La rédaction locale de guineenews est allée à la rencontre de Madame Sylvie Sayandouno, sage femme à la retraite, présidente de la communauté Kissi, présidente des femmes catholiques du Diocèse de Kankan et présidente d’un groupement des femmes à Yendé Millimou, afin qu’elle puisse nous parler des cascagnettes, un instrument de percussions très prisé dans les rythmes traditionnels. Du rôle historique que jouent les castagnettes dans cette communauté de la Guinée forestière. Entretien.
Guineenews : Madame parlez-nous de l’historique des castagnettes ?
Mme S. Sayandouno: je ne peux pas rentrer en profondeur mais le peu que j’ai connu, depuis la nuit des temps, les cérémonies dans le pays Kissi sont tout le temps accompagnées par le jeu des castagnettes. Que ce soit le baptême, ou le mariage, voire l’initiation des enfants, ou pour saluer un chef du village, à l’occasion de l’arrivée d’une délégation gouvernementale, les fêtes au village. On joue aussi les castagnettes à l’église … En forêt, ce sont les Guerzés et les Kissiens qui utilisent souvent cet instrument musical.
Guineenews: Quand vous entendez le son des castagnettes, comment vous vous ressentez ?
Mme S. Sayandouno: quand on tape les castagnettes à côté de toi, même si tu es fâché, tu auras envie de danser. Même si tu ne danses pas avec les pieds, tu vas remuer ta tête. Parce que ça dit quelque chose dans notre coutume. Les castagnettes en forêt, ça parle. En forêt sacrée, la manière de jouer avec les castagnettes, ça veut dire quelque chose. On écoute les castagnettes, pour ceux qui connaissent, on sait à quel moment, il faut s’arrêter et à quel moment il faut continuer à danser fort. En un mot la castagnette est un instrument de grand secret pour les forestiers.
Guineenews: dans le pays kissi, qui est habilité à jouer les castagnettes, parce qu’en Haute Guinée, on parle des ‘Djely »; au Fouta, on parle de « Gnamakala »…. Est-ce que ce sont seulement les femmes qui jouent les castagnettes ?
Mme S. Sayandouno : les gens qui jouaient avant les castagnettes, on les appelait « Cosiowa » ou « Djella » en Kissi, pendant les cérémonies des femmes. Maintenant, c’est un héritage. Si quelqu’un arrive à taper les castagnettes, forcément sa fille pourra taper à la longue, les castagnettes. Ce jeu est réservé uniquement aux femmes. Dans la religion, n’importe quelle femme peut taper. Mais dans la vie naturelle, des groupes de femmes sont désignés pour jouer à chaque cérémonie.
Guineenews: quel est le message que vous avez à lancer à l’endroit de la jeune génération, dans le cadre de la conservation de la culture traditionnelle ?
Mme S. Sayandouno: les conseils que je peux donner à la jeune génération, vous voyez, on a beaucoup de choses importantes dans nos cultures en Guinée. Il faut apprendre à bien jouer aux castagnettes. Si tu vas en Europe, tu vas beaucoup gagner de l’argent. Les blancs aiment ça. Mais nos enfants ont honte de jouer les castagnettes. Au lieu d’apprendre aux autres ce que nos ancêtres nous ont laissé, les jeunes préfèrent rester sans rien faire. À travers ça, si tu es en Europe tu peux avoir de quoi nourrir ta famille sans être un domestique là-bas.