Présenté dans les procès-verbaux comme l’un des commanditaires et receleur du véhicule de feu Paul Temple Cole, Mohamed Diallo alias Junior a tout nié à la barre du tribunal de première instance de Dixinn où il a été auditionné ce lundi dans le procès du double assassinat en 2012 de l’ancienne directrice du Trésor et de l’ingénieur. Souvent présenté par la police comme un grand bandit, l’accusé se présente lui-même comme un « criminologue » qui a tenté de mettre fin à la criminalité dans son pays.
C’est un accusé apparemment « pieux » qui a comparu ce lundi devant le juge Ibrahima Kalil Diakité. Coran dans la main, Junior a souvent juré au nom d’Allah et cité les prophètes Mohamed et Jésus. « Je ne dis pas la vérité à cause de vous, ni à cause de monsieur le juge. Je la dis à cause de Dieu. La vérité c’est que je n’ai jamais su l’existence de Mme Boiro », a dit l’accusé en répondant à une des questions de Me Lancinè Sylla de la partie civile. Mais où était-il alors dans la soirée du 09 novembre 2012 quand des bandits assassinaient froidement à Kipé, en banlieue de Conakry, Mme Aïssata Boiro et Paul Temple Cole ? En réponse à cette question, l’accusé dira qu’il ne pense pas qu’il était à Conakry à l’époque.
Pourtant, trois de la douzaine de prévenus dans ce dossier accusent Mohamed Diallo d’être le receleur du véhicule RAV4 de Paul Temple Cole. C’est du moins ce qui ressort de certaines pièces versées au dossier. Dans ces pièces, Junior est accusé d’être celui qui rachetait à vil prix les véhicules issus des braquages du groupe pour les revendre en Sierra Leone. « Je ne connais aucun de ces gens-là », a-t-il répliqué en parlant de ces co-accusés.
Junior estime être une victime des autorités de la police et de la gendarmerie. A plusieurs reprises, il a notamment cité le Haut commandant de la gendarmerie, le général Ibrahima Baldé, et le général Mohamed Garé de la police. Selon lui, les autorités de la police et de la gendarmerie n’étaient pas contentes du fait qu’il « voulait lutter contre le grand banditisme en Guinée ». Junior dit qu’il avait créé une ONG dénommée ASTC (Association pour la sécurité du territoire de Conakry). Une ONG qu’il avait présentée au président Alpha Condé qui l’avait d’ailleurs encouragé avant de le conduire vers le général Ibrahima Baldé…« Mais, le général Baldé et le général Garé ne voulaient pas que ce projet marche. Parce que ce projet n’était pas à leur avantage », a indiqué Junior. C’est ainsi que, selon lui, le général Baldé l’a conduit à la frontière de la Sierra Leone – où se trouveraient ses parents – en lui remettant 50 millions et en lui interdisant de revenir en Guinée. « Il m’a dit qu’il ne pouvait pas assurer ma sécurité face à la police qui est contre mon projet de lutte contre la criminalité. Mais, je savais bien que ce n’était pas seulement la police. La gendarmerie aussi était contre ce projet », estime l’accusé.
Il a indiqué qu’il était déterminé à servir son pays, et qu’il ne voulait pas céder aux « intimidations » du général Baldé qui lui avait dit « qu’il regretterait s’il retournait en Guinée ». C’est ainsi qu’il serait revenu en Guinée, cette fois-ci en allant s’installer à N’zérékoré, au sud du pays. Là, selon lui, il contribue à la réconciliation des Guerzés et Koniankés après les affrontements interethniques qu’avait connus cette préfecture. Mais, c’est à N’zérékoré qu’il sera arrêté et transféré à Conakry. « Ce n’était pas une arrestation en fait. Ils ont envoyé un chauffeur qui est venu me chercher à N’zérékoré. Dans le véhicule, j’ai compris qu’on voulait m’assassiner en cours de route. Je me suis jeté sur le chauffeur, le véhicule est allé cogner un arbre. Quand la foule est arrivée, j’ai crié en haute voix en disant qu’on voulait m’assassiner, ce n’est pas un accident. Le chauffeur a dit : ‘’ c’est lui Junior que Souka a dénoncé…», a relaté l’accusé.
Mis à la disposition du procureur, Junior sera transféré à Conakry courant février 2015. Selon lui, c’est l’hélicoptère présidentiel qui l’a transporté à Conakry.
Junior estime avoir été impliqué dans cette affaire sur dénonciation de Souka, avec la complicité des responsables de la police et de la gendarmerie. Mais, Me Lancinè Sylla a voulu lui préciser que c’est plutôt sur dénonciation de ses co-accusés. Quoiqu’il en soit, Junior qui dit avoir étudié la criminologie en Sierra Leone, croit que l’insécurité fait les affaires de certaines autorités en Guinée. Raison pour laquelle on l’en voudrait….
Son interrogatoire se poursuivra lundi 26 novembre.