« Aujourd’hui, il serait contreproductif pour nos intérêts nationaux d’aller dans le sens d’une modification ou d’un changement constitutionnel… Nous souhaitons que le Président Alpha Condé aille dans le sens de la nécessité pour permettre à la Guinée d’avoir une alternance démocratique apaisée, réconciliatrice, qui permettrait à la Guinée d’être sur les rails de la démocratie. »
Dans le cadre des consultations des forces vives de la nation, le Premier ministre Ibrahima Kassory Fofana a reçu ce mercredi 25 septembre le leader du parti de l’Union pour la Démocratie et le Développement (UDD), Amadou Oury Bah communément appelé ‘’Bah Oury’’. Les deux hommes ont mis cette occasion comme avec tous les précédents interlocuteurs du Premier ministre, pour échanger sur les questions relatives à l’organisation des élections législatives prévue pour la fin d’année et au référendum portant sur une nouvelle constitution, a-t-on constaté sur place.
Au sortir de cette audience, l’ancien premier vice-président de l’UFDG est revenu sur les différents sujets qu’ils a abordés avec son hôte. En plus des thèmes habituellement débattus avec les interlocuteurs du Premier ministre Kassory, Bah Oury affirme qu’il a eu le privilège de bénéficier d’un élargissement des discussions à d’autres sujets d’intérêt national. Il s’agit, a-t-il indiqué, de la nécessité pour les Guinéens d’obtenir les passeports biométriques dans leurs pays de résidence, du sujet en lien avec le frais d’inscription aux cours de masters dans les universités publiques guinéennes.
Concernant ce dernier, l’ancien ministre de la Renonciation Nationale a déclaré ceci : « aujourd’hui, seuls ceux qui peuvent payer en moyenne 15 millions de francs guinéens peuvent se faire inscrire aux cours de master 1 ou 2. Alors que l’écrasante majorité des fils issus des milieux les plus modestes, même s’ils sont parmi les plus brillants, sont exclus de pouvoir poursuivre leurs études supérieures dans les universités publiques. C’est une question de justice, d’équité, de solidarité et même de la promotion des ressources humaines dont le pays a besoin. »
Sur la question relative à la nouvelle Constitution, le président de l’UDD, réputé pour son franc parler n’a guère fait dans la dentelle. Il a rappelé au Premier ministre quelques exemples liés au changement de constitution et les conséquences que cela a engendré pour le pays.
«Nous avons connu entre 2000 et 2010 ce qu’on a appelé Koudéisme. Il a consisté à changer la Constitution en 2000 pour permettre au général Lansana Conté de rester au pouvoir alors que l’alternance a été une quête qui a été très longue. Le Comité Militaire Redressement National (CMRN), a justifié sa prise de pouvoir par les dérives du PDG-RDA qui était en proie à une lutte entre des clans antagoniques qui avaient pris le pays en otage avec des dégâts que nous connaissons. Donc, il faut limiter les mandats pour permettre au pays d’avoir des alternances régulières et éviter la confiscation du pouvoir par quelques personnes au détriment de l’intérêt de la société. Malheureusement, la Constitution de 1990 qui avait limité le mandat présidentiel à 5 ans renouvelables une seule fois a été mise de côté. Ce qui a permis au général Lansana Conté à la fin de son deuxième mandat de rester au pouvoir malgré les résistances populaires. Cela a coûté excessivement cher à la Guinée. C’est dans le même cadre, nous avons eu aussi la Constitution de 2010. Il s’agissait de ne plus permettre à ce que la Guinée puisse revenir en arrière. C’est pourquoi il y a eu les intangibilités et la nécessité absolue d’avoir des alternances régulières. Aujourd’hui, il serait contreproductif pour nos intérêts nationaux d’aller dans le sens d’une modification ou d’un changement constitutionnel. Pour des raisons géostratégiques aujourd’hui, l’espace CEDEAO n’est pas favorable, nos partenaires stratégiques notamment la France, l’Union Européenne et les États-Unis ne sont pas favorables. Ce qui est très important, la charte africaine pour la démocratie, les élections et la gouvernance, en son article 24 est très explicite : ‘’il considère comme changement anticonstitutionnel, tout amendement ou révision constitutionnelle où changement constitutionnel qui porterait atteinte à l’alternance démocratique. »
Dans la même logique, Bah Oury a regretté qu’il ne peut pas penser un seul instant que le président Alpha Condé, qui a été de manière brillante, un des porte-parole sur l’ensemble du continent à travers l’Union Africaine, puisse être en porte-à-faux avec la charte fondatrice de cette union qu’il chérit de tout son cœur. « Nous souhaitons que le Président Alpha Condé aille dans le sens de la nécessité pour permettre à la Guinée d’avoir une alternance démocratique apaisée, réconciliatrice, qui permettrait à la Guinée d’être sur les rails de la démocratie », a-t-il conclu.