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Affaire Résidence 2000 : chronique d’une bataille judiciaire, vieille de 10 ans

Après une première tentative de récupération ratée sous Alpha Condé, l’Etat guinéen semble être enfin déterminé à récupérer la cité ‘’Résidence 2000’’, située sur la corniche sud longeant les Jardins 2 octobre.

Mardi 08 février, le directeur général du Patrimoine bâti public a partiellement fermé une partie de cette résidence considérée comme faisant partie du domaine public maritime de l’Etat. Mais « les propriétaires » n’entendent pas se laisser faire. Contre les arguments de l’Etat, ils avancent les leurs.

La bataille tourne autour de l’article 101 du Code Foncier et Domanial. « Les biens du domaine public sont inaliénables et imprescriptibles », lit-on dans le Code foncier et domanial. S’appuyant sur cet article, l’Etat a cherché à récupérer la Résidence 2000 en 2013. Sans succès. Puisque Monsieur Bachily, gestionnaire de la Résidence, et ses hommes opposent à l’Etat l’alinéa 1 de l’article 113 du même Code. En feuilletant le Code, on y lit : « lorsqu’un bien du domaine public artificiel ne correspond plus à l’affectation qui lui avait été donnée, il doit faire l’objet d’une mesure de déclassement ».  Le gestionnaire souligne que « c’est pour mettre fin à cette appartenance à son domaine public et procéder au transfert dans son domaine privé, pour les besoins de la cause, à savoir la construction d’un complexe immobilier à usage commercial, et ce en conformité avec la législation en vigueur, il a fallu au pouvoir de respecter les dispositions du 2ème alinéa de l’Art. 113 du CFD (Décret du 02 août 1999). » Ce deuxième alinéa de l’article 113 indique que « le déclassement fait sortir le bien du domaine public et le fait entrer dans le domaine privé. »

Enfin la récupération ?

Fort de l’article 113 du Code foncier, « le propriétaire » de la Résidence 2000 gagne un procès contre l’Etat guinéen en 2015, lorsque le ministère de l’Habitat tente de nouveau de récupérer la Résidence 2000 pour l’attribuer au groupe ONOMO. Le gestionnaire cédera néanmoins une partie du terrain où sera construit l’hôtel ONOMO.

A l’arrivée de la junte au pouvoir, l’Etat guinéen tente de nouveau de récupérer les domaines de l’Etat et la Résidence 2000 est de nouveau citée. Ousmane Gaoual Diallo, le ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, s’appuie sur un décret d’Alpha Condé en date du 3 avril 2013, et qui annulait l’attribution en octobre 1999 de terrain urbain à usage commercial à l’investisseur libanais Kaddoura Izzat. « Mais, en réalité, un décret n’annule pas un titre foncier. C’est pourquoi l’Etat a même été condamné en 2015 par le tribunal de première instance de Kaloum en dépit du décret pris par Alpha Condé en 2013 », réplique-t-on de l’autre côté.

L’autre argument de l’Etat est fondé sur l’article 54 du Code foncier. « Il ne peut être porté atteinte au droit de propriété que lorsque l’intérêt général l’exige. Cette atteinte peut constituer en une expropriation pour cause d’utilité publique, à une réglementation du droit de propriété dans un but d’urbanisme, d’aménagement rural, de recherche ou d’exploitation minière, de sauvetage de l’environnement et en l’édiction de servitudes d’utilité publique », stipule l’article 54 du Code foncier. En réplique, les promoteurs de la Résidence 2000 estiment que la démarche actuelle de l’Etat ne se situe pas dans le cadre d’une expropriation pour cause d’utilité publique au sens du législateur, ni dans le cadre de la limitation de la propriété privée prévue par la loi.

Règlement à l’amiable ?

En somme, les promoteurs de la Résidence 2000 estiment que l’Etat sort de sa vocation naturelle et légale au risque de porter préjudice à une personne à laquelle il doit protection et bienveillance. Ils rappellent que c’est suite à un séjour en Afrique francophone en 1998, notamment en Côte d’Ivoire et en Guinée, que l’investisseur Kaddoura Izzat – après des échanges avec Lansana Conté et Aboubacar Somparé – décide en 1999 de réaliser des investissements immobiliers du type complexe immobilier à Conakry. « C’est ainsi qu’en date du 28 octobre 1999, l’Etat guinéen, après négociation et recherche de site, a décidé d’affecter un espace répondant à la dimension du projet et libre de tout engagement afin d’encourager l’investissement immobilier et plus particulièrement les financements étrangers et de la diaspora. Après plusieurs jours de recherches infructueuses car les sites identifiés étant tous affectés, selon les services compétents du Ministère de l’Habitat de l’époque, le Président CONTE, en accord avec ses Départements compétents (Min. Habitat & Urbanisme, Ministère de l’Economie et des Finances) et le promoteur a décidé de lui attribuer ce site du Domaine Public Maritime (DPM) afin de l’affecter à la réalisation d’un complexe immobilier à usage commercial à titre privé afin de respecter les termes de la convention », indique le promoteur dans un mémorandum. Et ajoute que les titres fonciers TF n° 01227/1999/TF vol 4 Fo 103 et TF n° 01486/1999/TF vol 5 Fo 111 ont alors été établis et consacrent jusqu’aujourd’hui le droit de propriété au Complexe Résidence 2000.

Aux dernières nouvelles, le promoteur et l’Etat guinéen ont entamé ce mercredi 9 février des pourparlers en vue de parvenir à un règlement à l’amiable du litige.

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