Le chef de file de l’opposition guinéenne est monté au créneau ce jeudi 14 mars pour dénoncer la démolition des maisons dans certains quartiers de la haute banlieue de Conakry, notamment à Kapororail, Kipé 2 et Koloma Soloprimo (secteur école NDLR). Pour Cellou Dalein Diallo, rien ne justifie cette destruction même si la zone est considérée comme une réserve foncière de l’Etat.
« L’opposition réitère sa condamnation ferme de la manière dont le président (Alpha Condé, ndlr) a procédé au déguerpissement des populations de Kaporail. Pour nous, c’est inadmissible. On peut même se poser la question de savoir si Alpha Condé est guinéen parce qu’on ne peut pas traiter son compatriote de cette manière », a dénoncé l’opposant dès l’entame de son intervention.
Le Chef de file de l’opposition estime qu’il fallait d’abord respecter un certain nombre de critères avant de procéder à l’opération de déguerpissement, quelle que soit «l’urgence ». «Le schéma directeur de la ville de Conakry a été adopté en 1989. Et un décret a été pris par le président de la République d’alors, il y a 30 ans de cela. Si on estime qu’il est encore opportun et urgent de récupérer ces domaines, il fallait faire une étude d’impacts: recenser les bâtiments, les évaluer et essayer de voir si la décision de libérer cette emprise est jugée pertinente après 30 ans. Ensuite voir quel est le coût pour la collectivité. La richesse nationale, c’est la somme de toutes les richesses individuelles et collectives des guinéens », a fait remarquer Cellou Dalein Diallo.
«A supposer que c’est un besoin d’utilité publique, ces compatriotes devraient être respectés dans leur dignité parce que ce sont des êtres humains qui méritent d’être traités comme part entière de la Nation. L’Etat ne devrait pas créer une calamité pareille. Même si elle était naturelle, la solidarité nationale allait prendre le devant et l’Etat serait venu au secours pour atténuer la souffrance», a-t-il fustigé.
Pour le chef de file de l’opposition, la responsabilité de cette occupation jugée illégale incombe à l’Etat. «Lorsque l’Etat déclare une zone réservée, il doit veiller à ce qu’un citoyen ne vienne pas investir tout son épargne sur le dit domaine. Parce qu’il y a des pauvres fonctionnaires qui ont épargné difficilement, acheté avec les autochtones, les chefs de quartier parfois avec l’urbanisme. Ils ont mis l’économie de toute une vie là-dedans par ignorance certainement. Et Même si ces populations se sont installées indûment, l’Etat ne devrait pas traiter les citoyens de la sorte. L’Etat aurait pu user de tous les recours pour les persuader, les convaincre, les recaser même si c’est à une centaine de kilomètres de Conakry», a vertement dénoncé l’opposant qui fait observer qu’il y a 25 zones classées comme réserves foncières de l’Etat.
«Pourquoi seulement Kaporo rails? Pourquoi donc cet acharnement sur Kaporo rails?», s’est interrogé le chef de file de l’opposition. Et de poursuivre : «personne n’a touché les autres zones. On n’a même déclassé certaines zones parce qu’on a vu que ce n’était pas opportun. Ce n’est pas juste cette haine, cette brutalité de l’Etat contre ces populations. On ne peut pas mettre des dizaines de milliers de personnes sans-abris de cette façon sans aucune mesure d’accompagnement. Et l’Etat est fier de cela.»
En tant qu’ancien ministre des Travaux Publics, Cellou Dalein a rappelé qu’en son temps, « tous ceux qui occupaient illégalement l’emprise de la voix express et les transversales, ont été indemnisés avant les constructions des différentes voies.»
S’appuyant sur les statistiques fournies par l’association des victimes de Kaporo rails, Cellou Dalein a indiqué que 953 bâtiments ont été détruits, 14 écoles ont été touchées, 10 786 personnes sont affectées parmi lesquelles 808 élèves.