que j’allais mourir. Mais heureusement, avec les efforts de mes collègues, elles ont réussi à m’extraire après plusieurs heures de tentatives. J’ai été admise à l’hôpital préfectoral où j’ai passé plus de deux mois. Dieu merci, aujourd’hui, je suis en train de reprendre mes forces. J’ai repris le travail il y a quelques jours. Ce travail n’est pas fait pour une femme mais personnellement, je n’ai pas d’autres choix », a regretté Alarba Diallo.

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