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Dossier-Retrait des agréments de la Mutragui et de la Sonag : colère et désarroi chez leurs assurés

Combien sont-ils, les assurés de la MUTRAGUI et de la SONAG ? Mille, cinq mille, cent mille… ? Ces milliers d’assurés que comptent ces deux compagnies d’assurances ne savent plus à quel saint se vouer face aux nombreux cas d’accidents de circulation, d’incendies, d’inondations, aux nombreux contrôles policiers depuis le retrait des agréments de ces deux assureurs. Ces propriétaires de véhicules, de camions, de maisons d’habitation et de commerce. Ces clients qui jouissaient de l’assurance de la MUTRAGUI et de la SONAG seraient en colère depuis quelques jours. Ils se disent victimes collatérales de la décision de la BCRG.

B.I, transporteur propriétaire de quinze camions (gros porteurs) au port autonome de Conakry, se trouve dans une situation préoccupante. Cinq de ses camions transportant du riz ont eu des accidents avec des véhicules particuliers, sur le tronçon Yimbaya-Kissosso en mai dernier. Après le constat de la police routière, il est question de réparer les véhicules accidentés. La MUTRAGUI où il avait assuré ces camions, n’étant plus en activité. Il a dû débourser de l’argent de sa poche pour remettre les voitures endommagées en état. Mais pour combien de temps pourra-t-il faire face à ces cas d’accidents à ses propres frais ? « Je n’ai pas fini de payer les frais de réparation des trois premiers véhicules déposés au garage, on m’apprend d’autres accidents au niveau de mon parc auto. C’est compliqué », lâche le transporteur sur un ton de désespoir.

Un autre transporteur, membre du syndicat des transporteurs, relate également ses difficultés. La semaine dernière, son camion transportant du ciment sur un chantier à Bentouraya a renversé un candidat au baccalauréat. Il a dû prendre en charge les frais médicaux de la victime, car la SONAG, l’assureur de son camion, a été fermée.

« Mon camion a heurté un élève samedi dernier à Bentouraya. Heureusement, le pire a été évité. Mais depuis, les factures de la clinique pleuvent sur moi. Je ne sais pas comment faire pour payer mes chauffeurs à la fin du mois. Depuis la décision de la BCRG de retirer les agréments de cette compagnie d’assurance, nous vivons une catastrophe pour tous les assurés de cette entreprise », déplore-t-il.

TB., commerçant au marché d’Enta, exprime également sa frustration : « Je ne sais pas où mettre la tête. Mon magasin a pris feu et j’ai tout perdu. Habituellement, c’est l’assurance qui gère ces dégâts. Mais je viens d’apprendre que la maison d’assurance à laquelle je suis affilié ne fonctionne plus. Le gouvernement a ordonné la fermeture des bureaux. C’est ce qu’on m’a dit. Je ne le savais pas. Mais pourquoi cette décision, sans penser aux assurés que nous sommes ? Il faut faire quelque chose pour nous. Je vis de ce magasin… C’est toute ma vie qui est partie en fumée », se lamente-t-il.

Aujourd’hui, la colère gronde parmi les clients des deux compagnies d’assurance. Ils estiment qu’ils sont abandonnés dans la prise de décision de la BCRG.

Rappelons que le 30 avril dernier, la Banque Centrale de la République de Guinée a ordonné à la Mutuelle des Travailleurs de Guinée et à la Société Nouvelle d’Assurances de Guinée de cesser toute activité d’assurance sur le territoire national. La décision de retirer avec effet immédiat les agréments des deux compagnies d’assurance a été prise par le Comité des Agréments de la BCRG. Cette décision fait suite à des constats sur les violations graves et répétées de la réglementation des assurances, des dysfonctionnements sérieux liés notamment à l’incapacité des actionnaires à suivre le processus de relèvement du capital social minimum, à l’absence de programmes de réassurance et d’outils de production appropriés, à l’inexistence de politiques et procédures encadrant les activités, selon les informations de la BCRG.

À ces manquements, indique le communiqué, s’ajoute une faiblesse de la gouvernance d’entreprise et un manque de dispositif de contrôle interne. De plus, les inspecteurs de la Banque centrale ont mis à jour d’autres pratiques de concurrence déloyale, telles que la sous-tarification. Ils ont également constaté l’abus d’assurance à crédit et de nombreux cas de non-règlement des sinistres. Tous ces manquements ont entraîné des plaintes récurrentes et des distorsions à la concurrence au sein du marché, déplore la BCRG dans son communiqué, soulignant que cette situation risque de ternir l’image et la réputation du marché guinéen des assurances.

Face à la détérioration des critères, les dirigeants et les actionnaires ont été dans l’incapacité de mettre en place un plan de redressement. Selon nos informations, un liquidateur devrait être nommé dans les prochains jours pour évaluer les actifs et régler les passifs, conformément aux dispositions du Code des assurances et de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur les sociétés commerciales et GIE. Nous avons tenté de contacter les dirigeants des deux sociétés, en vain.

Il convient également de signaler que cette décision de retrait d’agrément n’est pas un cas isolé. En juin 2022, la BCRG avait suspendu six courtiers d’assurance et retiré l’agrément de dix autres d’entre eux.

Aux dernières nouvelles, les responsables de ces compagnies d’assurance sollicitent un canal de négociation avec la Banque Centrale. Depuis le retrait de leurs agréments par la BCRG, les responsables des deux entités d’assurances, présentes en Guinée depuis 30 ans, la Société Nationale d’Assurances de Guinée (SONAG) et la MUTRAGUI, ne sont pas restés les bras croisés. Ils demandent un dialogue avec le gouvernement pour trouver une solution à cette situation et soutenir les compagnies nationales, notamment les deux entités concernées.

Lors d’une conférence de presse, Habib Hann de la SONAG et Morlaye Yansané de la MUTRAGUI ont lancé un appel, non seulement à leurs clients, mais également aux autorités, pour obtenir l’autorisation de poursuivre leurs activités. Selon eux, ces deux compagnies sont des références nationales depuis des années.

« Nous demandons un dialogue avec le gouvernement pour trouver une solution à cette situation et soutenir les compagnies nationales, en particulier les deux entités concernées, afin de les aider à se hisser parmi les meilleures compagnies d’assurance du pays. Nous sommes prêts à collaborer avec la Banque centrale, à respecter ses recommandations et à corriger les éventuelles erreurs constatées. C’est un appel, non seulement de nos clients, mais aussi des autorités qui nous dirigent, pour obtenir l’autorisation de continuer nos activités en tant que compagnies d’assurance nationales de référence depuis des années et en partenariat technique pour renforcer nos compétences », a déclaré Habib Hann.

Toujours selon Habib Hann, ils sont pleinement responsables, non seulement vis-à-vis des victimes, c’est-à-dire des assurés ayant des contrats en cours. Les deux dirigeants ont promis de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la tranquillité.

À la Banque centrale de la République de Guinée, on soutient que le retrait des agréments de la MUTRAGUI et de la SONAG vise à assainir le secteur guinéen des assurances et s’inscrit parfaitement dans l’élan de refondation entamé depuis le 5 septembre dans notre pays. Elle invite donc les détenteurs de contrats d’assurance des sociétés concernées ainsi que les autres créanciers à garder leur calme et leur sérénité.

« Un liquidateur sera nommé dans un avenir proche pour chacune des sociétés afin d’évaluer les actifs et de régler les passifs, conformément aux dispositions du Code des assurances et de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur les sociétés commerciales et GIE. »

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