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Deuil en la mémoire des victimes d’accident : que vaut une telle célébration ?

En la matière, chez nous, il y a lieu de reconnaître qu’il reste encore beaucoup à faire. Le fossé à combler est toujours grand. Et c’est peut-être là qu’il y a le problème ou… l’explication. Selon l’approche qu’on en fait.

Toujours est-il que nous ne célébrons pas assez nos morts, surtout ceux qui nous quittent, par suite d’accident de la circulation. Pourtant, ils méritent bien qu’on les célèbre et qu’on honore leur mémoire.

C’est à se demander pourquoi ce silence, pour ne pas dire cet oubli. Serait-ce par atavisme, ou par crainte de revivre des souvenirs pénibles ?

On le sait, l’accident sous-entend le plus souvent une mort violente qui survient rapidement ou après d’atroces souffrances. D’où l’effet brutal et traumatisant qu’il nous renvoie et dont l’image s’enfouit profondément dans notre subconscient.

On a de la peine à faire son deuil d’un être cher qui nous quitte dans des circonstances aussi douloureuses et impromptues. D’autant que rien ne nous a préparé à cette triste éventualité.

Quelquefois même, nous sommes avec la future ‘’victime’’ que rien ne désigne à priori. Elle est saine de corps et d’esprit. Aussitôt que nous la quittons, l’on nous annonce son décès, par suite d’accident. Avouons que cela est difficile à accepter. A cause des liens affectifs qui nous unissent, mais aussi de l’impact de cette disparition brutale sur des rendez-vous et des projets planifiés avec le défunt.

Vous comprendrez bien qu’on met du temps à se remettre de pareille épreuve, pénible à évoquer et encore plus, difficile à vivre. Mais, rien de tout cela ne justifie, à nos yeux, la réaction empreinte de lourd silence que nous avons, face à la problématique soulevée.

Souvenons-nous qu’en mars de l’année dernière, deux évènements majeurs sont survenus, qui ont marqué profondément la vie de notre pays. Parmi eux, figure l’apparition soudaine de la pandémie du coronavirus qui jusqu’à maintenant, hante et perturbe, la vie de tous les pays, à travers le monde.

Mais là n’est pas le sujet que nous voulons aborder. Un autre évènement nous intéresse qui s’est produit dans la même période. C’est le décès brutal, les 05 et 06 mars, de seize (16) de nos compatriotes, des suites d’accident. Dix (10) à Timbo-Mamou, (l’équipe du club sportif les ‘’étoiles de Guinée’’) et six (06) à Kaléma-Dubréka (des citoyens à bord d’un taxi urbain).

J’ose croire que ces deux catastrophes vous sont vite revenues en mémoire, la presse nationale les ayant largement relayées. Sinon, c’est le cas de dire que vous confirmez bien l’adage selon lequel ’’l’opinion a tendance à vite oublier’’.

Ces deux accidents ont suscité un tel émoi dans la capitale, à l’intérieur du pays et au-delà, que les autorités leur ont consacré une journée de deuil national. Cet évènement, une première dans le genre, a été vécu comme l’expression réelle d’une volonté politique tendant à montrer l’intérêt que le gouvernement accorde aux questions de prévention et de sécurité routière.

Nous l’ avons écrit l’année passée, que le Premier Ministre, dans un discours fort émouvant qu’il a prononcé le 09 mars, jour de l’enterrement des victimes, a traduit la volonté du Gouvernement à s’engager plus efficacement dans la lutte contre les accidents.

Dans la même foulée, nous avons cité quelques exemples d’activités susceptibles d’être associées à pareille célébration. Comme pour la consacrer et la pérenniser. Ce sont, sans ordre de préséance, des mouvements ou animations d’ordre social, religieux, institutionnel ou réglementaire : prières dans les lieux de culte (toutes les confessions) ; causeries éducatives  et débats dans les médias publics et privés;  symposium en hommage aux victimes ; visite aux familles endeuillées ainsi que celles des blessés hospitalisés; renforcement des capacités opérationnelles de l’AGUISER (Agence Guinéenne de Sécurité Routière) et du FGA (Fonds de Garantie Automobile); équipement de la gendarmerie routière en moyens roulants motorisés et de transmission pour sillonner la rase campagne ; appui à la formation et à la sensibilisation des usagers pour davantage améliorer la circulation et renforcer la sécurité routière, etc. La liste est longue.

Nous avons fortement espéré que l’activation ou la mise en œuvre de l’une ou l’autre de ces démarches, en association avec les acteurs sur le terrain, (police, gendarmerie, syndicalistes, union des transporteurs routiers, assureurs, parents, éducateurs, leaders d’opinion, chauffeurs, citoyens, large public…) nous permette d’atteindre l’objectif tant recherché. Celui de voir notre pays réussir un bon qualitatif dans le renforcement tant souhaité de sa prévention et de sa sécurité routière.

Mais hélas, rien n’en a été ! Tout s’est estompé d’un coup. C’est comme si nous nous étions trompés de date ou d’événement.

 A preuve, l’année est largement franchie, depuis la survenue de ces accidents tragiques pour lesquels le deuil national a été institué. Mais personne, ou presque, n’en a plus parlé.  La vie continue son cours normal, comme si rien ne s’était passé.

Depuis lors, les accidents mortifères se produisent ici et là. Des cas, au bilan similaire aux deux premiers, se sont encore ajoutés.

On me dira qu’il en est ainsi de l’accident de la circulation. Chez nous, on l’associe toujours au destin et à la fatalité, contrairement à la thèse inverse des spécialistes. Une telle mentalité induit fortement l’idée de notre impuissance à le vaincre définitivement.

Lorsqu’il se produit, tout le monde est ému et on annonce que Dieu l’a voulu ainsi. Quelquefois on entend jurer : plus jamais ça ! Et voilà que dès le lendemain, tous les serments prêtés la veille sont… violés, non oubliés !

Les mauvais comportements reprennent le dessus. Le fait est que dans les accidents, l’on se préoccupe plus de l’effet que de la cause, elle-même. Peut-être bien que ce soit cela qui explique qu’ils reviennent toujours. Allez savoir !

Hélas ! Notre espoir de voir cette journée de deuil national, la première du genre chez nous, capitalisée pour servir de piédestal au renforcement de la prévention routière s’en est allé.

Ce rêve, quoique chimérique à certains égards, ne nous fera pas oublier les victimes innocentes de la violence routière de chez nous, pour lesquelles nous avons une pensée pieuse.

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