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Dossier – Espaces verts à Conakry : le cadet des soucis des pouvoirs publics

La dégradation des espaces verts à Conakry est très préoccupante. Ces espaces verts qui, autrefois faisaient la fierté, à travers la multitude de jardins bien entretenus sont fortement détruits aujourd’hui. Les facteurs explicatifs de cette situation découlent d’un contexte réglementaire flou qui ne parvient pas à situer les gestionnaires que sont les mairies et le Gouvernorat sur un accord, tant au niveau des attributions que des actions à mener sur le terrain. Dans cet environnement de balbutiements de ces structures, les espaces se trouvent confrontés à l’exploitation par les populations pour leurs besoins (commerces, marginalités, décharges, etc.). En outre, pour la gestion de ces espaces verts, les ressources allouées sont jugées insuffisantes à travers le budget, le personnel sous qualifié et l’absence de synergie entre les gestionnaires. Toutes ces raisons susmentionnées sont de nature à réduire les offres des aménités pour les populations de la capitale face à la détérioration que connaissent ces espaces verts.

Espaces verts confrontés aux besoins des populations

 Dans l’usage des espaces verts de Conakry, on recense une diversité d’occupants de ces lieux publics. Il s’agit de constructions de magasins, de commerces informels, d’installation de garages d’automobiles au détriment des aménités que produisent les espaces verts. Ces espaces verts constituent également de repères d’habitation de marginaux (personnes souffrant de problèmes mentaux dits « fous », d’enfants de la rue, toxicomanes et autres délinquants, etc.). Ces espaces sont utilisés comme des prolongements soit, des cours familiales, soit des magasins pour les activités commerciales en ce sens qu’ils servent de lieux de séchage de pagnes artisanaux «indigo» ou autres activités ménagères. Tous les jardins publics sont aujourd’hui occupés. De la commune de Kaloum au quartier Kagbeleen en passant par Dixinn, Matam, Ratoma et Matoto, c’est de l’anarchie.

Selon les gestionnaires et des riverains, les occupations spontanées au sein des espaces verts ont fortement participé à leur dégradation. D’abord, cette situation émane du monde commercial de plus en plus en quête de terre disponible pour exercer ses activités commerciales, du coup les espaces verts représentent pour eux les seuls espaces non encore construits, d’où l’occupation anarchique de ces lieux publics. Ensuite, ces implantations illégales spontanées s’expliquent par la baisse de la vigilance du dispositif de surveillance de ces espaces verts qui serait liée aux contraintes financières au niveau du gouvernorat. En effet, il ressort que des éleveurs y introduisent des animaux domestiques (comme des moutons, des bœufs, des chèvres etc.), les femmes en font leurs lieux de séchage et de fumage de poisson sans être inquiétées. Pour les responsables du Gouvernorat et ceux des Mairies de la capitale « la population n’adopte pas un comportement d’écocitoyenneté, ce qui explique l’état de dégradation avancée des jardins publics des communes de Conakry ».

En effet, le mobilier urbain (bancs, éclairage public, le système d’irrigation des plantes) est objet de vandalisme, ce qui emmène bien souvent les autorités en charge de la gestion de ces équipements à retirer le reste du matériel en bon état avant que celui-ci ne soit dérobé à son tour.

Certains espaces sont occupés par des garagistes. Selon un chef garagistes à la Casse de Madina, « si les espaces verts ne sont pas suffisamment entretenus ni protégés, c’est la faute au gouvernorat de Conakry, car ces derniers abandonnent souvent ces lieux qui deviennent  des dépôts d’ordures ménagères. Nous n’avions pas trouvé ici un espace vert, mais plutôt un dépotoir d’ordures. Et c’est la commune qui nous a installé ici ».

 Les espaces verts sont des lieux de dépôt des déchets de toutes natures (bouteilles en plastique, sachets, des mégots de cigarette, des gravats de construction, etc.). Ainsi, les résultats ont montré que la ville de Conakry se développe en mettant en arrière-plan la question de préservation ou de restauration du patrimoine naturel. Avant tout, ce développement pose le problème de la préservation de la biodiversité urbaine. Ces résultats mentionnent également que diverses contraintes liées au développement socioéconomique sont à l’origine des pressions anthropiques.

Ces préoccupations urbanistiques, sont nées de la nécessité de la survie des groupes économiques les plus vulnérables dont les activités informelles constituaient l’essentiel de leurs revenus. L’abandon de l’espace public a permis son occupation de manière spontanée par l’habitat précaire puis par de petites activités commerciales et artisanales tolérées par les autorités. Ainsi, les rues, les jardins et les espaces verts qui devraient être quotidiennement entretenus ne le sont pas.

Insuffisances de ressources humaines et matérielles

D’après les investigations menées au niveau du ministère de l’Environnement et de celui de la Ville y compris le Gouvernorat et les mairies, il ressort de nombreuses difficultés enregistrées dans la gestion des espaces verts découlent d’insuffisances matérielles, humaines et budgétaires, et une absence de coordination entre les structures opérantes. Pour des raisons techniques (l’état vétuste des machines), l’équipe Parcs et Jardins n’assume souvent pas convenablement l’entretien de ces espaces. Toute situation qui doit interpeler  les Services  concernés pour assurer l’entretien.

Des agents du Service Hygiène et Environnement interrogés jugent unanimement le matériel insuffisant pour assurer pleinement leur mission. Selon le chef de ce service qui a voulu garder l’anonymat, son équipe ne disposerait pas de véhicule pour conduire les opérations d’aménagement et de protection des espaces verts dans les quartiers dont il a la charge, sans oublier l’insuffisance de matériel informatique (ordinateur, imprimante, scanneur etc.)

En somme, le manque ou l’insuffisance d’équipement d’entretien rend difficile le travail des agents. En effet, ceux-ci ne peuvent pas effectuer des travaux d’aménagement régulièrement dans les espaces verts gérés.

Personnel sous-qualifié et sans réel budget

 Le Service d’Hygiène et Environnement selon ses responsables, ne dispose pas de moyens financiers suffisants pour louer les services d’un géomètre, afin de connaître une fois pour de bon les dimensions réelles de nos espaces verts. La situation budgétaire ne semble pas non plus reluisante à travers la longue procédure administrative. Le budget est présenté au ministère de l’Administration du Territoire en accord avec le ministère de l’Economie et des Finances et est payé par le Trésorier Payeur qui décaisse selon l’ordre de priorité et d’urgence. Et, à ce niveau, pour le responsable des Etudes et de la Planification: « Il y a des priorités dans les communes, malheureusement les espaces verts n’en font pas partie ».

En outre, cette longue disposition procédurale liée au budget entraîne des retards et des « pertes » d’argent. En conséquence, les moyens alloués au service connaissent une réduction qui conduit par ricochet à une baisse importante de ses activités. En somme, les espaces verts ne bénéficient pas de moyens financiers conséquents : les gestionnaires jugent les financements insuffisants pour assurer pleinement leurs missions. Selon eux, les difficultés financières que rencontre leur unité, sont à la base de la non mise en œuvre, de plusieurs plans d’aménagement, de programmes d’entretien des surfaces dégradées, vu que ceux-ci sont techniquement et matériellement très onéreux.

« L’absence de financement limite de ce fait l’équipement du service, au niveau du recrutement en personnel ou de contractuel, en engins motorisésle ravitaillement en carburant des engins », selon un agent rencontré au Gouvernorat. Or tout ceci est capital pour lutter contre la dégradation des espaces verts par la population, et faire des interpellations en vue de la protection efficiente des espaces verts de la ville de Conakry.

Une enquête de Louis Célestin

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