Dans son discours de prise de fonction, le Premier ministre Kassory Fofana s’était engagé de lutter contre la mauvaise gouvernance, la corruption endémique et le détournement oisif des deniers publics. C’est dans ce cadre, selon plusieurs sources officielles que l’ancien argentier du pays a commis l’inspection général d’Etat (IGE) de verifier la gestion des entreprises publiques à caractère administratif (EPA) et des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC). Sur la dizaine d’entreprises publiques, l’IGE n’a bouclé cette directive du gouvernement que dans 12 entreprises publiques. Il est de notorieté que votre quotidien électronique Guinéenews© avait fait plusieurs révélations sur la corruption contagieuse de grande envergure de l’administration guinéenne, des entreprises publiques et para-publiques de l’Etat.
L’information sur l’interpellation de Lansana Chérif Haidara, un proche du chef de l’Etat, patron de la loterie nationale de Guinée (LONAGUI) ce jeudi 17 janvier 2019 par l’agent judiciaire de l’Etat est tombée comme un couperet tant l’individu s’était distingué comme le plus vertueux des directeurs généraux (DG) importés par le regime de changement. Quelqu’un qui se donnait l’image d’un monsieur propre, transparent et qui se disait parangon de la lutte contre la fraude et la concussion dans les jeux de loterie en Guinée est tombé dans les fillets de l’IGE ! Le commun des mortels en Guinée se rappelle encore de ses tonitruantes sorties dans les médias avec fracas et bruits de casseroles.
Quels sont les faits qui conduisent Lansana Chérif Haidara à l’agence judiciaire de l’Etat, ce 17 janvier à 12 h ?
L’agent judicaire de l’Etat par convocation datée du 14/01/2018 invite le sieur Haidara Cherif à se présenter devant la commission de recouvrement dirigé par M. Alya Sylla pour être entendu sur le rapport de l’inspection générale d’Etat, suite à une vérification administrative et financière de la LONAGUI. Nous n’avons aucune confirmation s’il s’est rendu à l’agence judiciaire de l’Etat ou pas !
Que dit le rapport que Guinéenews© a consulté ?
L’inspection générale d’Etat, dans sa lettre adressée au président de la République sous le numéro 136/PRG/CAB/IGE/2018 informe que par ordre de mission N-028/PRG/CAB/IGE2018, une mission de l’IGE a été mandatée pour procéder à une vérification administrative et financière de la loterie nationale de Guinée (LONAGUI). Après une prise de contact avec le DG Haidara et certains membres de son équipe, la mission a procédé à l’examen des recettes, des dépenses de fonctionnement de la direction et du conseil d’administration (CA), d’une part ; et des relations entre la LONAGUI et les sociétés de jeux, d’autre part. La mission a révélé sur la gestion du conseil d’administration de la LONAGUI et de Lansana Cherif Haidara de graves manquements et detournements. Parmi les plus saillants, il est reproché au Conseil d’Administration son incompétence dans l’administration de la LONAGUI, notamment son président qui assume une double fonction non compatible et en flagrante opposition avec l’article 31 de la Loi 056 portant gouvernance des entreprises publiques du 8 décembre 2017. Celle-ci qui stipule que « les représentants des tutelles ne peuvent en aucun cas être élus dans les fonctions du président ou de vice-président du conseil d’administration ».
Le rapport signale des incongruités, notamment l’absence notoire des administrateurs à des réunions du CA qui d’ailleurs ne sont jamais sanctionnées par des procès-verbaux signés. Le DG ne s’entend pas avec le président du CA d’où le refus d’approbation des procès-verbaux, ce qui va sans dire que les deux ne s’entendent probablement pas sur le partage du « butin », dit-on dans la haute sphère étatique !
Le même rapport reproche à Lansana Chérif Haidara, de notoires irrégularités, des dépenses non soutenues par des pièces justificatives sur un montant total de vingt cinq milliards cinq cent quatre vingt millions neuf cent mille et cinq cent soixante quatorze francs guinéens (25 589 900 574 GNF) de dépenses pour la période allant du 1er janvier 2016 au 31 juillet 2018 ; et un montant de onze milliards cinq cent quarante huit millions neuf cent quatre vingt douze mille et cent quarante six francs guinéens (11 548 992 146 GNF) représentant un manque à gagner dans les comptes de la LONAGUI. Ce qui est incompréhensible et inquiétant pour le contribuable guinéen, c’est que le rapport de l’IGE dénonce que « la mission a relevé les limites d’une gestion managériale qui n’a pas facilité la mise en place des outils modernes de gestion. Cette situation a contribué à des dysfonctionnements majeurs qui ont malheureusement impacté le rendement de l’entreprise ».
La dualité !
Le contenu du même rapport indique que « la mission note une méconnaissance des procédures d’exécution des dépenses et des recettes de la part du directeur général et de ses collaborateurs ».
Dès lors, la question que les observateurs sont en droit de se poser est de savoir s’il y a un cadre compétent au sein de la société nationale de loterie de Guinée pour mieux contrôler le secteur des jeux de hasard qui génère des milliards de nos francs pour renflouer les caisses de l’Etat ?
En marge de ces graves détournements des fonds publics, le même rapport met-il en exergue l’incompétence notoire du DG et du président du CA de la LONAGUI à gérer un domaine aussi complexe que les jeux de loterie où la fraude est souvent stigmatisée par les parieurs ce qui réduit considérablement les recettes de l’Etat ?
En tout etat de cause, à la Primature, le cabinet du premier ministre annonce des surprises sur « des messieurs propres ».
« Nous apprécions le soutien indéfectible du président de la république dans le cadre de l’amélioration de la gouvernance au sein des entreprises publiques à caractère industriel et commercial », affirme un conseiller du premier ministre qui a requis l’anonymat.