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Alpha Bacar Barry dit tout sur la formation professionnelle (Interview)

A l’initiative des nouvelles autorités du ministère de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle, les premières journées de la formation professionnelle se sont tenues du 9 au 11 décembre 2021, à Conakry.

Au sortir de ces assises, Alpha Bacar Barry a bien voulu nous accorder une interview exclusive pour rappeler le mobile de l’organisation de celles-ci et évoquer les enseignements qui en ont filtré.

Aussi, il a abordé la problématique de l’inadéquation entre la formation et l’offre d’emploi, annoncé le renouvellement du corps enseignant du secteur, non sans s’exprimer sur les défis qui interpellent son Cabinet.

Guineenews© : nous sortons des journées de réflexion dédiées à la formation professionnelle. Qu’est-ce qui a prévalu à l’initiation de ces assises ?

Alpha Bacar Barry : Le souci de poser un diagnostic participatif avec les acteurs du secteur, mais aussi d’autres parties prenantes, notamment les partenaires techniques et financiers, les parents d’élèves, les élèves eux-mêmes, les enseignants, les directeurs d’écoles, pour qu’ensemble, on puisse faire un diagnostic qui puisse nous dresser une stratégie et un plan d’action autour de la question.

Guineenews© : quels grands enseignements avez-vous bien pu tirer de ces journées ?

Alpha Bacar Barry : Il y a déjà que le secteur est méconnu. C’est un secteur qui n’est pas très connu du public et même des usagers, même des élèves eux-mêmes. On ne sait pas quelles sont les écoles, qui forment à quoi, quelles sont les filières qui sont disponibles, quels sont les diplômes qu’on peut y obtenir. Donc, ça a été l’occasion d’apprécier ces questions, de permettre à ces écoles de se présenter, de présenter leurs produits et de voir jusqu’où elles pouvaient aller avec si peu de moyens.

Ensuite, entamer une discussion pour commencer la rédaction d’une stratégie et d’un plan d’action suite aux instructions du Premier ministre et du président de la transition.

Et finalement, mobiliser les partenaires pour investir dans le secteur. Mobiliser les partenaires, c’est d’abord évaluer l »existant, ce qui a été d’abord fait. Puis, voir ce qui est prévu d’être fait dans les PTA des différents projets et des différents partenaires techniques et financiers. Voir comment on peut améliorer certaines choses en adoptant cela avec notre vision politique de l’enseignement technique et de la formation professionnelle.

Guineenews© : Il est reproché à la Guinée l’inadéquation entre le système éducatif et le besoin en termes d’employabilité. Partagez-vous cet avis ? Si oui, que comptez-vous faire pour inverser la tendance ?

Alpha Bacar Barry : Il y a plusieurs facteurs qui jouent dans cette inadéquation. Il y a d’abord le fait qu’entre le département de la Formation professionnelle et le secteur privé, il n’y ait pas de dialogue. Et justement, ces journées ont été une occasion pour renouer ce dialogue pour que le public comprenne ce que le privé souhaiterait avoir comme profils de gens formés.

Ensuite, dans un second temps, il y a une asymétrie de l’information sur les disponibilités de travail sur le marché d’emploi. Également, il y a une adéquation des offres de formation elles-mêmes qui sont à l’intérieur des écoles. Il y a des emplois qui évoluent et les structures de formation professionnelle ne suivent pas. Ce qui fait qu’il y a cette inadéquation.

Pour y pallier, il faut déjà nouer un dialogue dynamique entre le secteur privé et les structures d’enseignement, faire en sorte que le secteur privé participe à la planification de ces écoles-là. Aussi, il faut mettre en place un système d’apprentissage et d’alternance qui va permettre aux apprenants d’être en situation d’entreprise et d’apprendre à travailler en situation managériale.

Il y a des modules de formation qu’il faut rénover. Il faut également repenser le management des écoles pour les rendre ouvertes au secteur privé. Puis, leur permettre de générer du revenu qui va permettre d’équilibrer leurs charges et de dépendre moins su département pour les questions récurrentes d’acquisition de maintien d’œuvre par exemple, ou des charges liées à l’électricité ou à d’autres lignes de dépenses qui freinent un peu leur évolution et surtout la mise en pratique de connaissances théoriques acquises en place.

Guineenews© : Au lendemain de votre nomination à la tête de ce département, vous avez entrepris une série de visites au niveau des différents centres de formation de Conakry. Quel état des lieux pouvez-vous bien nous dresser ?

Alpha Bacar Barry : D’abord, la vétusté des installations très poussée. Il n’est pas recommandé de laisser les enfants étudier dans les conditions comme cela si on veut qu’il en ressorte des élèves diplômés qui soient employables tout de suite.

Il y a eu moins d’investissements dans les écoles de proximité. Nous avons aussi constaté que le personnel enseignant est très vieux. Il faut le remplacer. Nous avons remarqué également qu’il y a des parties où de l’effort a été fait en termes d’infrastructures et d’équipements.

Mais aucun effort n’a été fait par exemple sur le contenu des formations. Il faut régler ça. Et puis, finalement, il y a une faible connaissance de l’administration centrale sur le potentiel national de formation professionnelle. Donc, améliorer l’outil central de gestion de la politique publique en matière d’enseignement technique et de formation professionnelle.

Guineenews© : Avec ce corps enseignant qui est vieux aujourd’hui, n’y a-t-il pas besoin de recruter ? Aussi, les installations sont dans un état de vétusté poussée. Vous l’avez dit. Que comptez-vous faire pour les restaurer toutes d’ici la fin de la transition ?

Alpha Bacar Barry : Nous avons toute une stratégie que nous voulons bâtir autour de la reconstitution du capital humain. Donc, à la fois, identifier des personnes qui ont envie de travailler dans notre département et leur donner la possibilité de travailler.

Donc, des postes sont ouverts. On va recruter. On va aménager à l’intérieur de la ressource humaine que nous avons, parce que n’oubliez pas, depuis dix ans ou même quinze ans, on recrute beaucoup dans l’éducation sans pour autant recruter la qualité. Donc, il faut réaménager tout ça pour mettre des gens dont c’est le profil, dans des positions qui puissent leur permettre de mieux former.

Pour les écoles et leur aménagement, certaines sont rénovées. Mais d’autres, malheureusement, sont inscrites en projets pour l’administration future qui va arriver. Cela va permettre justement d’avoir une base de travail pour les prochains qui viendront.

Guineenews© : à la clôture des journées de la formation professionnelle, vous avez annoncé la construction très prochaine de dix lycées techniques. A quand ce projet prendra-t-il forme véritablement ?

Alpha Bacar Barry : Nous avons une convention de partenariat que nous avons signé aujourd’hui avec l’entreprise CHEC. Le contrat commercial va venir dans quelques mois. Cette entreprise est chargée, dans le cadre de cette convention, de faire les études de faisabilité, de lever le fonds et de revenir vers nous pour pouvoir valider un certain nombre de choses et commencer la construction de dix lycées techniques effectivement. C’est un processus qui a commencé.

Guineenews© : Faire l’enseignement professionnel est considéré comme un échec après avoir fait l’enseignement classique. Que faire pour changer cette mentalité ?

Alpha Bacar Barry : Il faut déjà montrer que beaucoup de gens réussissent en passant par l’enseignement professionnel. Il faut les rechercher. Il faut les montrer. C’est cela la construction du rôle-modèle. Ensuite, il faut rendre la formation professionnelle plus attractive et plus pertinente, surtout dans la création de l’emploi.

L’emploi, c’est la chose qui valorise l’Homme. Et donc, démontrer qu’en passant par la formation professionnelle, on a facilement accès à l’emploi participe à la valorisation, à l’attractivité dans le secteur. Donc, il faut inverser ce narratif qui dit que ceux qui sont dans le professionnel sont ceux qui ont échoué dans le public. Il faut l’inverse et prouver que ce n’est pas vrai.

Guineenews©  :  Vous avez de nouveaux collaborateurs, un secrétaire général, YBS et une cheffe de Cabinet Fatou Baldé Yansané. Avez-vous été consulté pour leur choix ?

Alpha Bacar Barry : Oui, absolument ! Et c’est beaucoup de chances de les avoir ici, dans ce département. Chacun d’entre eux a une expérience différente. Ce qui va apporter beaucoup plus de cohérence et de complémentarité dans le travail.

Guineenews© : Vos défis et perspectives à court, moyen et long termes ?

Alpha Bacar Barry : Écoutez ! nous allons avoir déjà une stratégie interne que nous allons partager avec vous. Il s’agira notamment qu’elle soit axée sur le développement du capital humain, la refondation, la rénovation des centres de formation, la rénovation de quelques écoles et l’adoption du digital dans les écoles.

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