Accusé d’être impliqué dans le détournement présumé de 15 milliards de franc guinéen – représentant une partie de 40 millions de dollars destinés à la construction d’un siège pour l’Assemblée nationale –, l’ancien président de l’Assemblée nationale a enfin livré sa version des faits à la barre. Nous vous proposons ici l’essentiel de ses propos.
« Nous avons bénéficié en tant qu’État d’un don de palais de l’Assemblée nationale dont le coût de réalisation était estimé à 40 millions de dollars par les partenaires chinois. Un premier site juste derrière le ministère des affaires étrangères, à Koloma, a été attribué à l’Assemblée nationale depuis la 8ème législature dans les années 2015-2007. Des études ont été effectuées sur ce site, des maquettes ont été envoyées et nous les avons corrigées pendant cette 8ème législature. Je n’étais pas président de l’Assemblée, mais membre du bureau (de l’Assemblée). Mais, en 2020, il y a eu un redéploiement. Le site de l’Assemblée nationale a été relocalisé. Et le nouveau site était de 36 000 m² et 900 mètres linéaires de pourtour. Comme cela se devait, nous avons informé les partenaires chinois. Ils n’étaient pas contents de ce changement parce qu’il avait déjà effectué des études sur le premier site. Ils nous ont donné 90 jours pour rendre le nouveau site net de toute occupation matérielle et humaine. Le nouveau site était chargé de bâtiments à peine démolis ; envahi par des mécaniciens et des garagistes qui avaient même reconstitué certains bâtiments pour en faire des magasins de stockage de leur pièce ou de logement de leurs apprentis… Je n’avais pas d’argent. [car] l’Assemblée n’a pas de budget d’investissement. C’était en 2020 et je venais à peine d’être élu en avril. J’ai écrit au président de la République d’alors pour nous donner les moyens de respecter les exigences de la partie chinoise. La première réponse a été qu’il n’y a pas d’argent.
En plus de la viabilisation du terrain, les Chinois ont demandé à ce qu’il y ait une ligne spéciale de haute tension avec un transformateur et qu’il y ait aussi de l’eau en abondance pour les travaux. J’ai écrit à EDG qui a évalué le travail. La ligne devrait partir du Centre émetteur sur le site à Koloma. EDG a évalué le coût du travail à 750 000 000. J’ai fait la commande des travaux et j’ai payé les 750 000 000. On a écrit aussi à la SEG qui a évalué le coût de son travail à 350 000 000 et qui ont été payés. J’ai appelé 2 ou 3 autres sociétés pour le travail de viabilisation du terrain, mais j’avoue que je ne m’en souviens plus beaucoup. Le montant était tel qu’elles (les sociétés) ne pouvaient pas supporter, surtout qu’il fallait financer à l’avance. C’est alors que j’ai fait recours à la société de monsieur Kim qui, n’a pas voulu faire le travail. Il m’a dit que ça ne l’intéressait pas et m’a demandé si j’avais de l’argent pour le payer. J’ai dit non, je n’ai pas encore de l’argent et que j’en ai fait la demande, mais apparemment je n’ai pas encore. Je l’ai amené à accepter et il a évalué le travail à plusieurs reprises. Comme dernière proposition, il m’a demandé environ 2 milliards et poussières. J’ai coupé et on a payé un milliard et huit cent mille francs guinéens.
Avec les factures d’EDG et de la SEG, on est environ à trois milliards. Et en trois séances, la gendarmerie a pu obtenir la copie des chèques avec lesquels nous avons payé EDG et la SEG. Aussi, les copies du chèque des 900 millions que nous avons payé à monsieur Kim. Il restait donc six milliards dans le compte.
En tout, nous avons payé trois milliards pour le nettoyage du nouveau site ; six milliards de francs guinéens pour le paiement des primes des députés qui avaient connu un retard ; et six milliards et quelques étaient disponibles dans le compte de l’institution le 05 septembre 2021. Monsieur le président, six milliards plus six milliards plus trois milliards égale 15 milliards. »