Moussa Diabaté, connu dans le microcosme culturel sous le nom de Moussa « Moïse’’, est à Kintinian, une sous-préfecture de Siguiri. Issu d’une famille de griots de par ses deux parents, il est aujourd’hui marié et père de quatre enfants. Après avoir poursuivi ses études primaire et secondaire dans sa ville natale, il a dû les interrompre au niveau de la 11ème année. En raison des aléas de la vie.
Ayant très tôt piqué le virus de la culture, Moussa Moïse Diabaté a su marquer de son empreinte le paysage culturel guinéen, œuvrant inlassablement pour sa promotion et son épanouissement. C’est ce mordu de la culture que Guinéenews a rencontré au compte de sa rubrique « Que sont-ils devenus ? »
C’était dans les ruines de ‘’La Paillote’’, un lieu mythique, témoin inoxydable de la vie de plusieurs artistes et orchestres guinéens, des décennies durant.
Actuel manager de l’orchestre féminin de la Gendarmerie nationale appelé « Les Amazones de Guinée », Moussa Moïse revient, dans la première partie de cet entretien, sur son enfance, ses débuts dans la culture et l’événement décisif qui a été l’élément détonateur de sa carrière. Lisez plutôt !
Guinéenews : pour commencer, expliquez-nous comment êtes-vous venu à la culture ?
Moussa Moïse Diabaté : tout jeune, pendant la Révolution culturelle, j’ai été intégré au mouvement des pionniers dans mon village natal de Sinko. J’aimais tellement la musique que, grâce à mon statut de pionnier, j’avais libre accès aux spectacles. Un statut qui bénéficiait également à mes amis pour facilement accéder aux salles de spectacle.
Chaque vendredi, jour de marché, l’orchestre local « Bronkéndou Jazz » se produisait dans la salle des fêtes. Durant la Révolution, les orchestres nationaux parcouraient le pays pour offrir des spectacles. Chaque localité pouvait ainsi vivre et partager la culture guinéenne.
Permettez-moi de mentionner Sinko, ma localité, qui a joué un rôle important dans ma venue au monde de la culture grâce à plusieurs atouts. Situé à 35 km de la frontière ivoirienne, Sinko est un carrefour commercial par excellence. Il accueillait chaque vendredi soir des festivités culturelles et des danses. C’est lors de l’une de ces occasions que j’ai pu découvrir l’orchestre Horoya Band National en live. Ce moment a été le facteur déclencheur de mon amour pour la culture guinéenne.
Guinéenews : peut-on dire que c’est ce passage du Horoya Band qui vous a poussé à plonger dans le bain culturel ?
Moussa Moïse Diabaté : absolument ! Même si la passion pour la culture guinéenne était déjà en moi. Lors de la tournée du Horoya Band National à Beyla en 1985, j’ai saisi l’occasion pour sympathiser avec ses musiciens. Pour ce faire, je leur apporter, volontiers, mes services, y compris en faisant des petites courses pour eux, ou même d’entretenir leurs chaussures. Cela m’a permis de suivre leurs spectacles de près. J’étais présent chaque soir avec les membres du groupe, et cette amitié s’est transformée en une véritable passion pour la musique et la culture.
Guinéenews : que représente donc ce passage du Horoya Band National pour votre carrière ?
Moussa Moïse Diabaté : cette tournée a été un tournant dans ma vie. Car, j’ai fini par décider de les suivre jusqu’à Conakry. En fait, un matin, j’ai discrètement confié à Lanciné Kanté, un des musiciens du groupe, mon envie de partir avec eux. Il m’a conseillé de prévenir mes parents. Mais sachant qu’ils n’accepteraient d’accéder à mon projet de départ, j’ai décidé de ne pas suivre ses conseils. C’est ainsi que j’ai décidé prendre mon destin en main en poursuivant le camion qui transportait les instruments du groupe jusqu’à Beyla, puis N’Zérékoré et enfin Macenta. Lorsque j’ai finalement rejoint mes amis musiciens, ils m’ont accueilli avec affection et compréhension.
Guinéenews : une fois à Conakry, commença alors la plus grande de votre aventure pour vous, n’est-ce pas ?
Moussa Moïse Diabaté : j’ai découvert Conakry pour la première fois en 1985. Au départ, j’étais hébergé dans la famille de Lancinè Kanté. Ensuite je me suis retrouvé sous le toit d’Elhadj Moriba Condé, une autre famille qui m’a traité comme son propre fils pendant 10 ans. Ce soutien m’a permis d’établir des relations dans le monde de la culture. Grâce à cela, j’ai pu collaborer avec des producteurs, dont feu Diouldé Sall et Cellou Diallo, avec qui j’ai cofondé CDS Productions, une maison qui a accompagné de nombreux artistes guinéens.
Guinéenews : avez-vous reçu une formation de manager ou l’avez-vous apprise sur le tas ?
Moussa Moïse Diabaté : je dirais que mon apprentissage s’est fait sur le tas. Et cette passion m’est venue naturellement. Sans amour pour ce que l’on fait, même si vous avez la meilleure formation, elle ne servirait à rien. C’est cette passion, plus que toute autre chose, qui m’a permis de contribuer modestement, avec d’autres passionnés, au développement de la culture guinéenne.
Guinéenews : pouvez-vous nous citer quelques artistes produits par CDS Productions ?
Moussa Moïse Diabaté : nous avons produit de nombreux artistes. Mais le premier album sous le label CDS Productions a été celui de Nafissatou Diawara en 1995, suivi de Fodé Kouyaté la même année, puis feu Lasso Doumbouya en 1996. CDS a accompagné beaucoup d’autres artistes qui ont ensuite marqué la scène musicale guinéenne.
A suivre !
Entretien réalisé par Ly Abdoul pour Guinéenews