Suite aux vagues de critiques soulevées après l’achat par le gouvernement guinéen de quatre wagons qui datent de 1964, le ministre d’Etat, ministre des Transports, Aboubacar Sylla a organisé ce mercredi 4 septembre une conférence de presse au cours de laquelle il est largement revenu sur tous les pans de cette transaction. Une sortie médiatique qui sonne plus d’un observateur comme un exercice de recadrage après tout qui a été dit autour de cette acquisition de wagons.
Des mesures d’urgence pour développer les trafics du train-voyageur à Conakry
D’entrée du jeu, le ministre Aboubacar Sylla a décliné les 4 grands axes autour desquels toutes les initiatives pour développer le transport des passagers en Guinée.
« Nous avons un Plan de Déplacement Urbain (PDU) de Conakry. Nous avons identifié quatre axes sur lesquels nous allons agir. Il s’agit des hauts niveaux de service. C’est-à-dire pour le déplacement des populations de Conakry, d’utiliser à court, moyen et long termes, des trains pour le transport des passagers », a déclaré le ministère des Transports qui a annoncé quelques mesures envisagées afin de rendre rapidement opérationnel ce transport de passagers à Conakry : « le plus grand déplacement dans le monde se fait soit par le train, soit par métro ou par tramway. Nous avons prévu un doublement de la ligne Compagnie de Bauxite de Kindia (CBK) pour permettre d’avoir un train de transport comme Conakry Express. Sur les 36 kilomètres qui séparent Conakry de Kagbélén, nous avons prévu 17 rames de huit voitures. 43 trains par jour et 2 400 passagers par train. Si ce projet se réalise, nous aurons deux cent mille personnes que cette ligne pourra transporter en 24 heures. Nous avons prévu de développer la ligne de chemins de fer de Friguia. Nous avons pris sur nous l’initiative de rechercher les moyens. Comme il y a la ligne de CBK, qui va de Conakry à Kagbélén avec le train Conakry-Express, nous voulons un autre train sur la voie de Friguia qui est une voie métrique pour transporter également les personnes qui sont des riveraines de cette ligne de chemins de fer (…).
Inventaire des moyens existants
« Nous avons fait l’inventaire des moyens dont nous disposons au niveau de la société nationale des chemins de fer. Nous avons deux locomotives et six voitures qui ont été offerts à la société nationale des chemins de fer par le groupe Bolloré pendant qu’il s’installait. Nous avons estimé que six voitures étaient insuffisantes pour constituer une rame complète pour un train. Il aurait non seulement transporté très peu de passagers mais aussi il consommerait beaucoup de carburant et il ne serait pas donc rentable. Donc, il fallait trouver les voitures supplémentaires pour rendre la rame plus longue. Nous avons demandé à la société nationale de chemins de fer de rechercher sur le marché. La société s’est heurtée à des problèmes. C’est que la ligne de Friguia, à la différence de la ligne de CKB, est une ligne métrique. Cela veut dire que l’écartement de la voie est d’un mètre. Alors que l’écartement de la ligne de CBK est 1 mètre 400 presqu’un mètre et demi. C’est une voie standard, c’est-à-dire les nouvelles voies. Ce qui veut dire que les voies métriques ne sont plus fabriquées et ne sont plus installées. Ce sont les voies qui supportent des locomotives et des wagons qui ne sont plus fabriquées dans le monde depuis des décennies. C’est une technologie qui est en voie de disparition parce que, plus l’intervalle des rails est étroit, moins il est possible d’acquérir de la vitesse et il y aura toujours un problème de gravité (…).
La vérité sur le coût réel de ces wagons
C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles, le projet de chemin de fer dont on a posé la première pierre, a été arrêté. Il n’y a pas de possibilité d’avoir des wagons neufs même si on a la possibilité et les moyens en ce qui concerne les voies métriques. La société nationale des chemins fer a localisé des wagons en Suisse. La société nationale des chemins de fer n’ayant pas les moyens ainsi que le département des Transports, nous avons tergiversé, entre trois et quatre mois, ces wagons ont été achetés par le Burkina. Nous avons cherché d’autres wagons qui ont été encore identifiés par la société nationale des chemins de fer en Suisse à nouveau. C’était quatre wagons qui n’étaient pas ensemble donc il fallait les regrouper pour pouvoir les embarquer. Ces quatre wagons ont été acquis à 5 000 francs suisses. Ce qui est égal à 4 000 euros, soit mille euros par wagon. C’est pratiquement un don et ce sont des wagons qui datent de 1964. A priori, on peut penser qu’ils sont vieux. Le minimum de vie d’un train est 50 ans sans rénovation. Il y a des wagons qui sont fabriqués il y a cent ans d’autres ont 70 ans. Un wagon est une carrosserie avec des chaises à l’intérieur. Ils ne sont pas motorisés, ils sont tractés. Donc, dès qu’on change des chaises, des roues et repeint, il est encore utilisable (…). On nous a fait croire que ces vieux trains ont été achetés au prix des trains neufs certainement pour empocher la différence. Si en Guinée on peut parler d’un scandale autour de 4 000 euros, cela veut dire que la gouvernance a sensiblement amélioré (…).
D’où vient les fonds ayant servi à l’acquisition desdits wagons ?
Ces moyens qui ont été mis à notre disposition pour acquérir ces wagons ne viennent pas du budget de l’Etat. C’est par le plus grand hasard que nous avons été informés que la société GUINOMAR qui fait l’objet de liquidation depuis 2013, où la Guinée était actionnaire à 50% avec une entreprise norvégienne dans le cadre du transport maritime des minerais, que cette société avait un compte qui dormait à Oslo, en Norvège. C’est la direction générale qui nous a écrit pour dire attention, qu’on a un compte qu’il faudrait définitivement fermer. Etant donné que nous sommes actionnaires à 50%, donc nous avons droit à 50% de ce solde. Dès que j’ai reçu le courrier, sous d’autres cieux, on aurait cherché à canaliser ce montant quelque part et passer inaperçu parce qu’il était totalement hors du budget national.
Comment le paiement de ces wagons a-t-il été fait ?
Nous avons écrit au ministère du Budget et au Premier ministre et nous avons demandé à ce qu’on utilise ce montant imprévu pour acquérir quelques moyens pour mettre en route le train voyageur Conakry-Dubréka et en même temps, de réparer les bus chinois dans l’ancien stock des bus de la SOTRAGUI pour ajouter au 50 bus que les Turques nous ont offerts pour renflouer un peu le parc des bus. L’accord a été donné en Conseil des ministres. Nous avons exigé que ce montant soit viré dans le compte de la Société Navale Guinéenne. Aucun paiement n’a été fait par chèque, tout a été fait par virement. Qu’on me dit quel est ce marché qui fait autant de transparence ou de traçabilité que celui-là. Que vous allez au cabinet du ministère des Transports, à la société nationale des chemins de fer, à la Société Navale de Guinée (SNG) et au Banque Centrale de la République de Guinée (BCRG), vous trouverez toutes les traces des décaissements avec des pièces justificatives annexées… »