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Hausse des prix d’intrants agricoles à Faranah: inquiétudes chez les paysans qui appellent à l’aide de l’Etat

Comme plusieurs préfectures du pays, celle de Faranah enregistre, depuis la fin de la campagne agricole précédente à nos jours, la plus forte augmentation des prix d’intrants agricoles notamment les engrais et les herbicides.

50kg d’engrais subventionnés par l’État est passé de 250 000 fg à 450 000 par endroits sur les marchés. Un carton de 12 litres d’herbicide, est passé de 400 000 à 750 000fg voir 780 000fg par endroits sur les marchés. Une situation qui menace et inquiète les paysans à tous les niveaux et qui, selon eux, devra fortement les impacter. Car, les grandes superficies qui devant être mises en valeur seront réduites pendant cette campagne. Cela va sans dire que le résultat escompté en termes de rendement baissera et la sécurité alimentaire sera touchée.

Partout, ces paysans ont la peur au ventre et se demandent comment entamer la campagne agricole 2022-2023 avec ce coût élevé des produits agricoles sur toute l’étendue du territoire national. Très incertains, ils sollicitent une subvention auprès de l’État pour relever le défi de l’autosuffisance alimentaire à l’intérieur du pays et promouvoir le slogan « consommons ce que nous produisons ».

Le gouvernement de la transition a annoncé des mesures d’aide à destination des agriculteurs. Une avancée, mais insuffisante selon ces agriculteurs, au vu des enjeux évoqués

Rencontré sur le terrain alors qu’il tentait de se procurer des herbicides sur le marché central de Faranah, ce producteur du village de Nèrèkoro, Sékou Oularé, revient sur ses difficultés : « c’est effectif que les prix d’intrants agricoles ont grimpé. Vers la fin de la campagne précédente, on achetait un litre d’herbicides à 35 000 fg dans les dépôts agréés. Sur le marché, cela se négociait entre 38 000 à 40 000 fg par endroits.

Cette année, je voudrais acheter beaucoup d’herbicides mais, le marché a changé mon élan. Parce que j’ai trouvé que le prix est monté en flèche de 65 000 à 70 000fg. Si le prix d’herbicides monte de la sorte, ça peut nous impacter négativement en termes de production et on sera fatigué. Cette montée des prix poussera les producteurs à faire recours à la traction animale dont le coût journalier est de 60 000. Donc, si ceux qui avaient l’habitude d’utiliser 4 litres seront en difficulté de trouver cette année les frais de ces 4 litres. Je lance un appel au gouvernement à nous aider pour que les prix des herbicides baissent et nous subventionner sinon ces prix ces temps-ci n’arrangent pas les producteurs. »

Au nom d’un groupe d’étudiants stagiaires rencontrés dans un périmètre maraîcher aménagé, Fodé Cissé, explique leur calvaire lié au coût élevé des engrais : « c’est une réalité. Les prix des engrais ont grimpé ces derniers moments.  Avant, on achetait l’engrais NPK et l’urée à 9 000fg, le kilogramme. De nos jours, c’est entre 10 000 et 12 000fg, soit 3 000fg de hausse. Cette hausse peut avoir plusieurs impacts dont le principal concerne directement la production. Quand les moyens de production sont en hausse, cela peut jouer sur la production parce qu’on ne pourra pas acheter tout ce qui est recommandé. Ça va jouer sur le rendement du producteur parce qu’on ne peut pas acheter la dose normale pour nos plantes.

Sachant que l’agriculture est la base du développement d’un pays, le gouvernement doit s’impliquer dans ce secteur en rendant ces engrais accessibles à tous les producteurs. Subventionner les producteurs qui n’ont pas la possibilité d’acheter ces engrais. Je demande également l’accompagnement du gouvernement pour relever le défi de l’autosuffisance alimentaire. »

Pour sa part, Ansoumane N’Diaye, vendeur d’intrants agricoles, lui, tente d’expliquer la genèse de la montée en flèche des prix d’intrants agricoles : « selon les opérateurs qui nous approvisionnent à partir de Conakry et qui passent les commandes à l’étranger, le coût du transport des intrants agricoles de la Chine à Conakry a beaucoup augmenté… Ils affirment suivre le cours des prix sur le marché en tenant compte bien sûr du coût du transport de la Chine en Guinée. Le coût du transport, selon certains parmi eux, aurait triplé.

Maintenant, nous qui partons nous approvisionner auprès d’eux à Conakry, il va s’en dire que le prix auquel ils nous donnent, serait majoré de nos charges et dépenses, de Conakry jusqu’à Faranah, lorsque nous fixons nos prix aux producteurs. Cette augmentation ne dépend pas de nous les commerçants d’ici ni de ceux de Conakry. C’est une situation qui est due à la conjoncture mondiale. L’herbicide était subventionné un moment par le régime d’Alpha Condé. Celui-ci aussi avait finalement arrêter cette subvention pour les herbicides. Mais avec les engrais, elle est restée toujours maintenue même cela n’a pas pu empêcher la monter des prix. Les prix de l’engrais ont varié trois fois pendant la campagne 2021. Au premier arrivage, le prix était à 150 000fg, au deuxième arrivage, le prix a augmenté de 200 000fg. En fin de campagne, la quantité qui est venue, a été placée à 250 000fg malgré la subventionné. Maintenant, les privés qui vont acheter l’engrais sans subvention, eux vendent entre 400 000 et 450 000fg Parce que le prix est très élevé. L’année dernière, on prenait le carton d’herbicides entre 380 000 fg et 400 000fg chez certains. Mais cette année, le carton à Conakry dans les magasins avec les grossistes, se négocie entre 720 000 et 750 000fg. Donc, imaginez le prix auquel nous devrons placer ces produits une fois arrivés à Faranah, en déduisant tous nos frais depuis Conakry jusqu’au magasin ici… »

Par ailleurs, jointe par téléphone, la Directrice préfectorale de l’agriculture de Faranah, Fanta Diané, revient sur d’autres facteurs qui provoqueraient la hausse des prix des intrants ainsi que sur les efforts des nouvelles autorités pour relever le défi.

« C’est bien dommage que les paysans ne suivent pas ce qu’on leur dit par rapport aux réalités dans les autres pays qui nous approvisionnent en engrais qu’on trouve difficilement même. Est-ce qu’ils ont même reçu d’abord ? L’engrais est-il arrivé à Faranah ? S’agissant des intrants vendus par les commerçants privés au marché, c’est cher. L’État a même des difficultés pour la commande. Tout le monde est informé de ce qui se passe dans les autres pays surtout avec la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Ce sont ces pays qui fournissent l’engrais. Actuellement il n’y en a pas. Difficilement, le ministre s’est battu pour trouver une quantité. J’ai suivi à la télé que bientôt ils vont commencer sa distribution. Mais cela n’est pas encore fait. C’est cette réalité que la presse doit nous aider à expliquer à nos braves producteurs », a-t-elle suggéré.

Pour beaucoup d’observateurs, c’est la crise Russo-ukrainienne qui vient déstabiliser encore un peu plus les cours des intrants déjà partis en hausse avant ce conflit. Les agriculteurs locaux à Faranah accusent le coup et s’inquiètent de l’avenir tout en demandant une subvention de l’État pour relever le défi de l’autosuffisance alimentaire surtout à l’intérieur du pays.

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