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Dossier-COVID-19 : Sans plan d’urgence, ces millions de dollars qui échappent à la Guinée

Le Coronavirus, une pandémie qui affecte le monde entier a franchi la barre d’un million de personnes atteintes et plus de soixante quatre mille décès selon les statistiques rapportées par la presse internationale. La Guinée en compte plus de cent cas à date avec zéro décès. Dieu soit loué !

Pendant que les autres pays de l’Afrique préparaient leur plan d’urgence, la Guinée quant à elle était préoccupée à faire le double scrutin législatif et référendaire dont la tenue était fortement contestée par la communauté internationale pour son caractère non inclusif dit-on, les partis d’opposition, opposés au troisième mandat ont décidé de le boycotter.

En effet, la guerre d’égo qui entoure les acteurs (ministère de la santé et l’agence nationale de la sécurité sanitaire – ANSS) impliqués dans la lutte contre le Coronavirus fait qu’à date, la Guinée n’arrive pas à lutter efficacement contre la pandémie. Histoire de gros sous dit-on. C’est pourquoi le président les a convoqués à Sekoutoureya puisque lui-même l’a dit dans son discours devant eux que la gestion des fonds collectés pour lutter contre Ebola n’était pas transparente. Mais sauf qu’après avoir vaincu la maladie, il n’y a eu ni audit ni application des recommandations encore moins de leçons à tirer qui auraient pu nous épargner de la guerre d’égo constatée dans la lutte contre le COVID-19 et de l’improvisation en ce moment.

L’aide financière internationale pour combattre le COVID-19 en Afrique : la Guinée, quasiment exclue des fonds dégagés…

C’est le moins que l’on puisse dire lorsqu’on examine les différentes listes des pays africains bénéficiaires de cette assistance financière d’urgence pour contrer la propagation tant redoutée de cette pandémie sur le continent africain à économie fragile.

La liste française

La France a mis en place un dispositif financier d’un million cinq cent mille euros (1.500.000 Euros) destiné à combattre le COVID-19 dans cinq pays d’Afrique francophones (Sénégal, Côte d’Ivoire, Gabon, Mali et Burkina Fasso), dont la Guinée est exclue. Cette enveloppe permettra à ses bénéficiaires d’améliorer la veille sanitaire et la prise en charge des cas suspects de COVID-19.

Les possibles raisons de l’exclusion de la Guinée de la liste des cinq pays

D’aucuns estiment que l’exclusion de la Guinée s’explique par deux raisons majeures.

La première est le froid qui existerait entre Paris et Conakry depuis la tenue du double scrutin (législatives et référendaire) en début mars, contre les recommandations de Paris, de Berlin, de l’Union européenne et des USA. Sinon, comment comprendre, du point de vue de l’urgence sanitaire, que la Guinée qui enregistre plus de 73 cas officiels, soit absente sur la liste, alors que le Gabon et le Mali avec respectivement 21 et 36 seulement à la date du 3 avril y figurent, selon les statistiques établies par TV5 sur l’évolution de la pandémie en Afrique.

La seconde raison serait quant à elle liée à la mollesse de la réponse du gouvernement guinéen au COVID-19 qui ne cesse de faire de nouvelles victimes.

En outre, contrairement à la Guinée dont les mesures d’accompagnent se limitent pour l’instant à une faible réduction du prix carburant à la pompe (de 10000 GNF à 9000 GNF) et la distribution de plus de trente (30) tonnes de riz dans les cinq communes de Conakry sans pourtant que l’on sache qui reçoit quoi et selon quel critère, le Sénégal et la Côte d’Ivoire ont pris des mesures plus énergiques pour contrer les effets négatifs de la pandémie sur leurs populations.

La Côte d’Ivoire a mis en place divers dispositifs à ce titre. On peut entre autres citer : un plan de riposte sanitaire de près de quatre vingt seize milliards de francs cfa (96 millards FCFA) pour briser la chaine de transmission ; et un plan de soutien économique, social et humanitaire de mille sept cent milliards (1700 milliards de FCFA) pour soutenir les entreprises et renforcer les mesures sociales en faveur des populations. Ces mesures concernent par exemple, le report pour trois mois du paiement des factures d’électricité et d’eau et la prise en charge par l’État des factures des personnes les plus défavorisées sans compter la distribution des vivres aux populations affectées.

Sur ressources propres, sans exclure l’apport extérieur, les mesures économiques et sociales prises par le Sénégal pour contrer les effets négatifs du COVID-19 quant à elles portent sur la mise en place des actions suivantes : Création d’un fonds doté de un milliard quatre cent millions (1.400.000.000 FCFA) pour atténuer les effets sur l’économie nationale ; la création d’un fonds de riposte et de solidarité dénommé « Force COVID-19 » qui sera doté d’une enveloppe de mille millards (1000.000.000.000 FCFA). Il est prévu qu’un montant de cinquante milliards de ce fonds soit alloué à l’achat des vivres dans le cadre de l’aide alimentaire d’urgence ; et l’élaboration d’un plan de contingence suivant l’évolution la maladie pour un montant de soixante quatre milliards (64.000.000.000 FCFA).

En ce qui concerne le Gabon, RFI citant le président Aly Bongo a rapporté que « l’État a décidé de dégager la somme de quatre milliards de francs (4.000.000.000 CFA) par mois pour le règlement des factures d’électricité, et deux autres milliards pour l’ensemble des factures d’eau. Les bailleurs sont tenus d’accorder un moratoire aux locataires qui traversent des difficultés financières. Le gouvernement a également mis en place un fonds d’urgence de deux cent vingt cinq milliards (225.000.000.000 CFA) pour faire aux besoins urgents de trésorerie des entreprises. »

Enfin, le Bukina Fasso, pays le plus affecté par le COVID-19 sur la liste des 5 pays bénéficiaires de l’aide française, traîne encore les pieds dans la prise des mesures énergiques pour contrer la maladie.

En ce qui concerne le Mali, pays moins affecté sur la liste, le gouvernement vient d’adopter cette semaine un projet de loi devant l’autoriser à prendre par voie d’ordonnance toutes les décisions nécessaires dans le cadre de la lutte contre le COVID-19.

Ainsi, un constat peut être fait à présent sur les conditions  d’inscription sur la fameuse liste française dont la Guinée est exclue.

La France semble avoir procédé à l’inscription des Etats sur sa liste en tenant compte de leur niveau d’engagement dans la lutte contre le Coronavirus. Mais si on ne s’en tient qu’à ce critère, il est légitime de se demander pourquoi un pays comme le Mali (moins affecté que la Guinée) et le Burkina Faso (bien que plus affecté que la Guinée mais traînant comme elle les pieds dans la prise des mesures énergétiques) sont sur la liste ?

La raison de l’inscription de ces deux pays semble s’expliquer par des raisons géostratégiques liées à la lutte contre le terrorisme. En effet, compte tenu de leur extrême vulnérabilité face au terrorisme islamique dans la bande sahélo sahélienne, il est à craindre que la rapide propagation de la maladie au sein de leurs populations  n’accélère leur effondrement total.

Par conséquent, au delà du louvoiement du diplomate français en poste à Conakry qui tentait de camoufler les choses en disant qu’ « aucune représaille de la France contre la Guinée », les raisons de l’exclusion de la Guinée de la liste française semble donc s’expliquer au fond par divers motifs. Le pays manque, à la différence du Sénégal et de la Côte  d’Ivoire, d’un plan ambitieux de riposte contre le COVID-19. Son exclusion de la liste de la Banque mondiale vient corroborer cette thèse. Il ne représente pas non plus un enjeu sécuritaire dans la sous région qui mérite une attention particulière comme c’est le cas du Mali et le Burkina Faso qui doivent être aidés dans le contexte de cette crise sanitaire afin d’éviter que les groupes terroristes, relevant d’un islam radical et violent, ne mettent à profit leurs vulnérabilités pour les déstructurer, tout en étendant leurs tentacules sur l’ensemble de la bande sahélo sahélienne. Une dernière raison et non la moindre, pourrait résider dans la récente note diplomatique du Centre français d’analyse, de prévision et de stratégie (CAPS) intitulée : « L’effet panglion : la tempête qui vient en Afrique ? ». Selon l’Agence Ecofin qui a eu accès à cette note, la propagation du COVID-19 aura un effet catastrophique sur certains Etats fragiles et pourrait précipiter leur effondrement, permettant ainsi à la France d’avoir de nouveaux interlocuteurs sur le continent. Toute la question maintenant est de savoir si le régime guinéen à cause de sa brouille avec Paris sur l’épineux dossier de la nouvelle constitutionnelle (troisième mandat pour le président Alpha Condé ?)  n’est pas rangée dans la catégorie de ces Etats fragiles dont l’effondrement est attendu au regard de cette note.

Toutefois, interrogée sur les raisons de l’exclusion de la Guinée de la liste, l’Ambassade de France en Guinée semble exclure la mise en œuvre de toute mesure de représailles liée au respect par le gouvernement guinéen de son calendrier électoral malgré l’avis contraire de Paris. 

L’ambassade passe plutôt en revue le financement d’importants projets en Guinée. Mais une action d’envergure comme celle qui vient d’être initiée en faveur des cinq pays africains francophones touchés par le Coronavirus n’est pas encore à l’ordre du jour, comme pour dire que le règlement des comptes en politique peut affecter la bonne santé de la coopération entre deux États, même dans le contexte d’une crise sanitaire majeure.

La liste de la Banque Mondiale

Autre mauvaise nouvelle pour la Guinée du moins pour l’instant, elle est également exclue de la liste du Groupe de la Banque mondiale qui vient d’être rendue publique le 2 avril dernier par une décision de son conseil d’administration. Dans son communiqué, la Banque mondiale a déployé  une aide d’urgence de 1,9 milliards de dollars américains afin de soutenir la riposte sanitaire des pays en développement (25 pays) déclare que son conseil d’administration « a approuvé (…) une premièire série d’opérations de soutien d’urgence en faveur des pays en développement, en activant un mécanisme d’aide accélérée dédié face à la pandémie de Covid-19 (coronavirus). Ce premier groupe de projets d’un montant global de 1,9 milliards de dollars destiné à accompagner 25 pays à travers le monde. 40 autres pays pour y être ajoutés avec la même procédure.

Tout ce que le gouvernement guinéen peut espérer après la publication de cette première liste, c’est de faire figurer la Guinée sur la prochaine liste de quarante (40) pays restants, en présentant un dossier costaud, chiffré, précis, concis et clair. Ceci est d’autant plus urgent que le pays sur la base de ses seules ressources internes ne peut venir à bout de la lutte contre cette pandémie qui met à rude épreuve les systèmes sanitaires des pays les plus avancés dans sur la planète.

A noter par ailleurs, qu’en plus de l’aide française, le Sénégal est le seul pays de la liste française qui bénéficie également de l’aide d’urgence de la Banque mondiale. Il bénéficie également d’une importante aide directe américaine de 1.9 millions de dollars, soit 1.4 milliards de FCFA dispensée par l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) dans le même cadre, sans compter, comme le déclare un communiqué de l’ambassade des USA au Sénégal, l’inclusion de ce pays dans un dispositif de financement américain contre le Covid19 destiné à 64 pays dans le monde pour un montant de 274 millions de dollars.

Pour sa part, pour aider les pays qui ont une économie non résiliente, à combattre le Coronavirus, le fonds monétaire international (FMI) a prévu un fonds d’une bagatelle de cinquante milliards de dollars américains (50.000.000.000 USD).

Du côté du gouvernement, l’on rapporte que les consultations ont déjà commencé sous la houlette du premier ministre Kassory Fofana en vue de produire rapidement un plan  d’urgence de lutte contre le COVID-19 permettant à la Guinée de bénéficier de ces fonds.

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