«Face à la crise à répétition que connait le système éducatif guinéen, j’ai toujours proposé une année sabbatique. Cela permettra de poser le vrai diagnostic, d’analyser profondément les problèmes dont souffre notre école, d’assainir le milieu, de soigner le mal à la racine pour sauver l’école guinéenne…» C’est ainsi que s’est exprimé Amadou Damaro Camara, le président du groupe parlementaire RPG Arc-en-ciel quand nos confrères d’Espace FM ont demandé son avis sur le bras de fer entre le SLECG et le gouvernement.
Pour Damaro, la solution se trouve dans une année blanche. A défaut, le pays va tourner en rond sans jamais stabiliser la situation. Cette année sabbatique, selon lui, sera l’occasion de faire l’état des lieux, de tout revoir, savoir où on était, où on est et où allons-nous, qu’est-ce que nous voulons ?
Concernant les huit millions qui sont aujourd’hui le nœud gordien de la crise, le président du groupe parlementaire du RPG, s’est interrogé : « je suis d’accord qu’on paie 20 millions à chaque enseignant. Mais à quel enseignant ? Des gens qui ne sont jamais en classe ? Même parmi vous les journalistes, il y a des enseignants qui ont abandonné les cours et qui continuent à percevoir les salaires d’enseignant ! Beaucoup d’entre vous ont eu accès à la Fonction Publique à travers le concours d’accès à l’enseignement ! Certains sont affectés à Koundara. Ils perçoivent leurs salaires et leurs primes de dépaysement. Mais ils n’y sont pas ! Ils sont tous ici à Conakry en train de travailler dans les radios, dans les journaux et dans les sites. Tenez-vous bien ! Depuis que le Président Alpha Condé est arrivé au pouvoir, les salaires ont doublé. Et pour quel enseignement ? Pour former qui ? Des littéraires ? L’Etat joue sa partition. Que voulez-vous ? L’année dernière, l’Etat a versé 1.300 milliards aux universités privées où les fondateurs ont fait des fausses déclarations sur le nombre des étudiants reçus. Quand les cadres du pays, des universitaires agissent de cette façon nébuleuse, il y a un problème !… »
Malgré la proposition des responsables de SLECG qui pensent que les huit millions sont négociables, pourquoi le gouvernement refuse d’aller à la table de négociations ?
«Je vois plutôt un problème d’égo. Il faut coûte que coûte ça… Je ne peux pas parce que je n’ai pas les moyens. Si ce n’est pas ça, je ne serai pas d’accord… C’est vrai ! Le syndicat par essence, c’est la négociation. Il revendique, on lui donne un peu, il va et après il revient… Mais dire vaille que vaille, ce n’est pas du syndicalisme… Et d’ailleurs, on négocie ce qui est négociable. L’Etat a déjà donné les 40%. Et puis huit millions sur quelle base ? Il faut faire la part des choses. Parmi eux, il y a les enseignants du secondaire, ceux du primaire et ceux de la maternelle. Il y a des surveillants et que sais-je encore… C’est à tous ceux là on paie les huit millions comme salaire par mois ? Pas d’hiérarchie … », s’est-il interrogé avant de donner son point de vue sur la réaction du Premier ministre qui dit qu’il n’est pas question d’évoquer le problème des huit millions.
«Le Premier ministre a été clair. Il dit que l’Etat ne peut pas. C’est son franc-parler qui fait mal aux gens. On peut tout lui reprocher, mais on ne peut pas dire que Kassory n’a pas pratiqué les finances ! Mon problème, et je l’ai dénoncé, l’Etat manque d’autorité. Rappelez-vous. Quand 750 policiers Sénégalais avaient grevé et refusé de reprendre le service, ils avaient été licenciés et remplacés. Nous avons beaucoup de jeunes qui veulent travailler. Ils attendent et ils sont prêts.»
Que pense Damaro du cafouillage qui s’est produit lors de l’installation des élus locaux et le report de ces installations ?
«C’est une crise artificielle. Ces accords, j’ai dit au départ qu’on aurait dû respecter la loi. Quand on a constaté les fautes du côté des magistrats, il fallait saisir le Conseil Supérieur de la Magistrature. Les arrêts des Tribunaux sont sans appel. On n’a pas respecté cette disposition. On a préféré d’abord prendre la rue, ensuite on passe à la table de négociations et enfin on signe des accords. Mais qu’est-ce que les accords peuvent apporter? Aujourd’hui on n’a ni paix, ni stabilité…. »
Ce report d’installation des élus locaux, est-ce un repli tactique pour mieux sauter ? Une stratégie du RPG Arc-en-ciel en perte de vitesse?
« Non. Ce n’est rien de tout cela. Pourquoi ? Nous avons plus de 200 élus sur les 348. On n’a pas de problème à ce niveau .Nous sommes rassurés de ce côté. On est majoritaire. On a des problèmes internes. Au lieu d’avoir des têtes de liste, on ne l’a pas fait. Aujourd’hui, cela crée des difficultés de leadership. Mais nous avons un parti où règne la discipline… On va planifier tous ces malentendus d’ici là. La décision du report dont vous parlez, ne vient pas de nous. Ce sont les autres qui, constatant la tension sur le terrain, ont demandé qu’il y ait report…»
Amadou Damaro Camara, dans son intervention de ce matin a dénoncé le manque d’autorité de l’Etat face à la grève des enseignants et le non-respect de la loi concernant les résultats des communales.