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Coupure d’internet en Guinée : l’effet Big Brother

Le rétablissement du réseau internet se fait à tâtons, après une coupure  survenue le vendredi 23 octobre. Une preuve éloquente que nous sommes dorénavant dans un univers orwellien, où la police de la pensée tournerait à plein régime.

Cette obstruction à la liberté d’expression préoccupe les ONG de défense des droits humains et les partenaires de notre pays, dont l’Union Européenne. Même si l’on prétend agir pour éviter que le pays sombre dans des violences communautaires.

C’est l’ONG Internet sans Frontières qui est en première ligne de la condamnation  du « blocage des réseaux sociaux en Guinée ». Dans un communiqué publié à cet effet,  Internet sans Frontières déplore « cette censure qui intervient alors que le président en exercice vient d’être déclaré vainqueur de l’élection présidentielle. Rappelant que Internet Sans Frontières s’était joint à de nombreuses organisations pour appeler les autorités à préserver la connectivité pendant la période électorale ».

Selon toujours cette ONG, « dans un tweet depuis supprimé, le Directeur de l’ARTP [directeur général adjoint, ndlr], l’agence de régulation des télécommunications, confirmait, le 24 octobre 2020, l’ordre envoyé aux opérateurs de brider la bande passante, “afin d’intensifier la lutte contre la haine en ligne” ».

Tout en relevant que « la déclaration du Directeur de l’ARTP contraste avec celle d’Orange Guinée rendue publique le 23 octobre 2020, qui mentionnait un “incident technique”. Cette communication contradictoire donne peu de gages d’un processus transparent, dans la mise en place d’une mesure disproportionnée, non nécessaire, et dont la légalité doit être questionnée. »

Par ce geste, le  « Gouvernement de Guinée s’ajoute à la liste des autorités qui ont l’habitude de censurer Internet dans des moments politiques importants. En mars 2020, le réseau a été fortement perturbé lors du référendum constitutionnel », fustige l’ONG.

Pour finir, Internet Sans Frontières souligne que « la lutte contre les discours haineux en ligne ne doit pas servir à renforcer la censure. D’où cet appel lancé dans la foulée  au  Gouvernement guinéen à rétablir l’accès aux réseaux sociaux.

Cette coupure d’internet est perçue  comme étant une « attaque en règle contre la liberté d’expression », par Amnesty International.

L’ONG regrette surtout que les autorités guinéennes ne se soient données la peine d’annoncer les coupures et perturbations enregistrées sur « la connexion à internet et les appels téléphoniques depuis et vers la Guinée depuis  vendredi 23 ».

La mesure de suspension par la Haute autorité de la communication (HAC) pour un mois le site d’information Guinéematin.com, suite à « la diffusion en direct sur la page Facebook du site des opérations de dépouillement » de plusieurs bureaux de vote, a été également qualifiée « d’extrême » par Amnesty.

L’Union Européenne a aussi mis à profit sa réaction à la crise postélectorale, pour insister sur le fait que  « tous les acteurs impliqués dans ce processus doivent pouvoir jouir pleinement de leur liberté de mouvement et d’expression. Il importe également que les moyens de communication, en particulier l’accès à l’internet, soient garantis en toute circonstance. »

Cette levée de boucliers provoquée par la coupure d’internet a confondu les autorités compétentes, qui ont préféré se murer dans un silence troublant.

Seule la Haute Autorité de la Communication (HAC) s’est fendue d’un communiqué pour  mettre en garde  les médias contre  la « diffusion des discours de haine et d’images incitant à la violence ». Tout en mentionnant  que ceux qui  se hasardent à de tels actes, seront exposés  à des sanctions dont l’échelle varie de l’avertissement, la mise en demeure, la suspension, à  l’interdiction.

On appelle ça remettre les pendules à l’heure. Et comme le dit ce proverbe, « mieux vaut tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de vouloir l’utiliser »…

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