Natif et résidant à Madina Douka dans la sous-préfecture de Diari à l’ouest de Labé, Mamadou Billo Diallo, la quarantaine s’est nettement démarqué dans le secteur de l’élevage au Foutah Djallon. Avec une expérience de près de 10 ans dans le secteur, le jeune entrepreneur dispose de nos jours de près de 600 têtes (bovins et ovins).
Pour diversifier son troupeau, Mamadou Billo Diallo importe du bétail dans la sous-région afin d’initier des métissages qui semblent donner les résultats escomptés. C’est eu égard à tout ce qui précède, que la rédaction locale de Guineenews basée à Labé est allée à sa rencontre. Ainsi, avec lui, nous avons évoqué plusieurs détails liés à son activité dans cette interview exclusive. Lisez !
Guineenews© : depuis quand et comment vous êtes-vous lancé dans l’élevage ?
Mamadou Billo Diallo : Je me suis lancé depuis 2003 alors que je venais de la Gambie ou j’avais acheté une voiture 505 pour le transport en commun. Donc, j’ai mis mes sorties à profit pour acheter du bétail petit à petit. Donc, j’ai procédé ainsi et mon troupeau ne faisait que grossir. A un certain moment, mon papa était malade et fatigué, donc je ne pouvais plus le laisser. C’est ainsi que j’ai revendu le véhicule pour m’occuper exclusivement de l’élevage ici à côté des parents. A chaque fois que je suppose avoir une quantité importante, je vends une partie pour mieux entretenir l’autre.
Guineenews© : à combien pouvez-vous estimer votre cheptel et comment vous le gérer ?
Mamadou Billo Diallo : J’ai commencé l’élevage petit à petit tout en commercialisant le bétail à chaque fois que j’en avait une quantité. Donc, à ce jour, j’ai un grand nombre car ça peut aller au-delà de 500 têtes pour les petits ruminants et une centaine pour les bovins. Et beaucoup de mes bêtes sont confiées dans des endroits différents au sein des troupeaux d’amis éleveurs car à un certain niveau, il faut partager et le travail et les bénéfices avec les acteurs du secteur. On peut confier, comme on peut prêter.
Guineenews© : Pour l’alimentation des animaux, comment faites- vous ?
Mamadou Billo Diallo : le plus souvent, on draine nos troupeaux au niveau des champs juste après les récoltes. A cette période, on érige des campements dans les champs car en cette période, il y a suffisamment de nourriture et les bêtes ne vont pas faire de dégâts dans les concessions.
Maintenant quand la période culturale s’annonce, on vient en pleine brousse comme c’est le cas en cette période et on les alimente régulièrement. Donc, on érige des campements à ces endroits et on s’occupe de l’entretien en les trouvant à boire et à manger suffisamment.
Guineenews© : pourquoi ériger ces campements en pleine brousse ?
Mamadou Billo Diallo : vous savez, les animaux ont beaucoup de maladies alors que les médicaments se font de plus en plus rare. Cela est l’une de nos principales difficultés. Personnellement j’aime bien cette activité, mais s’il n’y a pas avec quoi entretenir, la situation devient un sérieux problème. Donc, je suis venu en brousse parce que les gens viennent rarement à ces endroits et les animaux aussi quittent rarement par là pour le village. Et j’ai plusieurs campements du genre mais toujours en pleine brousse.
Par exemple, dès qu’il commence à pleuvoir, ils (les animaux) rentrent tous ici pour s’abriter. Et comme j’avais désormais beaucoup de bétails, j’étais obligé de délocaliser mon troupeau du village vers la brousse. A ce jour, c’est seulement une petite partie du troupeau qui est dans le village. Le reste est en pleine brousse car ils ne peuvent plus vivre dans le village.
Guineenews© : craigne-vous des attaques dans ces campements en brousse ?
Mamadou Billo Diallo : Évidement. Des serpents boas venaient souvent s’attaquer au bétail. Mais à ce jour, je pense avoir tué tous les serpents boa de la zone, en tout cas, j’ai réussi à éliminer tous les serpents qui ont fait surface. J’ai tué trois serpents boa à ce niveau et c’est très souvent en période hivernale que ça intervient. A vrai dire, les animaux sauvages nous fatiguent beaucoup ici
Guineenews© : le vol de bétail est monnaie courante au Fouta. Ëtes-vous parfois victime ?
Mamadou Billo Diallo : pour ce qui est du vol de bétails, pour ne pas accuser ,on est jusque-là épargné. C’est vrai que des bêtes disparaissent souvent mais c’est très souvent les serpents Boa et autres qui sont à l’origine. Pratiquement, il n’y a pas de vol de bétail chez nous ici.
Guineenews© : comment faites-vous pour la prise en charge médicale ?
Mamadou Billo Diallo : pour ce qui est des bovins, il y a le vétérinaire de la sous-préfecture Touladjo Diallo qui nous accompagne beaucoup. A chaque fois qu’on a besoin de lui, il se présente aussitôt et exécute le travail. Depuis qu’il a compris que j’aime l’élevage, il ne ménage aucun effort pour apporter son expertise.
Guineenews© : on a également entendu que vous importez du bétail dans la sous-région pour tenter un métissage ?
Mamadou Billo Diallo : je le fais. Il y a beaucoup de métissage dans mon troupeau. Par exemple, le bouc que vous voyez là-bas vient du Burkina Fasso, l’autre là vient du Mali Bamako comme la plupart des moutons que vous voyez ici. La fois dernière, j’ai voulu importer des moutons du Sénégal mais on m’a bloqué à la frontière précisément à Sambaillo. Les bêtes sont retournées jusqu’à Dakar alors que leur alimentation était déjà arrivée à Labé. Mais l’Etat n’a pas permis l’entrée des bêtes sur le territoire guinéen.
Guineenews© : et qu’est–ce que l’Etat fait à travers le département de l’élevage pour vous accompagner ?
Mamadou Billo Diallo : jusque-là, je n’ai bénéficié de rien de la part de l’Etat. L’autrefois, j’avais entendu parler de chèvres Rousses de Maradi en provenance du Niger mais nous, on a rien eu. Personnellement, je négocie à mon niveau avec les éleveurs des autres pays pour avoir des bêtes à mélanger avec la race locale. Sauf que dernièrement, je n’importe pas et pratiquement tout ce que vous voyez là, ce sont des produits de l’élevage local.
Guineenews© : concrètement, quel intérêt tirez-vous de cette pratique ?
Mamadou Billo Diallo : je ne peux pas compter les avantages que j’ai tirés de l’élevage. Si les jeunes acceptaient, on allait tous se consacrer à cela parce que c’est vrai je me suis marié avant de me lancer dans l’élevage. Depuis j’ai réalisé plusieurs maisons grâce à cette activité. En plus, j’ai acheté deux véhicules 4/4 grâce à l’élevage. Et après chaque fête de tabaski je peux me permettre beaucoup de choses car, à ce jour, j’ai beaucoup de maisons en Guinée. Que ça soit à Labé, Popodara, aux environs de Conakry et sans compter dans le village ici. Toutes ces bêtes sont destinées à la vente. Je peux vendre jusqu’à plus de 200 têtes de chèvres lors de la fête de tabaski et autant avec les moutons. Beaucoup de localités environnantes s’approvisionnent ici. C’est un peu comme Koula, Korbé, Diari, Lélouma, Satina, etc. Et tous ceux-ci achètent avec moi depuis un peu plus de 10 ans. Parfois même, ce sont des personnes qui m’appellent de l’étranger pour réserver.
Guineenews© : certainement, la gestion demande une forte main-d’œuvre. Avec qui collaborez-vous ?
Mamadou Billo Diallo : j’ai des employés et en plus, j’ai plusieurs talibés qui m’accompagnent dans cette aventure.
Guineenews© : et c’est quoi enfin les difficultés du secteur ?
Mamadou Billo Diallo : ce sont les vas et vient entre ici et le village. Vous avez vu l’état de la route qui est impraticable. Donc, pratiquement pas de repos. Il y a aussi le manque de médicaments adaptés et la cherté des produits alimentaires. C’est l’essentiel des difficultés.
Guineenews© : peut-être un appel aux éleveurs ?
Mamadou Billo Diallo : je leur demande de camper en brousse car c’est à ces endroits que les bêtes peuvent bien s’alimenter et se développer rapidement.
Des propos recueillis par Alaidhy Sow, de retour de Douka pour Guinéenews.org