Les établissements d’enseignement public de notre pays sont en général frappés par un déficit considérable d’enseignants. Ceci est un secret de polichinelle. Une situation qui impacte considérablement sur la bonne tenue des cours dans ces écoles. En séjour dans la région administrative de Labé, docteur Amadou Bano Barry le ministre de l’Éducation nationale et de l’alphabétisation a reconnu cette triste réalité, avant de partager avec l’opinion les pistes de solutions envisagées par son département afin de venir à bout de ce problème qui étouffe l’éducation.
Interpellé sur le cas spécifique de la région de Labé, le ministre a profité pour faire une autopsie générale du secteur: « ce n’est pas le propre de Labé, c’est le propre de toutes les régions de Guinée en dehors du grand Conakry. Conakry, Coyah, Dubreka, Kindia concentrent 50 % des enseignants de la Guinée. Pourtant ce n’est pas parce que l’effort de l’État n’est pas là. Entre 2010 et 2019, l’État Guinéen a recruté 25 000 enseignants. Mais puisque la fonction publique c’est comme une maison ; si tu rentres au salon tu peux aller dans les chambres, tu peux aller dans les toilettes, tu peux même passer par les persiennes. Les gens viennent par l’éducation et après ils se faufilent pour aller ailleurs » dénonce le ministre de l’Éducation nationale.
Comme solution à ce problème, docteur Bano Barry envisage : «il y a déjà un protocole d’accord signé, un arrêté conjoint entre le ministère de l’Éducation nationale, la fonction publique et le budget. Désormais, le recrutement dans le secteur de l’éducation ne se fait plus en vrac, il se fait sur poste. Ça veut dire, demain lorsqu’on va recruter ; ce n’est pas à Conakry qu’on va recruter c’est à Labé. On fait l’appel à candidature, tous les Guinéens vont voir l’appel à candidatures. Mais si vous voulez enseigner dans la région de Labé, vous venez à Labé, vous faites le teste sanitaire à Labé, vos faites le teste pédagogique à Labé et si vous êtes recruté, vous devez postuler pour une classe bien donnée, bien précise. CP1 à Gadha Woundou ; vous écrivez dans votre lettre que vous voulez devenir enseignant de CP1 à Gadha Woundou. Si vous êtes recruté, vous signez un contrat d’au moins 10 ans. Pendant les 10 ans vous restez à l’éducation. Comme ça, on va résorber le déficit » estime-t-il.
« L’appel à candidatures que nous allons faire vers décembre, janvier va concerner toutes les écoles de Guinée ; là où il y a un déficit. On a un déficit de professeur de mathématiques, on fait appel à candidature pour professeurs de mathématiques. Si vous avez fait biologique, l’État n’a pas besoin de biologie ; restez chez vous. On ne vous recrutera pas. On recrute selon les besoins de l’État » précise docteur Bano Barry.
L’autre aspect de la solution envisagé par le département de l’éducation semble aussi raisonnable : « il faut qu’on arrive à faire un redéploiement horizontal et vertical des ressources humaines dont nous possédons. Aujourd’hui, vous avez trop de personnes au cabinet, vous avez trop de personnes dans les IRE (inspection régionale de l’éducation) et dans les DPE (direction préfectorale de l’éducation). Des personnes qui en réalité auraient pu aider. Je vous donne un exemple, vous prenez Labé, le centre urbain, si vous avez l’IRE ici, vous avec la DPE qu’est-ce qui interdit aux enseignants à l’IRE où à la DPE de dispenser 6 heures de cours dans un collège ? Nous allons utiliser toutes les formules et cela permettra de libérer quelques enseignants au niveau du centre pour que ceux-ci puissent aller à la périphérie afin de pouvoir enseigner » promet le ministre.
« Je suis convaincu, que d’ici la fin de 2021, nous n’aurons plus de déficit d’enseignants sauf dans les disciplines pour lesquelles il y a un déficit dans la formation. Le plus grand nombre d’enseignants dont on a besoin au secondaire guinéen ce sont des professeurs de mathématiques et de français parce que 65% du volume horaire des collèges est profilé math et français. 45% du volume horaire des lycées est profilé math et français. Et vous savez les Guinéens ne vont pas en mathématiques, ils ne vont pas en français, pour l’essentiel ils vont en sociologie, en droit, en sciences politiques, en histoire des relations internationales et après quand ils sortent, l’État n’a pas besoin d’eux parce que tout simplement ils ont fait des spécialités qui ne servent pas grand-chose au pays ; parce que là où il y a de l’emploi, c’est dans le secteur de l’éducation » rappelle le ministre Bano Barry.