Le Djembé est un instrument musical traditionnel africain qui tire son origine en Afrique de l’Ouest. Selon les récits de certains griots, cet instrument a été créé au sein de l’empire Mandingue, connu aussi sous le nom de l’empire du Mali. Un territoire qui s’étendait de la Guinée, à l’Est du Mali, la partie nord de la Côte d’Ivoire et le sud du Burkina Faso.
Ici à Kankan, la capitale du pays Mandingue en Guinée, on ne retrouve plus assez de jeunes passionnés qui évoluent dans ce métier de confectionneurs de Djembé.
Nous avons rencontré Kaba Camara, que nous sommes allés voir à l’œuvre dans sa fabrique située en plein cœur de la commune urbaine de Kankan.
Kaba est capable de produire plus de 10 à 15 Djembés par jour. « J’ai appris à fabriquer le Djembé en Côte d’Ivoire à bas âge. C’était avec mon oncle Karim Kouyaté, paix à son âme, car il est décédé. De ses nombreux enseignements dont j’ai pu bénéficier, il me disait toujours que le Djembé vient de la langue Maninka. Après la guerre, quand vient l’heure de la réconciliation, on dit « Djemben », qui veut dire nous sommes unis. Cette union est consacrée par la création du Djembé, instrument auquel on joue lors de la cérémonie et où tout le monde se met à danser. Donc cet instrument qu’on appelle « Djembé” est né dans le Mandingue pour célébrer les moments festifs et annoncer les grandes informations. Pour être clair, le Djembé est créé cela fait des siècles. C’était sous le règne de l’empereur Soumaoro Kanté « , nous a-t-il indiqué.
Dans la même lancée, ce jeune spécialiste nous a aussi assuré que le Djembé et le Tam Tam comme on l’appelle en langue française : “ ne sont pas les mêmes. Les peaux d’animaux qu’on utilise dans la fabrication des Djembés et celles dont on use pour les tams-tams ne sont pas pareilles. On utilise la peau du cerf dans la confection du Djembé. On utilise pas des cordes, mais c’est la peau qu’on utilise aussi comme fil d’attache pour le Djembé. C’est purement traditionnel. On a pas besoin non plus de fer, mais plutôt c’est avec un bois qu’on trouve dans la forêt appelé « Fou » en Maninka, qu’on fait le cercle d’attache que vous pouvez voir au niveau du cuir et en bas. Après avoir fini de fabriquer le Djembé, il faut allumer le feu pour bien le réchauffer. Mais aujourd’hui avec la modernisation, sont venus les tams-tams. Pour fabriquer un tam-tam. Là on a pas besoin d’allumer de feu. L’utilisation des matériaux tels que le fer et autres, sont venus révolutionner la fabrique mais, à la fin on a pas le même son typique quand le travail est fait dans l’originalité. J’ai produit récemment trois Djembés qui se trouvent dans ma collection. Mais les tams- tams, j’en fais des tas en un rien de temps. Pour ce qui est du Djembé, c’est compliqué, car ce n’est pas facile de trouver la peau recommandée, c’est la peau des bœufs qu’on trouve facilement ici. Alors que cela n’est pas recommandé pour le Djembé. Mais plutôt celui d’un animal rare qu’on appelle en langue du terroir “Sansanguerebö” (le cerf). Le Djembé original, c’est pour les villages que nous confectionnons le plus souvent, ils sont juste utilisés pour les réceptions des chefs de village, ils sont appelés autrement en langue française les Tams-Tams parleurs. Ces Djembés ont pour vocation de transmettre des informations. Pour ceux qui s’y connaissent bien, ils savent distinguer le son d’un Djembé de celui d’un simple tam-tam. Même les manières de taper ne sont pas du tout les mêmes « , nous a expliqué Kaba Camara.
Le Djembé, instrument historique utilisé notamment lors des cérémonies de danse traditionnelles comme le le Dumdumba, faute de valorisation et d’intérêt de la nouvelle génération commence à perdre sa valeur dans nos sociétés.
Poursuivant, notre interlocuteur tire la sonnette d’alarme en ces termes : “ dans 20 à 30 ans, le Djembé en tout cas dans sa forme originale risque de complètement disparaître. De nos jours personne n’a le temps. Surtout les jeunes qui croient tout trouver dans les outils modernes. Tout le monde, même nos décideurs faisons juste semblant par occasion de nous intéresser à nos valeurs culturelles, sinon des instruments traditionnels comme le Djembé, la Kora, le Balafon et pleins autres, ce sont nos autorités qui devraient être les premiers à s’impliquer à 100%, afin de les mettre en valeur. Mais regardez aujourd’hui le cas du Djembé. A Kankan, nous sommes en terre Mandingue et je suis presque la seule personne qui exerce ce métier. La vérité est tout simplement que la culture est abandonnée à elle même chez nous « , déplore-t-il.
Pour terminer , Kaba Camara invite les autorités actuelles, à travers le ministère de la Culture et du tourisme à la promotion des instruments traditionnels, pour la sauvegarde de notre identité et de nos patrimoines.: « Moi, comme les choses ne marchent pas bien ici en Guinée, parfois je voyage pour la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso ou encore le Mali. Ceci dit, on ne va pas désespérer de notre pays. Mais il faut réellement que nos autorités nous aident en mettant nos œuvres en valeur. Quand les occidentaux viennent chez nous, qu’est-ce que nous sommes vraiment censés leur montrer, si ce n’est que ces richesses traditionnelles que nous avons“, a-t-il conclu.
Faut-il le rappeler, si ces instruments traditionnels comme le Djembé sont en voie de disparition, notamment en Guinée, cela est aussi dû au fait que la presque totalité des artistes, préfèrent les zapper au profit des instruments musicaux modernes.