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Manifs en vue, carburant, rapport Guinée-Onu-Cedeao et Dalein, Gaoual sans tabou (entrevue)

Dans une interview accordée à un groupe de médias dont Guineenews ce mercredi 1er juin en marge de l’immersion gouvernementale à Kankan, le ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Aménagement du Territoire et également porte-parole du gouvernement, Ousmane Gaoual Diallo, s’est prononcé sur des sujets sociopolitiques actuels. Lisez !

 

Guinéenews : quel constat faites-vous après quelques jours passés dans la ville de Kankan ?

 

Ousmane Gaoual Diallo : l’essentiel est qu’on trouve que la région de Kankan a bénéficié de beaucoup de bâtiments administratifs qui sont  dans un état plutôt neuf. A côté, il y a une absence visible des équipements et une insuffisance du personnel pour faire fonctionner l’administration publique. Les cadres sont absents dans les programmes nationaux de formations. Il y a une très grande distance entre l’administration déconcentrée et les structures centralisées au niveau de Conakry. Il faut ajouter l’absence des ressources financières devant leurs permettre de bien conduire leurs missions. En ce qui concerne mon secteur d’activités, le foncier constitue un problème assez important parce qu’il concentre beaucoup de crises qui se judiciarisent de plus en plus.

 

Guinéenews : nous avons assisté à la hausse du prix du litre du carburant à la pompe. Il est passé de 10 000 fg à 12 000 fg. Quelles sont les véritables motivations du gouvernement guinéen

 

Ousmane Gaoual Diallo : nous vivons dans une société de plus en plus globale ouverte au monde. Nous avons vécu deux années de crise sanitaire mondiale qui a affecté de façon assez visible les économies mondiales et avec son corollaire sur l’augmentation du coût et la baisse de la production mondiale. Il s’agit des denrées de premières nécessités ou de grande consommation.  Il y a aussi la crise russo-ukrainienne qui est venue aggraver la situation qui était trop tendue avec son corollaire sur les transports maritimes et sur l’approvisionnement des hydrocarbures. C’est cette conjugaison d’actions des difficultés et crises  qui a entraîné une appréciation assez considérable des produits sur le marché mondial. Le pétrole a pris presque 33% depuis l’éclatement de la crise ukrainienne (…). Le prix du blé est passé de 185 à peu près 225 dollars la tonne en janvier 2011. Aujourd’hui, il est presque à 650 dollars la tonne. Une appréciation extrêmement exponentielle et qui fait que l’Etat guinéen, quand nous sommes venus, on a essayé de contenir l’augmentation des prix en ciblant des produits sur lesquels on a agi en baissant les taxes douanières en subventionnant certains produits.

 

C’est ce qui a permis au pain de se maintenir au prix auquel il est vendu aujourd’hui. Sur les hydrocarbures, on a renoncé à toutes les taxes. Il faut savoir que sur chaque litre de carburant vendu, l’Etat guinéen prélevait près de 2 000 fg. Aujourd’hui, c’est zéro franc. Il y a un prélèvement qui est fait sur les produits pétroliers pour le Fonds d’Entretien Routier (FER), ce fonds a été aussi délesté de 250 fg par litre.

 

Cela veut dire que tous ces produits sont quasiment à zéro franc de taxe pour les caisses de l’Etat. Malheureusement, l’appréciation sur le marché mondial et l’explosion du prix de transport sont des paramètres qu’on ne maitrise pas beaucoup. Il y a des pays qui disposent des raffineries comme le Sénégal et la Côte d’Ivoire qui produisent aussi le pétrole mais, ces pays n’ont pas été à l’abri de l’augmentation.

 

Le Libéria a procédé à trois fois d’augmentation, le Mali on n’en parle pas parce qu’il est sous embargo. Il y a beaucoup de pays y compris les pays développés qui réajustent leurs prix à la hausse. La Guinée ne peut pas être en marge en maintenant le prix parce que la conséquence sur notre pays commence à être insupportable. C’est pourquoi, il y a eu cette augmentation de 20%.

 

Guinéenews : avec cette augmentation du prix, il y aura une flambée des prix sur le marché. Quelles sont les dispositions que le gouvernement a pris pour accompagner la population

 

Ousmane Gaoual Diallo : nous allons donner des prix indicatifs en accord avec les corporations sectorielles (…).  C’est délicat, lorsqu’il y a une augmentation des prix notamment des hydrocarbures parce que l’Etat n’a pas une économie pour soutenir les subventions mais s’il se répercute sur le panier de la ménagère. La conséquence, c’est de demander à l’Etat d’augmenter les salaires mais, si l’Etat avait de l’argent, il n’augmentera pas les prix des hydrocarbures.

 

C’est un effort national qu’on demande à nos concitoyens d’accepter cette augmentation conjoncturelle pour faire face à la crise ou prendre le risque d’avoir une disparition du produit sur le marché. Parce que malheureusement, on ne produit pas l’hydrocarbure et ceux qui nous livrent, ne font pas de crédit. Cela nous coûtait à peu près 35 à 40 millions de dollars par mois de perte pour le trésor public (…). 

 

Quand nous sommes arrivés au pouvoir, il y a eu une baisse constante des prix des hydrocarbures, nous avons pris la décision de sortir de 11 à 10 mille francs guinéens parce que c’était possible de le faire. Maintenant, cela n’est plus possible, on augmente. Si demain, il y a une embellie forte, on va encore réajuster à la baisse.

 

Guinéenews : au niveau du transport urbain et interurbain, il y a ceux qui fixent le prix du transport à leur guise. Qu’en pensez-vous ?   


Ousmane Gaoual Diallo : il y a des discussions assez fortes qui se font avec le ministre des Transports et des syndicats. Une communication va suivre dans les prochaines heures pour donner les tarifs indicatifs.

 

Guinéenews : comme vous avez parlé de l’augmentation du prix du sac de blé, est-ce qu’il fait s’attendre à l’augmentation du prix du pain? 

 

Ousmane Gaoual Diallo : s’il y a une augmentation continue du prix de n’importe quel produit, l’Etat va faire des efforts de les contenir mais, si ce n’est pas supportable par nos économies, on ne fera pas l’économie d’une augmentation.

 

Guinéenews : le CNRD a réitéré sa volonté d’interdire toutes les manifestations en Guinée. Par contre, le FNDC et certains partis politiques ne sont pas d’accord. Ils tiennent toujours à manifester. Quel est le regard du gouvernement 

 

Ousmane Gaoual Diallo : chacun est dans son rôle, je connais les différents types de rôles. Il faut voir que ces mesures sont comme une invite à expérimenter d’autres mécanismes de résolutions de nos contradictions. Lorsqu’elles n’aboutissent pas, il y a d’autres solutions qui sont là, y compris des protestations différentes. Aujourd’hui, sur la table de négociation, les places sont encore vides. La volonté des autorités et du CNRD est d’inviter les uns et les autres à venir poser leurs problèmes pour qu’en ensemble, on essaye d’explorer les mécanismes par le dialogue la résolution de nos crises.

 

Très malheureusement, on a hérité un peu de la France où il faut d’abord bomber le torse, se cogner et après discuter. Je pense qu’il faut aller avec d’autres méthodes notamment celle allemande qui expérimente par le dialogue jusqu’à ce qu’on épuise tous les canaux du dialogue avant d’exploiter d’autres formes de résolution. Pour l’instant, le CNRD et le gouvernement restent dans leur position, ils sont ouverts au dialogue, à la concertation. Nous invitons les acteurs à venir autour de la table pour poser les problèmes pour essayer de résoudre les contradictions qui sont dans notre pays   

 

Guinéenews : revenons sur l’augmentation du prix du litre du carburant à la pompe, de 10 mille à 12 mille francs guinéens. Cela fait 20% alors que sur le marché mondial, c’est 33%, est-ce que dans ce cas, les 20% sont suffisants?

 

Ousmane Gaoual Diallo : pour l’instant, c’est encore supportable. Si l’augmentation passe à 50 ou 60%, il va s’en dire de réajuster à la hausse. Cela veut dire qu’aujourd’hui, nous tenons compte du pouvoir d’achat de nos populations. Je vous rassure que même à 15 mille francs le litre, on sera encore déficitaire.

 

Guinéenews : la baisse du prix du carburant au lendemain du coup d’Etat n’était-il pas une erreur                                    

 

Ousmane Gaoual Diallo : pas du tout, c’était lié aussi à la conjoncture. En ce moment, c’était supportable. N’eut été cette augmentation de 33%, on serait dans le prix-là (…) c’est sur la base de 10 mille francs le litre qu’on a construit le budget avec les recettes qu’on devait engrangées même ces recettes n’existent plus.

 

Guinéenews : quelle est la nature de la relation entre le gouvernement guinéen et la communauté internationale notamment la CEDEAO ?

 

Ousmane Gaoual Diallo : nous sommes en train de trouver les équilibres dans nos rapports qui ne sont pas toujours faciles. Les ouest africains attendent beaucoup de cette institution. Nous avons le sentiment qu’elle n’est pas toujours présente pour répondre aux appels des populations et partout d’ailleurs, les peuples africains voudraient avoir une institution qui soit plus préoccupée des problèmes des peuples que des problèmes de ceux qui dirigent.

 

Nous attendons très rapidement l’envoi d’une délégation de la CEDEAO annoncée pour venir être à l’écoute du contexte guinéen. C’est à partir de là qu’on pourrait avoir une vision partagée pour accompagner les Guinéens à sortir de cette crise qui n’a fait que trop durer. Parce que c’est presque 10 ans de crise à répétition et pour laquelle la communauté internationale n’a pas permis d’arriver au bout parce qu’elle a abouti à un coup d’Etat. On a plus besoin d’accompagnement pour sortir de cette situation que de tensions pour aggraver les contradictions dans notre pays.

 

Guinéenews : il n’y a toujours pas de courant à Kankan

 

Ousmane Gaoual Diallo : je suis plutôt déçu de voir qu’il n’y a pas de courant à Kankan et en Haute Guinée en général. Mais ce n’est pas que la Haute Guinée seulement, il n’y a pas de courant à Labé, à Télémélé, à Gaoual et dans beaucoup d’autres endroits de la Guinée. On doit se poser la question, il n’y a pas de courant, c’est parce que les précédentes équipes dirigeantes n’ont pas investi nos économies là où elles devaient être. Elles les ont mises peut-être ailleurs. C’est incompréhensible qu’une ville comme Kankan soit encore dans l’obscurité.

 

Le CNRD est venu pour corriger ce dysfonctionnement. Ce qui est clair, les dispositions sont en train d’être mises en œuvre pour donner rapidement de l’électricité parce qu’en réalité, l’électricité est disponible quelque part soit en Guinée soit chez les pays voisins.

 

A Souapiti, nous produisons plus d’électricité que nous en consommons, nous avons un problème de transport (…).  D’ici la fin de l’année, des avancées notables se feront dans le sens de donner le courant aux populations de Kankan.

 

Quand le CNRD est venu au pouvoir, l’une des exigences a été de payer nos factures d’eau et d’électricité. Je ne sais pas si c’est parce que je suis devenu ministre, tout à coup, ma facture est passée de 2 millions de francs guinéens à 11 millions de francs guinéens, cela veut dire qu’il y a un problème. Si on ne paye pas l’électricité, le courant va partir (…).

 

Guinéenews : les Nations Unies ont demandé aux autorités guinéennes de révoquer sa mesure d’interdiction des manifestations. Comment vous trouvez cette exigence.

 

    

Ousmane Gaoual Diallo : le Système des Nations Unies sont dans leur rôle. L’Etat guinéen est aussi dans son rôle de vouloir coûte et coûte maintenir la quiétude sociale et de la paix sociale dans notre pays.

 

Guinéenews : est-ce que vous êtes toujours militant de l’UFDG et quel est votre lien avec son président Cellou Dalein Diallo

 

Ousmane Gaoual Diallo : UFDG, c’est mon parti mais, vous savez, il y a des liens politiques, familiaux et des relations personnelles. Quand on décide de se mettre au service de la République, les liens politiques s’effacent.   

 

Lire vidéo:

Depuis Kankan, une interview décryptée par Sékou Sanoh

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