Les artistes ont ceci de particulier qu’ils sont des rassembleurs. Tout le monde ou presque les connaît. Tout le monde consomme leur musique et les adule. Ils sont adoptés par toute la communauté. En tant que vedettes, tout ce qui les concerne intéresse vivement leurs fans. Surtout, quand ils meurent d’accident de la circulation. Un événement brutal et violent qui surprend tout le monde et auquel personne n’est préparé.
Et pourtant, rendons-nous à l’évidence, cela est bien du domaine du possible. Et nous en sommes quelquefois les témoins. Les artistes, au même titre que les autres usagers de la voie publique, font des accidents. Certains en périssent et cela affecte profondément un nombre infini de personnes, à travers le monde
Nous avons tenté, il y a quelques années, de dresser un répertoire de nos compatriotes illustres qui sont morts, par suite d’accident. Trop de contingences nous ont freiné en chemin, nous empêchant de finaliser nos recherches. Néanmoins, ce premier pas nous a permis de moissonner quelques informations, certes très limitées, mais que nous allons vous proposer au fur et à mesure. Elles portent sur les décès qui ont frappé sans distinction, toutes les catégories socio-professionnelles et corps de métier de notre pays.
Nous le faisons, en souvenir de tous ces inoubliables acteurs de notre développement, morts par accident de la circulation, qui ont loyalement servi la patrie et laissé dans nos cœurs, des traces indélébiles.
Cette chronique va commencer par les artistes. Elle nous est inspirée par les deux derniers accidents qui ont coûté la vie à Navigator, le 03 avril dernier, à Dabompa et Aminata Diallo, première dauphine, miss université 2019, le 25 mai, à la T6.
Avant eux, bien d’autres artistes avaient perdu la vie par accident. Ce sont, successivement :
1-Aboubacar Demba Camara, artiste émérite du Bembeya jazz national. Mort à Dakar en 1973. Il venait juste d’arriver avec son orchestre qui devait offrir des spectacles dans cette ville. C’est sur le chemin entre l’aéroport et le centre-ville que la tragédie est survenue.
2- Aguibou Barry, flûtiste du Syli Authentique. Mort en 1978, au pont Kaka, à 05 km de Coyah.
3- Dyely Fodé Dioubaté, chanteur vedette du Horoya Band National et Directeur de l’ensemble instrumental national. Mort d’un traumatisme crânien, le 1er juillet 1981, au carrefour 08 novembre. Il quittait, sur sa moto MZ, le syli cinéma situé dans l’enceinte de l’actuel centre culturel franco-guinéen, pour le cinéma 8 novembre. A la traversée de la chaussée, il a été heurté par un conducteur de mobylette, qui rejoignait la banlieue, en provenance du marché Niger à Kaloum.
4- François Koivogui, chef d’orchestre des Sofas de Camayenne, mort le 13 mars 1993, à l’orée de la ville de Fria,
5- Mamady Kourouma‘’Tabouley’’, batteur chevronné des Sofas de Camayenne. Mort le 1er août 1996. De retour de Tassana, au petit matin, il avait percuté un camion semi-remorque stationné sur le bord de la chaussée, à Matam.
6- Andrée Kouyaté, choriste, fille du célèbre Sory Kandia Kouyaté. Morte en compagnie de Tabouley dont nous venons de faire mention ci-dessus.
7-Cheikh Smith Chérif, pianiste, arrangeur, compositeur, producteur, interprète de grande renommée. Mort le 25 septembre 1998 à Abidjan, après avoir été percuté par un véhicule
8- Hamid Chanana, mort fauché par un véhicule, à la traversée de la chaussée, le 24 décembre 2007 à Conakry.
9- Souleymane Sâry Bah, artiste conteur à la radiodiffusion nationale. Mort à la traversée de la route Le Prince, à hauteur du carrefour ’’cirage’’.
A cette liste, nous ajouterons le cas de Pap Soul, autre rappeur de renom, décédé dans un accident grave survenu la nuit, au district de Maléah, à une quarantaine de km de Kindia. Le bilan avait été très lourd : une vingtaine de morts, principalement, des membres d’une équipe de football qui se rendait à Kankalabé (Dalaba) pour un tournoi amical. Leur minibus était entré en collision avec un camion.
Il y a aussi Dioumessy, un autre jeune rappeur de génie qui a trouvé la mort sur la route de Kankan, en compagnie de son groupe. C’était en 2016, si nos souvenirs sont exacts, à la veille de la Tabasky. Ils étaient attendus pour un spectacle à l’occasion de la fête.
Cette liste est-elle exhaustive ? Jeannot williams D N de la culture pourrait y répondre, lui qui tient à la mise à jour régulière du fichier des artistes disparus.
Dans tous les cas, aucun indicateur vérifiable n’existe pour évaluer tout ce que notre pays perd, en termes d’inspiration, de créativité mais aussi de construction de notre société, quand disparaît un seul de ces artistes.
Imaginons toute la joie, le bonheur et la paix qu’ils pouvaient nous apporter, s’ils avaient vécu.
Eh, oui, la perte est grande pour nous, mais aussi, pour bien d’autres, à travers le monde. Tout cela, à cause des accidents qui tuent !